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Billet de blog 1 janvier 2010

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La machine à décerveler, âme damnée du Sarko-berlusconisme

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La télévision d'Etat a toujours été, depuis de Gaulle, un instrument détourné à son profit par le pouvoir en place. Mais avec Sarkozy, cela se traduit par une donne supplémentaire : le mépris.

Le minimum vital que la France devra rendre à chacun, après le départ souhaité de Sarkozy, c'est le sentiment de dignité citoyenne.

Il est difficile aujourd'hui de se sentir quelqu'un de"digne"en France, lorsqu'on est un citoyen ordinaire, même si l'on a les moyens décents pour vivre, même si l'on n'est pas traqué pour sa couleur de peau et ses papiers d'identité, tant on est pris pour des imbéciles, pigeonnés, jour après jour, par une télévision d'Etat de plus en plus formatée pour complaire au Prince, et donc de plus en plus a-créative, abrutissante et aseptisée.

Sur les chaînes officielles, aux heures du JT, vous pourrez toujours zapper :

Vous verrez défiler, en boucles parallèles, au même moment, dans le même ordre, avec les mêmes mots pour les décrire, les mêmes scènes, les mêmes thèmes, les mêmes « scoops » : Le mauvais traitement de l'information, on devrait dire sa maltraitance, va de l' insignifiance pipolitique montée en épingle aux grands soulèvements populaires négativés : qui se souvient aujourd'hui de la grève des caissières, occultée par le mariage hâtif en catimini ostentatoire, du couple Bruni-Sarkozy ?

Pour épicer ces mets prédigérés, on passe et repasse, en guise d'agents de sapidité, les vidéos lacrymogènes ici d'un accident horrible, là d'une catastrophe sans précédent, un autre jour on s'indigne du meurtre d'un fou furieux, ou d'une grève ferroviaire, le tout assorti de lieux communs et de commentaires umpolitiquement orientés :

Le sentiment de notre propre indignité n'est pas une donnée matérielle objective, il réside dans la façon dont l'autre détourne le regard, dans sa manière fugace, par ce regard en biais, de nous déconsidérer.

Pour la plupart des exclus qui habitent la France, le sentiment de leur indignité réside dans le regard fuyant des non-exclus qu'ils croisent au hasard de leurs errances. Pour la plupart des téléspectateurs citoyens, ce sentiment réside dans le blanc d'oeil vitrifié des fantômes umpolitiquement corrects qui s'agitent sur son écran pour lui faire avaler bobards et couleuvres en, soi-disant, l'informant. A l'heure de grande écoute et en particulier, à l'heure du JT, on nous enfonce les clous de ce qu'on a bien envie que l'on sache tout en détournant notre attention de ce que l'on veut nous cacher.

On nous ment en nous regardant bien dans les yeux à travers la surface vitrée du téléviseur, on nous ment tellement qu'on n'écoute même plus mais le matraquage subliminal, lui, est bien là, véhiculé par les images, coupées, montées, brouillées, vidées de toute véracité.

Schneiderman le dit et le répète sur son site « arrêt sur images » mais n'oublions pas qu'il a été sommé officiellement de partir de France Télévision au lendemain de l'élection de Sarkozy. Le 7 mai 2007, alors que ce dernier croisait sur le yacht d'un magnat de la presse, du côté de Malte : tout un symbole !

Ne nous étonnons pas dès lors que, dans un sursaut de dignité, certes délirante, certains, convaincus d'être trompés à longueur d'images et de communiqués mensongers, se mettent à croire que l'homme n'a jamais marché sur la lune et que les attentats du 11 septembre étaient téléguidés par la Maison Blanche.

Présentateurs, animateurs, commentateurs, et surtout invités politiques, comme par hasard généralement de l'UMP, sont porteurs, avec plus ou moins d' arrogance, ou de désinvolture assumée, genre JF Copé, de mépris du peuple, d'une condamnation a priori et sans appel des facultés d'entendement du tiers Etat !

Comme pour mieux le briser, ce tiers état, ce peuple citoyen, on le condamne à subir soit les coups de boutoir de la morgue gouvernementale, soit la contemplation avilissante de « panem et circenses » toujours plus « hot », toujours plus « hard », bref, toujours plus de« divertissements », ad nauseam..

Le vice contre la vertu

Le citoyen lambda est généralement vertueux, car il est confronté à la nécessité quotidienne d'établir des liens harmonieux avec ses pairs, tout en assurant sa survie. Ce n'est pas en étant délinquant, tire-au-flanc ou en faisant des « 'affaires »louches ou en mentant à ses administrés et à ses supérieurs, que l'on parvient à cet équilibre nécessaire pour mener sa barque en bon père et mère de famille, quand on est un citoyen ordinaire. Le nombre de « profiteurs » chez le peuple est bien inférieur à celui qu'on trouve dans les classes très aisées, contrairement à ce que l'on cherche à nous faire accroire à travers le discours sarkozyste.

L'homme d'affaires, l'homme de pouvoir, surtout s'il est haut placé dans un gouvernement qui a érigé le mensonge et l'exploitation de la crédulité citoyennes en pilier de "l'information" quotidienne, sorte de spectacle permanent, n'a besoin d'aucune vertu citoyenne pour survivre, bien au contraire.

Faute de vertu personnelle, vénal, porté au dévergondage qu'encourage l'argent facilement gagné, le pouvoir s'efforce par tous les moyens d'avilir le peuple, pour l'amener à sa hauteur, ou plutôt, à sa bassesse, de le plonger dans la dériliction voyeuriste, pour mieux se l'attacher et le soumettre à ses desseins.

Car, en effet, dès lorsqu 'ils tentent d'échapper au matraquage électoral de l'Elys'UMP, véhiculé par les chaines officielles, les téléspectateurs n'ont guère le choix à l'heure du JT, le matin, à midi et en soirée : "ça" ou s'abrutir devant des jeux stupides de cupides, qui pleurent de peur à l'idée de rater leur lot, ou des divertissements archi-archétypés ricaneurs de tout et (à moitié) exhibitionnistes, ou des séries niaises avec rires enregistrés pour être sûr que c'est bien là qu'il faut rire.

Bien sûr, il reste la cinq avec ses braves bêtes et Canal + en clair avec ses bêtes guignols, mais tout ça ne vaut pas une fille (à moitié) à poil.

Le petit écran ressemble de plus en plus à une Circé pour compagnons d'Ulysse immobiles, qui transforme les téléspectateurs en porcs vautrés dans la fange des reality shows et déboutonnages salaces d'animateurs histrioniques tous plus lamentables.

Quel choix pour le téléspectateur citoyen à l'heure de grande écoute ?

Oubien il regarde les chaînes avec des émissions de type berlusconiste et il est avili, par procuration, par mimétisme et par complaisance fatale.

Oubien il regarde les chaînes qui proposent de l'information, et il est déconsidéré, mis plus bas que terre, par celui qui lui parle à l'écran, car pris pour un abruti fini prêt à gober n'importe quel boniment : Pis, il devra une fois sur deux au moins subir la morgue d'une arrogance dirigeante « invitée » qui lui vendra la soi-disant rupture sarkozyste et son cortège de réformes iniques, en l'enfumant de ce nouvel opium du peuple : le catéchisme sarkozyste, ce catalogue d'oxymorons dicté mot à mot par l'Elysée !

Le téléspectateur, à l'heure de grande écoute, n'a donc le choix qu'entre l'indignité et la dériliction. Le dégoût de soi-même trouve son expression dans la haine de l'autre et nourrit le débat exclueur, tel celui de l'identité nationale : C'est à ces téléspectateurs formatés qu'il s'adresse en priorité, sûr d'y trouver des échos favorables. C'est là que croît et se multiplie la manne électorale du FN et de l'UMP.

Mais pas que : il y a aussi les vieux, les malades, les gens fatigués qui rentrent de leur travail, les désoccupés, les dépressifs, qui n'ont que l'argent du chômage etpour seule distraction la télé. Bref tous ceux qui ne peuvent échapper à cette chose monstrueuse, cette machine à décerveler dont UBU lui même n'aurait osé rêver.

La télévision hexagonale n'a jamais été un modèle d'objectivité, mais avec Sarkozy, elle est devenue, en plus, un instrument de torture pour l'intelligence des français.

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