« UN POUR TOUS ET TOUS CONTRAINTS »
Devant la statue de Pinel
47 Bld de l'hôpital 75013 Paris
En 1793, Jean-Baptiste Pussin, un ancien patient nommé surveillant et sa femme Marguerite ont amené Philippe Pinel, médecin-chef de Bicêtre, à retirer les entraves et les chaînes aux aliénés.
En 2011, l'Assemblée Nationale vote une surveillance et un contrôle à domicile des personnes malades sous camisole chimique. Avec ce parti-pris de la répression, les bracelets électroniques suivront. Deux siècles après, les chaînes sont de retour.....
Le projet de loi instaurant des « soins » sans consentement y compris en ambulatoire a été adopté à l'Assemblée Nationale et doit être examiné au Sénat. Nous devons amener les Sénateurs dans un sursaut républicain à bloquer cette loi.
Le collectif des 39 contre la Nuit Sécuritaire appelle à une large mobilisation pour faire barrage à cette loi honteuse qui transforme les soignants en police sanitaire et qui enlève leur humanité aux personnes malades.
La Folie n'appartient pas à la psychiatrie, l'Art parle d'elle, s'adresse à elle. C'est naturellement que de nombreux collectifs d'artistes, de peintres, de comédiens, de musiciens se joignent au collectif des 39 pour défendre l'humanité des personnes malades. Le combat pour une hospitalité pour la folie doit se mener aussi sur le terrain culturel et artistique. La folie est indissociable de l'humain, elle est fait de culture.
Tout au long de ce Meeting Politique et Poétique les prises de paroles et les performances artistiques se succéderont. Des patients, des familles, soignants, syndicats, politiques, philosophes, magistrats, membres du collectif des 39 et d'autres collectifs ou associations. Des musiciens (Ens'batucada et fanfare Aïouentounos du Collectif La Blanchisserie), des comédiens (Atelier Théâtre de la clinique de la Borde, Githec), des plasticiens (Stéphane Gatti pour la parole errante, le collectif Pouch'd). Et d'autres encore...
Tous sont engagés dans le mouvement d'une hospitalité pour la folie.
Toutes les cinq minutes on a eu le droit à ceci:
Un peu bruyant, mais bon la sono était bonne
Le peintre Ulysse Borderias du groupe des 39 en action:
Atelier théâtre de la clinique Laborde:
Un peu de musique de l'Ens Batucada du collectif de la Blanchisserie pour se détendre:
Sketch du Centre Antonin Artaud de Reims
La photo des gentils organisateurs:
L'oeuvre du peintre Ulysse Borderias terminée:
A appliquer de toute urgence:
Enfin un petit panoramique pour se faire une idées:
"Les députés que nous avons élus viennent de voter une « loi » dont l'intitulé est : Droits et protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques. Mais, à en lire les prescriptions, comment ne pas être sidéré par la méconnaissance grave dont elle témoigne à l'égard de ceux qui sont désignés comme des objets psychiatriques. Cette méconnaissance est nécessaire pour justifier une obligation de soins ambulatoires chez un médecin qui devra accepter ces « objets » comme tels, sans pouvoir établir une relation thérapeutique confiante d'homme à homme. Ainsi est instaurée la disparition de toute pratique de soins autre que médicamenteuse. Il faudra donc vérifier que le médicament a bien été absorbé et, en cas de non observance, passer aux médicaments injectés.
Faut-il être aussi dans la méconnaissance de l'Histoire, qui pourtant nous avertit de ce dont les pouvoirs publics sont capables :
- Tout d'abord de recouvrir d'un énoncé vertueux qui n'est qu'un emballage-cadeau, une réalité destructrice.
- D'utiliser ce que la science porte en elle de référence à la vérité pour entraîner une adhésion aux mesures mises en oeuvre en les prétendant nécessaires scientifiquement. N'était-ce pas au nom de la génétique naissante et de la nécessité logique de maintenir l'équilibre du patrimoine génétique de l'humanité qu'à été très bien organisée et médicalisée l'extermination des malades mentaux dans un pays occidental proche et cultivé, au milieu du siècle dernier (Alice Ricciardi von Platen, L'extermination des malades mentaux dans l'Allemagne nazie, 1948 — Réédition et traduction, érès, 2001).
L'instauration de la prévalence de la décision préfectorale sur celle du psychiatre et du juge, celle d'un fichier psychiatrique et de cette contradictoire « obligation de soins ambulatoires » ont été le fait de la majorité de nos représentants nationaux la quinzaine dernière.
La maladie mentale (la folie) est ainsi stigmatisée car elle n'est plus reconnue comme partie prenante de l'humain mais désignée comme cause de criminalité.
Est-il vraiment nécessaire d'organiser l'élimination sociale des patients des psychiatres ?"
Françoise Coret, psychiatre, Strasbourg
LETTRE OUVERTE DES PATIENTS ET ANIMATEURS DE RADIO
CITRON ENVOYEE AUX DEPUTES ET AUX SENATEURS
La radio qui n'a pas peur des pépins !
Un projet de loi va vous être soumis à la mi-mars concernant la psychiatrie. En tant que patients et en tant qu'animateurs de Radio Citron, nous avons lu attentivement ce projet de loi et nous tenons à attirer votre attention sur différents points.
La substitution de la notion d'hospitalisation sous contrainte par la notion de soins sous contrainte représente pour le patient la menace d'être en permanence sous surveillance, même bien après la crise et jusque dans son espace privé. En cas de soupçon de discontinuité d'observance, le patient serait réhospitalisé d'office, ce qui équivaut à être une sortie d'essai à vie : c'est un contrôle insupportable.
Le fichage et la surveillance par un comité spécial dès l'hospitalisation d'office, en plus du psychiatre, à l'encontre du patient même stabilisé ou guéri, la décision d'un juge ou d'un préfet sur le placement, le prolongement et la levée de l'enfermement, la dénonciation des soignants auprès d'eux, le protocole de soins établi par le Conseil d'Etat, protocole stéréotypé et non personnalisé, l'accaparement des psychiatres à des fins
d'expertise auprès des juges au lieu des soins, les jours d'hospitalisation complète imposés pour débuter les soins, la suppression totale des sorties d'essai, l'agitation procédurière nuisant au patient, toutes ces mesures et bien d'autres encore dans ce projet sont démesurément sécuritaires.
Rappelons qu'un patient en psychiatrie n'est pas un délinquant, mais un sujet de droit, qui, pour un moment, peut avoir le discernement amoindri. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, favoriser l'enfermement et la médication, considérer les personnes comme dangereuses, et à vie, n'est pas la solution à cette souffrance. C'est même pathogène.
Pourquoi donc nous enfermer, nous surveiller et nous contraindre pour une dangerosité supposée, quand
toutes les études menées démontrent que nous ne sommes pas plus dangereux que les autres ? Même, les malades psychiques sont 300 fois plus susceptibles d'être attaqués par des gens non malades, que l'inverse. L'événement qu'évoque Nicolas Sarkozy dans son discours d'Anthony en 2008 est l'exception. Alors pourquoi nous stigmatiser ? Et pourquoi vouloir soumettre cette loi en urgence, alors qu'elle est loin d'être anodine, et qu'elle est lourde de conséquences pour nous ?
En fait, cette réforme est complètement centrée sur une prise en charge autoritaire de la maladie psychique, contre la liberté individuelle et contre toute logique de résultat parce qu'elle ne prend pas en compte l'idée d'un
contrat responsable entre patient et psychiatre, et donc la possibilité pour le patient de négocier sa prise en charge librement avec les soignants, ce qui garantit l'observance du soin.
Les soins efficaces, qui laissent au patient la possibilité d'adhérer librement au soin et lui permettent donc d'être un je-sujet de son être, de sa vie, capable de penser sa maladie, la mettre en perspective, en comprendre la source de ce fait, la désamorcer en partie ou complètement, et éviter un éventuel passage à l'acte, les soins qui permettent le lien transitionnel avec les soignants, les soins humains, la parole, les entretiens, les activités sociales et créatives, ces soins efficaces ne sont pas soutenus par cette loi, au contraire elle les met en péril, contre toute raison. De plus, contraindre aux soins médicamenteux certains patients est si violent que
l'ambiance des unités de soins psychiatriques s'en trouvera détériorée. Poser un jugement de dangerosité et d'irrécupérabilité" sur un patient, c'est lui donner la sensation qu'il est traqué, par tous et partout, et favorise les passages à l'acte violents. Or les malades psychiques ont souvent subi une maltraitance dans leur jeunesse, source de pathologies. Car c'est par trop de souffrance que l'esprit cherche des solutions qui parfois génèrent des pathologies. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, l'enfermement et la médication, les considérer comme dangereux, à vie, n'est donc pas la solution à cette souffrance.
Cette loi nous propose d'aller mal, à vie. Elle est totalement contre-productive. Qui y gagne ? Ni les malades, ni la société, ni la sécurité.
Déjà, nous connaissons depuis quelques années une augmentation des hospitalisations d'office, pas parce que nous sommes plus dangereux ou plus nombreux à être malades, mais parce que beaucoup de structures de proximité, intermédiaires, qui accueillaient la parole des patients, on été fermées, alors qu'elles constituaient un véritable outil de prévention des risques et dont se saisissaient les patients. Celles qui restent manquent de moyens, de personnel, les attentes pour des rendez-vous sont dangereusement longues. Telle structure a vu en quelques mois son nombre d'hospitalisations d'office être multiplié par... 10 ! Par 10 ! Alors que les pathologies restent les mêmes. Que se passe-t-il ? Le préfet semble signer l'enfermement à tour de bras, comme le psychiatre, mais hésite à signer les levées : ils ont peur d'être jugés trop laxistes... non pour le bien du patient, ni pour celui de la société ! Voici des conséquences déjà visibles de l'esprit de cette loi.
Toute hospitalisation d'office est toujours extrêmement violente pour le patient. Tous nos témoignages personnels sont terrifiants. Nous en gardons un traumatisme à vie. L'hospitalisation doit de toute façon être soigneusement réfléchie et durer le moins possible. Or ce n'est pas du tout le sens de cette loi.
Si le grand public et notre entourage sont amenés à penser que nous sommes dangereux au point de nous contraindre, de nous enfermer à ce point, de nous contrôler à ce point, de nous "judiciariser" et qui plus est, d'urgence, quelle image de nous et quelle réaction vont-ils avoir ? Et nous, quelle image pouvons-nous avoir de nous-mêmes ? Et vous, si vous craquez ? Comment va se comporter une population persuadée que tous les malades sont dangereux, ou que tous les dangereux sont enfermés ?
Aussi, dans un souci d'efficacité des soins, comme dans un souci d'une société capable de se pencher avec raison sur les véritables dangerosités dans notre vie à tous, dans un souci de justice et de justesse, nous refusons chaque terme de cette réforme. Ces actes risquent d'être perpétrés en votre nom, en notre nom.
Ne sacrifions pas des citoyens qui souffrent, qui se battent individuellement pour se soigner, et toute
la profession qui avait tant progressé pour le bien de toute la société. Nous souffrons de ce projet. Nous faisons peu de bruit parce que nous sommes surtout occupés à tenir et nous soigner. Mais nous sommes là, nombreux, à vouloir nous soigner correctement et rester citoyens libres et responsables.
Ne nous enfermez pas dans des hôpitaux-prisons, dans une image terrible, dans des contraintes et des protocoles de soins stéréotypés, par peur ! Au nom d'un principe illusoire de précaution. Aidez-nous, au contraire, car nous souhaitons aller mieux, souffrir moins et avoir notre place, utile et légitime, dans notre société.
Mesdames et messieurs nos Députés et sénateurs, vous nous représentez, nous vous demandons de pop voix et notre refus légitime de cette loi, lors du débat au Sénat.
Veuillez recevoir nos salutations citoyennes.
Les patients et animateurs de radiocitron.com