Pour assurer sa réélection, un homme politique peut être tenté de peindre l’avenir en rose en ne lésinant pas sur les couches de peinture. De ce point de vue, John Kerry est certainement un virtuose du pinceau. Ancien candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2004 contre George Bush et secrétaire d’Etat sous la présidence de Barack Obama entre 2013 et 2017, il a été nommé envoyé spécial du président des Etats-Unis pour le climat. Dans quelques mois, il participera à la grand-messe de la Cop26. Avec un grand pot de couleur ?
Dans une interview publiée dans « Le Monde » du 11 mars dernier, John Kerry déclarait déjà : « Aucun responsable politique ne sera en mesure de renverser ce qui se passe dans l’économie mondiale : les milliards, voire les milliers de milliards de dollars qui commencent à être investis, le mouvement des multinationales et de leurs PDG qui se fixent des objectifs de zéro émission nette [de CO2] en 2050, ou les mesures qu’ils prennent pour verdir leurs entreprises et leurs investissements. Cela sera si profond, il y aura tellement d’emplois créés dans le monde, qu’aucun gouvernement, aucune administration ne pourra changer ce que font plus de 196 pays ». C’est du lourd, ça !
« On me dit que 50 % des réductions de carbone nécessaires pour atteindre le niveau « zéro » proviendraient de technologies qui n'ont pas encore été inventées. Les gens n'auront pas à renoncer à leur qualité de vie pour réduire les émissions. » Kerry a assuré aussi que les Américains n'auraient « pas nécessairement » à manger moins de viande, grâce aux recherches menées sur l’élevage et l’alimentation du bétail afin de réduire les dégagements de méthane. Il ajoutait : « Nous entrons dans une période extraordinaire de découvertes, qu’il s’agisse de la captation du CO2, d’hydrogène... Quel que soit le nombre de possibilités, nous devons toutes les explorer».
Je ne me sens pas rassuré du tout. Mais alors, là, vraiment pas du tout… Je m’imagine coincé dans un bus bondé, dévalant à vive allure une route en plein brouillard. Le véhicule ne dispose pas de système de freinage. Du moins, pas encore. Pour le conducteur, ce n’est pas un problème : on s’active à explorer les possibilités. Il faudrait juste pouvoir l’installer avant de percuter le mur qui se trouve quelque part plus bas…
John Kerry a certainement lu Enlightenment Now (Le triomphe des Lumières, 2018) de Steven Pinker (Université de Harvard) qui relevait que « les gens sont plus disposés à reconnaître l’existence du réchauffement climatique si on leur dit que le problème peut être résolu par des innovations politiques et technologiques au lieu de leur annoncer de terribles catastrophes ».
Je voudrais bien descendre.