La comédie de la coalition contre l'état islamique laisse de plus en plus un goût amer.
Pendant que des responsables militaires des vingt pays composant la coalition internationale, constituée soi-disant pour lutter contre les forces de l’Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie, se réunissent, mardi 14 octobre, à Washington, la Turquie passe à l'action. Alors que l'armée turque n'a pas tiré un seul coup de feu contre les forces de l'EI qui sont à sa frontière, l'aviation turque a repris les bombardements contre les bases du PKK au Kurdistan. PKK qui a suspendu depuis deux ans la lutte armée contre l'état turc et demande seulement de pouvoir venir au secours des milices kurdes assiégées dans Kobané. La Turquie retient dans ses prisons les combattants syriens ayant traversé la frontière. Ceux ci ont commencé une grève de la faim pour pouvoir retourner au combat. La police turque a violemment réprimé les manifestants qui réclamaient un soutien effectif à ceux qui combattent l'EI faisant plus d'une trentaine de morts.
Hier le gouvernement turc a clairement énoncé ses choix politiques. Pas question de laisser des "civils" volontaires traverser la frontière pour soutenir les assiégés de Kobané. Pour le gouvernement turc, l'EI n'est qu'un épiphénomène, en Syrie le problème c'est Assad. Comment mieux afficher sa complicité avec l'EI? N'est-on pas en droit de souligner les tentatives de longue date menées par la Turquie pour déstabiliser son voisin du sud? Ne pourrait-on soupçonner une certaine affinité idéologique entre l'islamiste Erdogan et l'EI? Et de sérieux intérêts économiques vu les traffics en tout genre, entre autre pétroliers, menés avec l'EI. Sur le terrain des traffics, la famille Erdogan est bien placée. Le doute n'est plus possible. Le gouvernement turc ne lèvera pas le petit doigt contre l'EI, au moins tant que Kobané résiste, car l'EI fait le sale boulot à sa place.
Mais alors quel est la fonction de cette étrange coalition emmenée par Obama, qui comporte au moins un allié objectif de l'EI et quelques uns de ses parrains et financiers. Car pas plus le Qatar, que L'Arabie Saoudite et autres Émirats ne veulent d'une victoire en Syrie de la résistance populaire contre Assad. Le monstre islamo-fasciste est tombée à point nommé pour tenter de changer le cours de la révolution syrienne. Ça ne vous rappelle rien. Moi ça me rappelle l'histoire de l'Afghanistan et la fabrication des talibans par la CIA et les services secrets pakistanais qui ne voulaient à aucun prix de l'installation d'un régime indépendant et démocratique à Kaboul. Les mêmes qui ont joué les talibans contre Massoud, fort opportunément assassiné, jouent maintenant l'EI non seulement contre la résistance kurde, mais aussi contre les autres secteurs de la résistance populaire en Syrie.
On nous amuse avec des bombardements aussi télégéniques qu'inefficaces. Les malheureux otages assassinés sont autant les victimes des forcenés de l'EI que de la politique retorse des gouvernements occidentaux. Ces gouvernements qui ont besoin de faire croire qu'ils combattent l'EI, alors qu'ils l'utilisent pour essayer de remodeler la carte du Proche-Orient à leur profit. C'est à gerber!