Nous savons que Marx et Engels furent enthousiasmés à la lecture de l’Origine des espèces et qu’ils envisagèrent une collaboration scientifique avec l’auteur, dont l’enjeu n’était rien moins que de replacer l’histoire des sociétés humaines dans le grand mouvement de l’histoire de la vie sur terre. La rencontre n’eut pas lieu, mais le chantier reste ouvert.
Les études en cours sur nos proches cousins, chimpanzés et bonobos, pourraient nous apprendre pas mal de chose sur la question de l’éthique. Quelle est l’origine des valeurs morales ? Tout dépend de l’idée que l’on se fait des êtres humains, de leurs motivations, des liens avec leur semblable.
Pour ceux qui se placent dans la tradition biblique, l’histoire commence mal. Après la désobéissance initiale, le premier acte historique, c’est le meurtre d’Abel par son frère. La messe est dite. Hors de la loi divine, les humains sont des brutes capables du pire.
Pour les révolutionnaires français de 89, au contraire, les droits humains sont inscrits dans la nature humaine. Liberté, égalité, fraternité sont des aspirations naturelles au bonheur commun.
Homo homini lupus
C’est une question hautement politique. Pour les réactionnaires de tous les temps, dont J. de Maistre reste le modèle, la société ne peut survivre que si elle est soumise à un pouvoir inspiré par Dieu. On peut remplacer Dieu, par les lois du marché et on obtient le néo-libéralisme !
Car il n’y a rien de plus faux que d’associer le libéralisme économique à la démocratie. Le marché libre crée et aggrave les inégalités sociales, il a donc besoin de s’appuyer sur un pouvoir fort qui contraigne la majorité. A l’inverse dés que la majorité, le peuple, conquiert des parcelles de pouvoir, il les utilise pour limiter la liberté du marché.
Mais ce qui fait la force du néo-libéralisme, c’est la vision d’un monde où chacun n’est guidé que par son intérêt personnel, où chacun est en guerre contre tous les autres. Cette vision correspond au vécu de la classe des détenteurs de capitaux, qui sont en permanence en concurrence les uns avec les autres, mais elle a fini par s’imposer comme une évidence aux yeux du plus grand nombre. Tout au plus, les gens de gauche déplorent cette situation et pensent qu’une bonne éducation peut développer des sentiments de solidarité. D’autres feront remarquer que les bénéfices que nous pouvons espérer à terme de la solidarité, sont plus importants que ceux que nous retirons d’une conduite égoïste.
Et si cette image de l’individu naturellement égoïste n’était qu’une fausse idéologie ? Si nous étions naturellement doués pour la solidarité ? En effet, contrairement au discours dominant, il semble bien que nous retirons des bénéfices immédiats d’un acte de solidarité autrement dit, qu’en faisant du bien aux autres, nous nous faisons du bien à nous même.
Le sentiment d’injustice
Pour le savoir, il faut remonter avant l’éducation, avant la société, et découvrir ce que l’évolution a produit chez nos cousins les singes, les primates et même avant.
Vous aurez des éléments de réponse en réécoutant sur France Inter l’émission de Jean-Claude Ameisen du samedi 27 septembre. On y apprend, entre autres choses merveilleuses, que le sentiment d’injustice est déjà très fort chez les corbeaux. On y apprend que nos cousins les singes sont capables d’empathie et de solidarité en dehors de leur famille et même dans certain cas en dehors de leur espèce. Bref, les sentiments de justice et de solidarité sont un produit de l’évolution. Ils sont apparus bien avant les êtres humains et font partie de notre nature. Mieux que çà, ils procurent du bonheur!
Cerise sur le gâteau, vous apprendrez même, que seule une organisation démocratique peut procurer à tous ces membres, l’égalité et la justice !
Alors ne ratez pas cette leçon : http://www.franceinter.fr/reecouter-diffusions/434611
Un grand merci M. Ameisen !