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Billet de blog 2 septembre 2025

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Boy A, Boy B, James Bulger - Part 3

Ou l'histoire vraie du meurtre d'un enfant de deux ans, assassiné par deux enfants de dix ans.

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Le Procès ...

Jusqu'à cinq cents manifestants se rassemblent devant le Tribunal d'instance de Sefton dans le comté du Merseyside lors de la comparution initiale des deux jeunes meurtriers. Les parents des accusés sont transférés dans différentes régions du pays et prennent de nouvelles identités suite aux menaces de mort qu'ils reçoivent. Le procès complet s'ouvre le 1er novembre 1993 au Palais de Justice de Preston dans le comté du Lancashire, et sera mené comme un procès pour adultes. Les deux accusés sont sur le banc des accusés séparés de leurs parents, les juges et les fonctionnaires du tribunal en perruques et robes qui est la tenue obligatoire. Les deux jeunes assassins nient les accusations de meurtre, d'enlèvement, et de tentative d'enlèvement (1). Chaque garçon est assis bien en vue dans le tribunal sur des chaises surélevées afin de voir au-delà du box des accusés réservé aux adultes. Ils sont accompagnés de deux travailleurs sociaux et de gardes. Leurs parents et leurs familles sont en retrait. Robert Thomson et Jon Venables n'auront pas droit à la parole, et ne se parleront pas entre eux.

La presse se permet beaucoup de commentaires sur le comportement des deux jeunes meurtriers, ce que la CEDH condamnera en statuant en 1999 sur le fait "que ces deux jeunes garçons n'auraient pas bénéficié d'un procès équitable en étant jugés en public ET devant un tribunal pour adultes". Lors de ce  procès, l'avocat principal de l'accusation réfutera avec succès le principe du "doli incapax" (2).

Robert Thompson et Jon Venables sont donc finalement considérés par le tribunal comme "capables de discrétion malveillante", sous-entendu "capables d'agir avec une intention criminelle" car suffisamment mâtures pour comprendre qu'ils commettaient un acte délibéré et grave malgré leur jeune âge. La pédopsychiatre qui a rencontré Robert Thompson avant le procès sera interrogée au tribunal pour savoir s'il connaissait la différence entre le "bien et le mal, et si le fait d' éloigner un jeune enfant de sa mère et le blesser était mal". Sa réponse sera fuyante : "si la question est posée selon la prépondérance des probabilités je pense pouvoir répondre avec certitude", tout en rajoutant que Robert Thompson souffrait de stress post-traumatique après l'agression de James Bulger. La pédopsychiatre de Jon Venables sera quant elle sans équivoque, et répondra franchement "il connaissait la différence entre le bien et le mal".

L'accusation portée contre eux repose en grande partie sur les plus de vingt heures d'enregistrements des interrogatoires qu'il ont subis de la police, et diffusés au tribunal. Il ressort de ces enregistrements que Robert Thompson est celui qui a joué un rôle majeur dans cet enlèvement, alors que l'idée d'emmener James Bulger jusqu'à la voie ferrée est de Jon Venables. Ce dernier dira même que James Bulger semblait l'apprécier, "il me tenait la main, il me laissait le prendre dans mes bras" sur le trajet jusqu'au lieu de son meurtre.

Les deux jeunes meurtriers alors âgés de dix ans sont reconnus coupables du meurtre de James Bulger au tribunal de Preston le 24 novembre 1993, devenant ainsi les plus jeunes meurtriers condamnés du XXe siècle. Le juge déclare à Robert Thompson et Jon Venables à l'issue de ce procès, que le crime qu'ils ont commis resterait d'une méchanceté et d'une barbarie sans précédent, et démontrait une conduite à la fois rusée et cruelle. Il les condamne à une détention "au bon plaisir de Sa Majesté" (4), avec une recommandation de maintien en détention pendant "de très, très nombreuses années", soit une peine minimale de huit ans.

L'Après ...

À la fin du procès le juge lève les restrictions de leur anonymat en autorisant la divulgation des noms des deux meurtriers déclarant vouloir agir ainsi "dans l'intérêt public qui prime sur l'intérêt des accusés, car il est nécessaire d'avoir un débat public éclairé sur les crimes commis par de jeunes enfants". Cette décision sera par la suite critiquée par David Omand (5) qui soulignera "le traitement de l'affaire par le service de probation, et les difficultés qu'elle a créées" dans son rapport de 2010.

Peu de temps après le procès et après que le juge ait recommandé une peine minimale de huit ans, deux autres juges réclament une peine plus dure d'un minimum de dix ans afin qu'ils ne soient pas libérés avant leurs vingt ans. Les rédacteurs du Sun (6) déposent alors une pétition demandant que les deux meurtriers soient maintenus en détention plus longtemps encore. Signée par 280 000 personnes, il est décidé en juillet 1994 que les deux meurtriers restent maintenus en détention pendant un minimum de quinze ans. Ainsi ils ne sont plus libérables avant leur vingt cinq ans en 2008.

Cette ingérence est critiquée, et l'augmentation de la peine qualifiée de "vengeance institutionnalisée par un politicien jouant avec la galerie". L'augmentation de la peine minimale est en fin de compte annulée en 1997 par la Chambre des Lords, qui juge illégal qu'un ministre de l'Intérieur décide des peines minimales pour les jeunes délinquants. La Haute Court de Justice et la CEDH statueront que "même si le Parlement peut fixer des peines minimales et maximales pour chaque catégorie de crime, il appartient au juge du fond et au vu de tous les éléments de preuve et arguments de l'accusation et de la défense, de déterminer la peine minimale dans chaque affaire pénale".

Tony Blair alors ministre de l'intérieur du cabinet fantôme (7) prononce un discours à Wellingborough dans le comté du NorthHampshire, au cours duquel il déclare : "nous entendons parler de crimes si horribles qu'ils provoquent à parts égales colère et incrédulité, ce sont les manifestations hideuses d'une société qui devient indigne de ce nom". Le Premier Ministre John Major surenchérit en affirmant "que la société devrait condamner un peu plus et comprendre un peu moins". Un juge de première instance déclare quant à lui "que l'exposition à des vidéos violentes aurait pu encourager les actions de Robert Thompson et Jon Venables. Cette déclaration est contestée par David Maclean le ministre de l'Intérieur de l'époque, qui rétorquera que la police n'a jamais trouvé aucune preuve reliant l'affaire à des vidéos violentes.

Néanmoins, certains tabloïds britanniques persistent à écrire que l'agression contre James Bulger a été inspirée par le film Child Play (8), l'enquête policière ayant révélé que ce film avait été loué par le père de Jon Venables dans les mois précédant le meurtre. Cependant il ne sera jamais prouvé que Jon Venables l'ait vu, et ce même si les deux meurtriers ont reproduit une scène du film qui montre la poupée Chucky couverte de peinture bleue lors d'une partie de paintball.

Un détective du Merseyside déclarera : "nous avons examiné environ deux cents titres loués par la famille Venables. Il y en avait certains que personne n'aurai osé voir. Mais rien, ni scène, ni intrigue, ni dialogue ne permet de dire que cela a incité un garçon à commettre un meurtre". L'inspecteur Ray Simpson de la police de Merseyside commentera : "si vous voulez lier ce meurtre à un film vous pourriez tout aussi bien le lier à The Railway Children (9). Mais rapport ou non avec ce meurtre, une loi de 1994 clarifiera "les règles relatives à la disponibilité de certains types de matériel vidéo pour les enfants" (9).

A Suivre, Détention et Libération

NOTES 

(1) cette dernière accusation de tentative d'enlèvement concerne un incident survenu au New Strand un peu plus tôt ce même 12 février 1993 (jour de l'enlèvement et décès de James Bulger), alors que Robert Thompson et Jon Venables tenteront d'emmener un autre petit garçon de deux ans, mais en seront empêchés par la mère de ce dernier.

(2) qui présuppose que les jeunes enfants ne peuvent être tenus légalement responsables de leurs actes, exceptées si l'on peut prouver le contraire, (office of justice programs).

(3) notes du procès

(4) terme juridique qui désigne la durée indéterminée du service de certains fonctionnaires nommés, ou les peines indéterminées de certains prisonniers. Il repose sur le principe que certains fonctionnaires sont nommés par la couronne et peuvent être révoqués pour des raisons politiques, contrairement aux employés, (wiki).

(5) coordonnateur britannique pour la sécurité et le renseignement pour le cabinet office entre 2002 et 2005.

(6) tabloïd anglais

(7) dans les pays appliquant le système de Westminster, un cabinet fantôme comprend les députés d'un parti d'opposition qui sous la conduite du chef de leur parti forment un cabinet alternatif à celui du gouvernement. Chaque membre du cabinet fantôme est chargé de surveiller et critiquer l'action d'un ministre du gouvernement, (wiki)

(8) connu en France sous le titre Chucky mettant en vedette la poupée Chucky, et qui compte huit films, et une série récente, (wiki)

(9) film de Lionel Jeffries tourné en 1970 mettant en scène des enfants, (wiki).

Illustration 1
J. Venables - R. Thomson

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