Depuis que je ne suis plus enseignant, le mois de septembre est un véritable délice.
La rentrée de septembre, pour moi, c'était extrêmement brutal. Quand j'étais élève, je devais subir le choix des enseignants concernant la classe dans laquelle j'allais être, donc les camarades et l'emploi du temps que j'allais avoir, et les enseignants que je verrai toute l'année. Un immense stress pour moi, auquel s'ajoutait parfois celui de la découverte d'un nouvel établissement. C'est bien simple, la veille de chaque rentrée scolaire, j'allais de cauchemars en insomnies.
Quand je suis devenu enseignant, mes symptômes ont empiré. Déjà, il y avait les aléas classiques : l'emploi du temps, les nouveaux collègues, peut-être la nouvelle direction, les élèves entrants, tous ces gens dont il fallait retenir les noms et certaines des fonctions en quelques jours pour pouvoir être efficace. Parfois, j’étais aussi professeur principal, ou bien je me retrouvais à gérer un module, une option.
En outre, il y avait mes aléas de jeune enseignant : c'était moi le nouveau collègue. Je devais gérer plusieurs postes sur plusieurs établissements, et ceux-là changeaient chaque année. À chaque fois, il fallait désapprendre le fonctionnement des anciens établissements pour s'adapter aux nouveaux.
Enfin, j'étais enseignant en SVT : je devais m'adapter au matériel de chaque établissement, et le nombre d'élèves que j'avais oscillait entre 250 et 350 par an. Autant de noms à retenir, de visages à connaître, de voix à individualiser.
Toute cette charge mentale, elle se concrétisait début septembre. Au moment où j'écris ces lignes, les enseignants et les élèves sont à quelques jours de subir ce rituel. À moins d'une semaine de devoir digérer cette montagne d'informations de diverses natures et d'importances variées en moins d'un mois.
Pour ma part en tout cas, je le vivais ainsi. Je suis particulièrement anxieux, je sais donc que mon ressenti est différent de beaucoup de gens qui attendent ce jour avec une impatience non feinte. Mais pour moi, vraiment, la rentrée, c'était une épreuve. Je bénissai les vacances d'octobre pour me permettre la pause nécessaire à l'évacuation de la fatigue qu'elle générait. Depuis deux ans, deux mois de septembre, je me rends compte du poids que cela faisait peser sur mes épaules.
Depuis que j'ai quitté le métier d'enseignant, en réalité.
Maintenant, septembre, pour moi, c'est le Sweet September, le doux mois de septembre.
Quel contraste avec ma vie d'avant ! Quand j'étais prof, j'aimais bien davantage le printemps : au delà des floraisons et de la chute des blousons, c'était l'approche de la fin de l'année scolaire qui me mettait en joie. La possibilité d’un repos salvateur. En septembre, le stress, l’emballement, la précipitation m'aveuglaient. Aujourd'hui, je peux ouvrir les yeux et lever la tête. Admirer, m'émerveiller et écrire.
Professionnellement, c'est la reprise pour moi aussi. Je recontacte mes clients partis en vacances, j'en démarche de nouveaux. Je travaille sur la communication autour de mes activités d'auteur, de rédacteur, de formateur, d'enseignant, de vidéaste et de communiquant. L'occasion de rencontrer de nouvelles personnes, de nouveaux projets passionnants, de nouvelles choses à apprendre. Pas une montagne d'informations donc, mais des cailloux, à la rigueur des rochers, épars, et totalement gérables. Si bien que je profite sans souci du reste.
Parce que c'est la reprise d'activité aussi pour la culture. Les séries reviennent, les podcasts aussi, les associations, les rendez-vous avec les amis. Tout doucement, la routine se remet en place, sans en faire trop, sans se presser. Aujourd'hui, je peux dire que son côté rassurant surpasse largement son aspect rébarbatif.
Surtout, septembre, c'est beau. Les pommes et les poires commencent à mûrir sur leurs branches. Le soleil est toujours un peu piquant, mais de moins en moins présent. La température baisse, doucement mais sûrement, quittant les frontières de l'insupportable. Les feuilles jaunissent, la pluie reprend un peu de terrain, l'automne est en embuscade. Les commerces rouvrent, les bras et les visages perdent peu à peu leur bronzage. C'est un mois de transition, de changement et de stabilité à la fois.
J’aime septembre pour toutes celles et tous ceux qui ne le peuvent pas. En particulier mes anciens collègues.
Je souhaite un bon courage à toutes celles et tous ceux qui appréhendent cette rentrée. Surtout, surtout, préservez votre santé, et bonne rentrée !
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