M. Attali disait dernièrement sur BFMTV que le monde fait face "à des risques de troisième guerre mondiale". Je le pense aussi. Non pas en 2035 comme il semble le penser, mais maintenant.
Dans le Wall Street Journal du 8 octobre 2015, on pouvait lire que des avions militaires russes avaient violé à deux reprises l'espace aérien turque (et donc celui de l'OTAN). Le secrétaire général de l'OTAN parle d'une provocation qui "ne ressemble pas à un accident".
Qu'arriverait-il si la Russie, par exemple, attaquait la Turquie, ce qui serait de facto perçu comme une agression envers l'ensemble des pays membres de l'alliance ?
Par ailleurs, le nombre des pays impliqués dans ce conflit fait peur: plus de quarante selon le journal Le Monde.
Or, selon M. Attali (mais il n'est pas le seul), l'alternative pour éviter une propagation du conflit serait de mettre en place "un état de droit mondial".
A plusieurs reprises dans le passé, M. Hollande a parlé d'un "nouvel ordre international", et M. Sarkozy avant lui, d'un "nouvel ordre mondial" à venir.
Il est tout à fait louable de souhaiter l'unité du monde autour d'une même conviction pour mettre fin aux conflits. C'est notamment la vision de M. Benjamin Creme et de son mouvement Partage International (Share International), mais aussi de tant d'autres.
Mais cet état de droit mondial sera-t-il instauré par l'adhésion populaire ou par la force ?
En effet, que penser d'un système politique centralisé, qui aurait obtenu les pleins pouvoirs, non pas par l'expression du libre-arbitre des peuples, mais par un consentement forcé ? Nous en avons, dans l'histoire, des exemples à grande échelle: la Chine de Mao et l'U.R.S.S.
Peut-on dire sérieusement que c'est un idéal à atteindre ?
Actuellement nous voyons bien les dysfonctionnements de l'Union Européenne et de la zone euro. On a le sentiment qu'il faut à tout prix maintenir la santé économique de l'Europe à coups de quantitative-easing gigantesques, qui n'apportent pas davantage de croissance.
Même si de plus en plus d'opinions s'élèvent contre les décisionnaires des politiques de l'U.E., ceux-ci continuent d'avancer imperturbablement vers une chimère, dont celle de la monnaie unique, malgré les dissensions.
Alors bien sûr, on pourrait penser que la crise économique actuelle, couplée au risque de conflit planétaire majeur ainsi qu'à une crise écologique, vont éventuellement amener les peuples à accepter une nouvelle organisation du monde.
Mais croyons-nous sincèrement que c'est en faisant peur aux gens que l'on va aboutir à quoi que ce soit de durable ?
Ce serait oublier que ce qui n'est pas accepté par consentement libre, non seulement n'a aucune valeur réelle, mais créera du ressentiment parmi les populations.
Comment oserait-on espérer qu'un "état de de droit mondial" fasse évoluer les choses dans le bon sens, alors que ce même état aurait été construit sur des bases de mensonge et dans la violence ?
Les moyens utilisés sont aussi importants, sinon plus, que le but poursuivi.
Je ne suis pas sûr que des sentences telles que "On ira ensemble vers ce nouvel ordre mondial, et personne, je dis bien personne, ne pourra s'y opposer" (N. Sarkozy en 2009), ou encore: "Tout ce dont nous avons besoin est d'une crise majeure, et les nations vont accepter le Nouvel Ordre Mondial" (D. Rockefeller au Conseil de Sécurité des Nations-Unies en 1994) soient la meilleure façon de nous convaincre.
Par ailleurs, le timing actuel faisant coincider une crise économique majeure et un potentiel conflit militaire planétaire, ne manquerait pas d'étonner et de révolter les peuples, à qui l'on aura présenté l'état de droit mondial comme seule alternative, et qui s'apercevront qu'on les a trompé, sur le fond, et sur la forme.
Pour conclure, souhaitons-nous véritablement réformer le monde ? Faisons-le par le partage et la tolérance mutuelle, et laissons les peuples décider. N'imposons pas une vision unique et unilatérale comme seule alternative au chaos actuel.
Dans le même ordre d'idées, ne serait-il pas criminel au niveau politique d'avoir créé, ou favorisé -ne serait-ce que temporairement- les conditions du chaos pour mieux faire accepter l'ordre ensuite ?
Billet de blog 16 octobre 2015
Vers un conflit planétaire majeur ou un état de droit mondial ?
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