Le joli nom garde aujourd'hui son charme venu de loin puisqu’on en attribue le concept à la cité antique d’Athènes, indûment d’ailleurs si l’on dépasse le principe politique pour ne le mesurer qu’à sa réalité dans le vécu de ses habitants. Le démos y représentait moins de 10% de la population, jeunes, femmes et surtout métèques et esclaves en étant exclus.
Aujourd’hui nous parlerions d’aristocratie (les meilleurs), d’oligarchie (le petit nombre), de ploutocratie( la fortune) ou d’autres privilègiés souvent associés ou combinés.
Et alors où en sommes nous, ici, aujourd’hui? Démocratie en grave crise ?
Les institutions et la pratique.
La République, cette fois nous devons le terme au latin, est un joli concept à son tour mais la population romaine du Senatus Populusque Romanus( le fameux SPQR) était également constituée d’une oligarchie et d’une plèbe de citoyens appuyés sur des millions d’esclaves et étrangers. Et le temps des Empereurs ne fut pas plus favorable à la grande masse.
Mais aujourd’hui où l’on considère à l’instar de Churchill que la démocratie est le moins mauvais des systèmes et que nous la réclamons à cor et à cri, même dans des Etats qui n’y ont pas encore accès, où en sommes nous ?
Si l’on s’en tenait à l’exemple de Strasbourg en ce mois de mai, il y aurait de quoi s’inquiéter sérieusement.
Un accident cardiaque a frappé le député PS de la 1° circonscription, Armand Jung, en pleine séance à l’Assemblée. Malgré des soins salvateurs immédiats, le parlementaire n’a pas retrouvé les moyens physiques suffisants pour poursuivre son travail. Il a donc démissionné plus d’un an avant des élections prévues en 2017 ce qui rend le siège vacant et provoque une nouvelle élection. Cette élection partielle a eu lieu dimanche dernier. A peine un peu plus de 2 électeurs inscrits sur 10 se sont déplacés. Proprement tragique pour l’expression démocratique.
Petit rappel des résultats du 1er tour
Agrandissement : Illustration 1
Suivent 12 autres candidats bien distancés et en dépit de l’intérêt qu’auraient mérité certains ils sont donc insignifiants. Le candidat centriste Laurent PY, jeune et nouveau venu, aurait pu créer une surprise mais l’UDI de Lagarde n’est pas le Modem de Bayrou qui a toujours réalisé de bons scores en Alsace.
Dans un suffrage à un tour le candidat Elkouby serait élu par moins de 7 % des électeurs inscrits. Il est par ailleurs suppléant du député démissionnaire dont il était aussi l’attaché parlementaire tout en étant conseiller départemental et adjoint au maire de Strasbourg. Un peu cumulard non ? Tout pour plaire ? Il faut croire que non.
C’est encore pire pour le candidat Jean-Emmanuel Robert (Les Républicains) moins connu comme élu de l’opposition municipale dont il est pourtant un des animateurs les plus combatifs : à peine plus de 4% des inscrits. Que se passe-t-il dans ce camp aussi ?
Tentative d’explication bien complexe.
Une chose est sûre : une élection partielle pour un mandat d’un an n’est pas envoutante surtout dans un contexte politique exaspérant. Mais quand même ! En gros les militants encartés et leurs amis proches auraient été à peu près les seuls à avoir consenti le déplacement si fastidieux? Pour les autres, la démocratie ou l’expression libre ne sont pas des biens assez précieux pour qu’on les utilise ne serait-ce que pour les sauvegarder !
Et puis on verra au second tour, il sera encore temps ! Tous ces candidats plus ou moins fantaisistes font déconsidérer la démocratie, il faut le montrer en s’abstenant de voter !
Et encore, les candidats manquent de séduction, de charisme, de pugnacité !
Plus sérieux sont ceux qui se désolent ou même qui sont révoltés par la zizanie, la foire d’empoigne souvent incompréhensible et les luttes fratricides qui sévissent à l’intérieur des grands partis dits de gouvernement. Et la fragilité ou la volatilité des chefs qui décourage ! L’absence de femmes en tête !
Marketing politique obsolète ? Il y a forcément une offre puisqu’il y des candidats mais quelle est la demande quand si peu d’électeurs s’expriment ?
Et si c’était tout simplement un désaveu du monde politique, une absence totale de confiance, une lassitude, le manque d’ambition citoyenne ou ,osons le dire, un mépris pour toute forme d’idéal. Trop ringard ? En raccourci, nous assistons là à une expression chiffrable de la crise morale, celle des mentalités grincheuses, intolérantes, désabusées et égoïstes. Les citoyens sont responsables du choix des élus à condition de participer.
Si un candidat convient, qu’on vote pour lui. Si aucun ne convient, qu’on se déplace quand même et qu’on s’exprime d’une façon ou d’une autre( il y a moyen) pour montrer son attachement à la démocratie.
Nul doute que des slogans-clés comme confiance, changement, espérance, renouveau, alternative… dont sont truffés les tracts et flyers en tout genre, sont éculés et peu affriolants. Apellera-t-on le prochain élu Monsieur 10% ?
Reste que « la démocratie ne s’use que si l’on ne s’en sert pas ».
A.S