La cartographie des réserves de l’or noir (cf. tableau ci-dessous) montre que les pays producteurs sont en majorité ceux où la démocratie est la moins bien loti. En dehors du Canada, des Etats-Unis et du Brésil, les dix premiers pays producteurs de pétrole sont tous des pays où les droits de l’homme et les libertés fondamentales sont bafoués.Les énergies fossiles contribuent, en plus de la mise en danger de l’écosystème, à créer des instabilités politiques et économiques importantes. Un soulèvement en Arabie Saoudite ou dans les pays du golfe pourrait mettre en risque quelques 50% des réserves mondiales. Les conséquences sur les marchés des matières premières seraient alors gigantesques. Un feuilleton catastrophe commencerait alors par ces soulèvements politiques (jeunesses des pays du moyen orient qui aspirent à plus de libertés), se poursuivrait par de nouveaux records de prix du baril et se terminerait par une contagion de l’inflation à tous les pays du monde. Cette fragilité est plus importante que celle que les financiers ont mise en place par l’accroissement de l’endettement et la généralisation de cet effet de levier dans tous les arcanes de l’économie.Comme les banquiers ont donné crédit à des ménages peu solvables à travers les crédits hypothécaires subprimes, les gouvernements du monde (et du G20) ont donné une dépendance importante de leurs économies à la stabilité géopolitique des pays du golfe. De la même manière que le crédit aux ménages insolvables a causé la crise financière de 2008, la dépendance des économies mondiales vis-à-vis du pétrole pourrait créer une crise sans précédent : faillite d’Etat, famine, soulèvements.Cette crise économique est d’autant plus dangereuse, que (1) le système bancaire n’a pas encore totalement absorbé les pertes liées aux actifs douteux (l’amélioration des prix des actifs détenus par les banques est la conséquence des politiques monétaires accommodantes), (2) les banques devront dans le futur acquérir plus d’actifs « souverains » (conséquence directe de la nouvelle réglementation Bâle III) et (3) les Etats, garants de la stabilité de l’économie mondiale, ont des comptes dégradés par un endettement pharaonique et des déficits publics abyssaux.Un choc pétrolier se traduirait alors par l’accroissement de l’inflation, la sortie des investisseurs des dettes d’Etats, la difficulté des gouvernements à financer leurs dépenses (paiement des salaires des fonctionnaires, des prestations de retraite etc.), la faillite des banques dont les actifs « surs » perdraient de la valeur (la valorisation des obligations baisserait compte tenu du dérapage inflationniste) et enfin (pour couronner le film d’horreur) la chute des marchés financiers globalement.Force est de constater, que l’introduction des normes de solvabilité (Solvabilité II) pour les compagnies d’assurance constitue un facteur d’aggravation supplémentaire des mouvements erratiques des marchés boursiers. En effet, les compagnies d’assurance devront dorénavant utiliser les taux d’intérêt d’Etat pour actualiser (valoriser) leurs engagements. Cette nouveauté se traduit par la hausse des engagements (des passifs) des assureurs et réduit leurs solvabilités, lorsque les banques achèteront les actifs « souverains » pour constituer leurs ratios de liquidité.La fragilité politique se traduirait dès lors par une crise mondiale économique et politique (puisque la plus part des citoyens des pays occidentaux refuseront des plans d’austérité importants) sans précédent.C’est pour éviter ce type de scénario que le G20 doit agir et agir vite. Il doit mettre en œuvre une réflexion et des réformes réelles (politiques, économiques et financières) afin d’éviter le pire et d’anticiper le mouvement actuel de révolte qui a de forte chance de toucher d’autres pays. Nous sommes dans une situation équivalente à celle de janvier-février 2008, lorsque les marchés financiers commençaient à montrer des signes de faiblesse et de fragilité. L’inaction (ou le retard d’action) des régulateurs et des politiques n’a fait qu’aggraver la crise pour atteindre la situation que nous connaissons. Il est temps d’anticiper.
| Pays | Réserves | Part des réserves mondiales |
| Arabie Saoudite | 259,9 | 19,20% |
| Canada | 175,2 | 12,94% |
| Iran | 137,6 | 10,16% |
| Iraq | 115,0 | 8,50% |
| Kuwait | 101,5 | 7,50% |
| Venezuela | 99,4 | 7,34% |
| Emirats Arabes Unies | 97,8 | 7,22% |
| Russie | 60,0 | 4,43% |
| Libye | 44,3 | 3,27% |
| Nigeria | 37,2 | 2,75% |
| Kazakhstan | 30,0 | 2,22% |
| Qatar | 25,4 | 1,88% |
| Chine | 19,2 | 1,42% |
| USA | 19,2 | 1,42% |
| Brésil | 11,6 | 0,95% |
| Autres | 119,1 | 8,80% |