audreybnt17 (avatar)

audreybnt17

Abonné·e de Mediapart

1 Billets

0 Édition

Billet de blog 8 août 2024

audreybnt17 (avatar)

audreybnt17

Abonné·e de Mediapart

La culture traditionnelle de riz au Vietnam

Pendant mon temps libre au Vietnam, j'ai décidé d'aller à la rencontre d'un producteur traditionnel de riz. En effet, cette pratique se perd, elle est remplacée par des méthodes conventionnelles chimiques. Mais grâce à Mr Việt et à ses semblables, la tradition persiste !

audreybnt17 (avatar)

audreybnt17

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

C’est à Rạch Giá, dans le sud Vietnam, que je rencontre Mr Việt. Né en 1964, c’est un habitué des pratiques agricoles depuis petit. Aujourd’hui, il est producteur de riz dans le Delta Du Mékong, le bassin de l’agriculture vietnamienne.

Illustration 1
Figure 1 : Mr Việt me reçoit sur sa ferme © Audrey

La particularité de Mr Việt est la technique de production. En effet, d’après une étude publiée en 2022 par FAOSTAT et USDA (voir la figure 5), le Vietnam est le 5ème pays producteur de riz au monde. Cela ne se fait pas sans l’aide marquée d’intrants chimiques. Cette pratique conventionnelle entraîne dans un premier temps une dégradation de l’environnement, et aussi un investissement financier de plus en plus grand. L’Ambassade de France au Vietnam parle d’« augmentation des coûts de production » en 2023.

Mr Việt se démarque donc par le retour à des pratiques traditionnelles. Il a travaillé auparavant durant 13ans à la tête du département de l’Agriculture du district de Châu Thành, et a donc lui-même remarqué ce phénomène de traitements chimiques des cultures. Il a souhaité retrouver des pratiques plus respectueuses de l’environnement en revenant aux méthodes traditionnelles.

Illustration 2
Figure 2 : Livres dont Mr Việt est l'auteur (sur sa pratique agricole à gauche, sur le district à droite) © Audrey

Pour ce faire, de 2011 à 2017, il est parti à la recherche des outils traditionnels qui ont été délaissé pendant plusieurs années. Il s’est déplacé dans plusieurs provinces, récupérant parfois même des outils utilisés au Cambodge.

Illustration 3
Figure 3 : Pointe tirée par les buffles pour préparer le sol © Audrey

Il a commencé cette aventure seul, puis un groupe de 27 à 28 agriculteurs s’est formé appelé la Innovative Farmer Cooperative (IFC). Aujourd’hui, ils sont 30 et rassemblent 22ha. L’une des spécificités de la culture traditionnelle est la variété de riz cultivée. Contrairement aux variétés modernes, elles ne produisent qu’une fois par an, en saison des pluies. En dehors de ça, les agriculteurs vivent de la crevette, parfois de légumes et aussi d’ananas. En effet, la région est particulièrement connue pour ses ananas. Le but du groupe est de faire de l’écotourisme à travers leurs champs et jardins. Ce groupe leur permet de voyager ensemble pour découvrir d’autres exploitations agricoles, et apprendre sur les autres manières de cultiver.

En termes plus techniques, la méthode traditionnelle impose de ne pas utiliser de produits chimiques. Cela implique d’innover dans les méthodes pour conserver un sol fertile, comme utiliser l’Azolla « petite fougère flottante associée à l'algue Anabaena azollae qui a la propriété de fixer l'azote, est utilisée par les riziculteurs asiatiques comme engrais » (Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation, 1992). Mr Viet a découvert cette plante par les livres.

Aujourd’hui, Mr Việt a 2,5ha de riz, et a loué 2ha de terre à à ses voisins afin de transformer le riz conventionnel cultivé auparavant en riz traditionnel. Pour retrouver un sol sain, Mr Việt attend 1 an que les lombrics reviennent, et observe avec attention les indicateurs environnementaux signes de non-pollution, par les plantes, la présence de poisson, etc.

La pratique traditionnelle à ses avantages, car son coût de production est réduit, elle préserve l’environnement, raconte une histoire, demande peu de présence dans les champs contrairement à la méthode conventionnelle qui impose des traitements réguliers. Cependant, il s’agit d’un travail qui ne rapporte pas beaucoup. Malgré un faible investissement, la production annuelle ne permet pas de concurrencer les 3 à 4 productions par an des fermes conventionnelles. Etant plus lente, la variété traditionnelle est donc aussi plus exposée aux ravageurs, mais le riz peut s’en remettre après exposition.

Mais grâce à l’appui de Mekong Organics, à ses ventes locales ainsi qu’en ligne, et à la production de crevettes, Mr Việt voit encore plus grand. Il aimerait s’investir dans la noix de coco, la vente de poisson et faire de l’éco tourisme.

Illustration 4
Figure 4 : Riz vendu sur internet par Mr Việt © Audrey

Ce qui est le plus marquant lorsque l’on échange avec Mr Việt, c’est son plaisir à partager son travail. Il aime enseigner aux curieux sur ce qu’il fait, pourquoi il le fait, en quoi ça consiste. Il ne demande qu’à pouvoir toucher de plus en plus de monde au sujet de son activité.

Un grand merci à lui et à ses proches pour m’avoir accueillie, permise d’en apprendre plus sur la culture vietnamienne, et de continuer à la faire vivre ainsi !

Illustration 5
Figure 5 : Classement des pays producteurs de riz © (FAOSTAT, USDA, 2022)

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.