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Billet de blog 20 janvier 2011

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Indignons-nous contre les conséquences de la financiarisation de l'économie sur le monde du travail

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Le monde du travail a fortement évolué depuis les deux dernières décennies. La « pensée unique » nous explique que la mondialisation augmente fortement la concurrence sur le marché de la main d’œuvre. Cette pensée unique nous explique aussi que les entreprises cherchent à optimiser le couple rendement / coût de la main d’œuvre de la même manière que n’importe quelle matière première essentielle à la production.A croire cette pensée économique, il est nécessaire de réaliser un dumping sur le coût salarial, réduire les charges sociales, fiscales… Somme toute, ce mode économique cherche à harmoniser par le bas, le bien être des travailleurs pour augmenter à l’infini la rentabilité du capital.Cette théorie justifie ses conseils par le fait que les capitaux financiers sont mobiles et cherchent à se loger là où la rentabilité est la plus forte et les contraintes légales et réglementaires sont les plus faibles.Cependant, la comparaison entre la matière première et la main d’œuvre est toute relative. Les similitudes s’arrêtent à la porte de l’innovation (l’ingéniosité) de l’esprit humain et dans la corrélation qui existe entre l’épanouissement de la main d’œuvre, l’innovation, et la rentabilité.La recherche de rentabilité financière effrénée, issue d’une finance mondialisée dont l’objectif principal est de rentabiliser le capital au maximum, crée des disfonctionnements importants dans le monde du travail et dans la relation entre l’employé et l’employeur (ou l’actionnaire).Il est tout à fait justifié qu’un actionnaire qui apporte des capitaux et prends des risques soit rémunéré pour sa prise de risque et la mise à disposition de ses avoirs. Mais, il est inacceptable que cette rentabilité se fasse au détriment des autres composantes de la production.Nous ne pouvons que nous indigner de voir que la hausse des dividendes sur les dix dernières années à été sans commune mesure avec l’évolution des salaires.Nous ne pouvons que nous indigner vis-à-vis des nouvelles formes de capitalisme qui n’ont pour objectif que la rentabilité à court terme au détriment de la vulnérabilité du travail.La montée en puisse des fonds de Private Equity, qui achètent des entreprises par effet de levier, vulnérabilise le monde du travail. Une entreprise fortement endettée permet aux actionnaires (aux fonds de Private Equity) de démultiplier la rentabilité sur fonds propres – pour atteindre le niveau des 20% de rentabilité promise et qui permet aux gestionnaires du fonds de s’accaparer des émoluments confortables – lorsque la croissance est au rendez-vous. A contrario, lorsque ces entreprises rencontrent des difficultés sur leurs marchés – baisse de la croissance notamment – la seule solution de survie de l’entreprise devient la délocalisation, le licenciement et l’augmentation de la pression subie par les salariés.La recherche de rentabilité à court terme (les fonds de private equity ont en règle générale un horizon d’investissement de 10ans) réduit en même temps l’effort d’investissement dans les innovations qui feront la rentabilité future et les nouveaux emplois.La transformation de la gestion des entreprises (toutes industries confondues) vers une financiarisation de plus en plus forte est aussi synonyme de mal être dans l’entreprise.Nous assistons à l’accroissement des maladies liées au stress, à la généralisation de l’utilisation de stupéfiants dans le monde du travail, l’accroissement du sentiment de mercenaire dans la relation salarié – entreprise et des fraudes réalisées par les salariés dans le cadre de leur emploi.La flexibilité recherchée par la nouvelle financiarisation de la gestion des entreprises remplace, de plus en plus, les emplois salariés par les emplois précaires (consultants, intérimaires, auto-entrepreneurs…). Les entreprises font de plus en plus appel à des prestataires extérieurs - même si le coût est plus élevé – au lieu de réaliser de nouvelles embauches.Nous assistons à la conséquence de ces transformations dans le chômage des jeunes, dans la difficulté des seniors à poursuivre leurs carrières jusqu’à l’âge de départ en retraite (difficulté d’autant plus importante que l’âge de la retraite a été reporté de 2 ans sans qu’aucune mesure d’accompagnement n’ait été mise en œuvre pour aider les travailleurs seniors).Nous assistons aussi à la conséquence dans la précarité de certains travailleurs (dit travailleurs pauvres), dans le recul de l’âge des jeunes adultes à s’installer dans une vie stable (accession à un logement, situation professionnelle stable etc.), ou dans l’envolé des stages post étude qui constituent aujourd’hui la première expérience professionnelle.Les salariés de toutes les économies vivent cette pression. Les rebellions vis-à-vis de ce système se font déjà ressentir. Nous pouvons, à titre d’exemple, noter les mouvements sociaux dans certains pays européens (suite aux annonces des plans d’austérité). Nous pouvons aussi noter le soulèvement des travailleurs chinois contre leurs conditions de travail et de vie qui s’est traduit par une réévaluation du coût salarial en Chine (et ce malgré le fait que le régime chinois ne soit pas toujours à l’écoute des droits de l’homme).Pour expliquer, idéologiquement les fondements de la situation actuelle, il faut noter que le maître mot des penseurs de gestion (cabinets de conseil en stratégie notamment) s’appelle le « cost cutting » ou « cost killing ».Les entreprises, dans une réflexion purement comptable, cherchent à augmenter la rentabilité par la réduction de leurs charges (coûts salariaux en premier chef).Mais d’autres moyens existent. Ceux-ci s’appellent la mise à niveau de l’outil industriel, l’innovation, ou la recherche de nouveaux marchés ou de nouveaux débouchés. Ces solutions alternatives permettraient aux actionnaires d’obtenir de la rentabilité et offriraient aux salariés d’autres perspectives à minima moins stressantes, voir plus stimulantes dans un monde idéal.A titre d’exemple, des sociétés telles que Google, Apple, ou Microsoft (pour ne citer que ces trois sociétés fortement rentables) ont mis un point d’honneur à créer les meilleures conditions de travail à leurs salariés : salaires réévalués annuellement, conditions de travail stimulantes et agréables alliant le bien être, la rentabilité à la dignité humaine.Il est important que ces solutions s’accompagnent par la mise en œuvre du concept de « satiété dans la rentabilité ». Ainsi, tel que le sentiment de satiété que nous ressentons quand nous avons suffisamment absorbé de nourriture, les actionnaires et la nouvelle théorie financière devrait introduire (de gré ou de force) une limite à la rentabilité et aux dividendes. Cette limitation créerait alors de meilleures conditions pour limiter la prise de risques (se qui se traduirait alors par des systèmes financiers plus stables et résilients) et pour le rétablissement d’une relation travail – capital plus saine et juste.Comme nous l’indiquions dans notre premier post sur ce blog, nous sommes peut être face à une transformation importante qui verra l’émergence de « l’Homo-humanitus ». Celui-ci accepterait de défendre ses libertés sans contraindre ses semblables. Le rétablissement de la satiété dans la rentabilité des actionnaires pourrait contribuer à détendre la tension sociale ressentie mondialement et dans toutes les entreprises. Il permettra de rétablir un sentiment d’épanouissement de l’individu dans le travail. Espérons que ces concepts se mettront en œuvre avant que l’indignation des travailleurs ne se transforme en révolution.Amitié et fraternité chers lecteurs.

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