Edwy Plenel signe un texte "L'heure de nous-mêmes a sonné" publié sur le site de Médiapart le 5 avril qui fait suite à la polémique à propos du droit de se réunir exclusivement entre personnes concernées par une discrimination (polémique visant l’UNEF). Si ce texte en restait à une prise de position sur cette question l’auteur de ces quelques lignes n’aurait pas écrit ce qui suit. L’analyse faite par Edwy Plenel s’adresse en effet à la gauche et prend acte d’une opposition entre deux gauches qu’il juge irréductible.
Un partie de la gauche est jugée oublieuse, égarée et même inculte parce qu’elle continue à croire en l’universalisme, et à affirmer que les races n’existent pas, ce qui pour Edwy Plenel relève d’une posture qui revient à tendre la main à l’extrême droite. En conséquence il acte deux gauches irréconciliables, celle qui soutiendrait les dominé.e.s et celle qui resterait du côté des réactionnaires. C’est la figure du social-traître, du rad soc, du socialo qui ressurgit. Mais cette fois ce ne sont pas les traîtres à la Sociale qui sont désignés comme telles mais ceux qui ne considérerait pas suffisamment la question de l’intersectionnalité.
Le titre « l’heure de nous-mêmes a sonné » s’adresse à l’autre gauche en réutilisant cette phrase d’Aimé Césaire. A ce « nous-mêmes » il indique qu’il ne faut rien attendre de cette gauche réactionnaire qui engloberait semble-t-il le PCF, le PS, EELV. Et donc ne pas tenir compte des élections à venir. Si cette posture très clivante à gauche pouvait aider dans les années 1970 - du temps où la gauche détenait l'hégémonie culturelle - à éclaircir le débat à propos de certains enjeux (autogestion, féminisme, écologie, étrangers…) cela devient un jeu dangereux alors que l’extrême droite est à la porte du pouvoir. Pire, cela veut même dire que pour Edwy Plenel les futures élections sont déjà gagnées par la droite et l’extrême droite et qu’il s’agit à gauche de distinguer le bon grain de l'ivraie pour pouvoir mener la bataille sociale dans la rue.
C’est un jeu dangereux, car « la rue » n’est jamais parvenue dans l’histoire à déloger l’extrême droite. Et avec elle la question des dominé.e.s sera vite réglée.
Cordialement,
Christophe Batardy