Depuis quelques semaines, les banques et les assureurs ont repris leurs publicités pour la promotion des produits d’épargne retraite. Après la réforme « Woerth-Sarkozy » des retraites, il est devenu certain que chacun d’entre nous devra accepter une réduction des prestations qu’il recevra au moment du départ en retraite.La communication du gouvernement Fillon s’est concentrée sur la nécessité de reporter l’âge de la retraite de 2 ans pour garantir le financement de la sécurité sociale. Cependant, elle a passé sous silence le fait que les Seniors n’arrivent pas à continuer leurs carrières jusqu’à 65 ans. Le report de l’âge de départ en retraite à taux plein signifie pour beaucoup de travailleurs la réduction des prestations qu’ils percevront dans le futur compte tenu de cotisations trop faibles, de carrières interrompues ou incomplètes.Les institutions financières de notre pays ne se sont pas trompées. Le recul de l’âge de la retraite s’accompagne d’un besoin d’épargne afin de compenser la baisse des ressources financières que recevront les futurs retraités. La réforme des retraites n’a pas pris en considération la particularité du marché de l’emploi français où le taux d’inactivité (de chômage) des seniors frôle les 40% !Deux options s’offriront alors aux seniors : 1° choisir des emplois précaires afin de compléter leurs prestations de retraite par des revenus du salaire ou 2° utiliser les avoirs qu’ils ont épargné, au cours de leurs vies actives. Les institutions financières voient dans la seconde option, une manne d’activité très intéressante puisqu’elle offre des opportunités d’épargne longue.Aujourd’hui je m’indique contre la « privatisation de la retraite » et contre le message véhiculé par ces publicités.En effet, l’exception française d’une solidarité extra-générationnelle, par laquelle les actifs (jeunes) cotisent et paient les prestations de retraites des aînés s’effrite. La cotisation individuelle, notamment à travers des produits d’assurance ou des régimes appelés à points, constitue une rupture vis-à-vis de cette exception. Chacun cotisera, dorénavant, pour sa retraite, comme nous risquerions de voir fleurir des cotisations santé, chacun selon ses besoins en laissant de coté la solidarité nationale.L’idéologie de cette privatisation est née dans les années 80 par la création de fonds de retraite et la chasse au rôle de l’Etat dans la subvention des risques [aussi bien de disparition de revenus après un certain nombre d’années d’activité puisque la personne n’a plus la capacité physique de travailler que pour la santé]. Celle-ci suppose que l’investissement de cotisations sur une longue période permettrait aux bénéficiaires de retirer des profits suffisants pour compléter leurs ressources financières au moment du départ en retraite.Cependant, cette idéologie suppose que les actifs financiers permettent de générer à long-termes des rentabilités élevées de l’ordre de 8% à 20% annuel. Pour réaliser ces objectifs de rentabilité, les gestionnaires se sont tournés vers les marchés financiers pour combiner l’endettement à la spéculation et à la mise sous pression des entreprises (notamment à travers la nécessité de réduire les coûts et la délocalisation des emplois dans les contrés où la main d’œuvre est la moins chère). Les évolutions récentes des marchés financiers (notamment l’alternance de bulles spéculatives suivies de dépression de plus en plus fortes) montrent que les fondements de cette idéologie sont loin d’être vérifiés. Les marchés financiers croient que les gestionnaires d’actifs pourraient à long-termes générer des rentabilités plus élevés que le taux de rendement des obligations d’état, mais la même théorie financière nous enseigne qu’une telle croyance ne peut être exacte puisqu’il existerait, dès lors, des arbitrages évidents sur les marchés (lorsque les mêmes marchés croient qu’il n’existe pas de possibilité d’arbitrage et que l’information est toujours disponible à tous les opérateurs). L’idée même de supériorité de l’épargne à long-termes par rapport au financement par l’état de l’épargne retraite est loin d’être démontrée. Elle est même est en contradiction avec la théorie financière que cette idéologie utilise.Nous pouvons par contre noter, au passage, que l’épargne à long-termes constitue une source de revenus (et d’émoluments) confortables pour les institutions financières (gestionnaires d’actifs, banques, compagnies assurances etc.).Grâce à la mise en œuvre de cette privatisation de la retraite, la France rejoindra la lignée des nations qui ont pour objectif la rentabilité financière avant tout en recherchant la rentabilité au détriment des valeurs humaines.Ma seconde indignation est beaucoup plus légère elle vient de la mise en scène de cette publicité. En effet, un des acteurs de cette publicité annonce qu’il partira en croisière pour célibataires quand il sera en retraite. Une autre actrice achètera une Harley pour faire la Route 66. J’imagine déjà cette Senior en déambulateur arriver jusqu’à la scelle de sa grosse moto ou ce vieux célibataire se coincer le dos en déchainant son corps sur les danses exotiques.D’ailleurs, je suis réellement curieux de connaitre la population visée par ces spots publicitaires. Si ces institutions visent les jeunes de 20 à 30 ans, je souhaite rappeler que ceux-ci enchaînent CDD sur stages et essaient d’éviter la précarité du chômage. Par contre, si elles visent les 30 à 40 ans, je pense que ceux-là cherchent à éviter le chômage et essaient de boucler les fins de mois avec des salaires faiblement réévalués depuis des années. Le Président Sarkozy nous a bien indiqué lors de sa campagne électorale qu’il sera le président du pouvoir d’achat perdu, ce programme est reporté à cause de la crise, mais force est de constater que le pouvoir d’achat ne s’est pas ressaisi. Enfin les autres populations, sont en train de s’accrocher à leurs postes en espérant qu’une restructuration ne les mettra pas au chômage ou si un tel malheur les touchait, qu’il leur permettra d’avoir une solution de départ en préretraite.Enfin, je crois qu’il faut que les institutions financières respectent leurs clients (ou futurs clients) puisqu’au moment du départ en retraite, grand nombre de nos concitoyens sont fatigués des années de dure labeur, ils veulent se reposer et vivre dignement, nous leur proposons pas ce minimum de dignité humaine que nous devons à nos ainés à nos parents, ou à nos grands-parents.Il est encore temps de s’indigner. Indignons-nous et demandons à reprendre la main sur le financement de la retraite par une plus grande équité : taxation des régimes chapeau (retraite garantie pour certains dirigeants), taxation du capital (ISF et épargne), limitation de la part de retraite calculé sur des salaires dépassant un certain niveau du SMIC etc.Des solutions existent encore faut-il avoir envie d’y réfléchir et de les mettre en pratique sans privilégier une catégorie sociale par rapport aux autres.Amitié et fraternité chers lecteurs.
Billet de blog 21 janvier 2011
Indignons-nous contre l'épargne retraite privée
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