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Billet de blog 3 août 2025

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Je baise mes bâtiments

L’architecture ne se résume pas à des plans ou des normes. C’est un acte de désir, de corps à corps avec la matière, une jouissance charnelle que seuls les architectes vrais connaissent. Ceux qui n’ont jamais ressenti cette pulsion face à un mur ne peuvent prétendre construire. Je baise mes bâtiments, et je l’assume.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il ne s'agit pas de plans, de normes ou de "projets bien conçus". Il s'agit de désir. De pénétration. D’un corps à corps avec la matière. Quand l'architecture devient un acte d'amour cru et charnel, ceux qui n'ont jamais bandé devant un mur n'ont pas leur place sur les chantiers.

Stériles, faiseurs de façades froides,

Je vais vous parler de baise.

Pas de vos petites vies sexuelles tristes, rythmées par des compromis et des demi-mesures. Non. Je vais vous parler de la vraie baise. Celle qu’on fait à la matière. Celle qu’on ose, nu, sans honte, sans faux-semblants, quand on s’appelle architecte et qu’on sait ce que c’est que pénétrer un espace.

Quand je construis, je bande. Quand je trace, je caresse. Quand je creuse, je pénètre.

Chaque trait de crayon est une montée. Chaque coupe, un coup de rein. Chaque maçonnerie, un emboîtement charnel. Vous n’avez jamais compris ça. Vous êtes restés à la surface, à cocher des cases, à signer des plans sans jamais vous salir les doigts.

Moi, mes doigts sentent la pierre. Mes paumes, la poussière collée. Ma peau, la sueur d’un mur qui transpire.

Je vous le dis crûment : je baise mes bâtiments. Et je le revendique.

Je prends le béton à pleines mains. Je l’enfonce dans ses coffrages jusqu’à ce qu’il hurle. Je glisse mes doigts dans les interstices, je cherche la faille, le point sensible où la matière cède, se cambre, se livre.

Vous, vous parlez de "volumes maîtrisés". Moi, je veux des espaces dilatés par le plaisir.

Je ne veux pas d’une porte bien dessinée : je veux une invitation à déchirer la frontière entre dehors et dedans. Je veux que chaque poignée soit une prise ferme, une promesse de pénétration. Je veux que les murs s’écartent sous la pression du geste, qu’ils accueillent, qu’ils s’ouvrent, qu’ils crient.

Construire, ce n’est pas "concevoir un projet". Construire, c’est baiser la matière. C’est l’aimer à en perdre haleine, à en perdre son statut de "professionnel respecté". C’est l’étreindre jusqu’à sentir son propre corps disparaître dans la chaleur d’un espace vivant.

Je suis exhibitionniste. Je suis nudiste moral. Je n’ai pas peur de montrer mon corps à mes enfants, à ma femme, à mes confrères. Parce que je veux qu’ils sachent qu’un architecte qui ne baise pas ses murs est un architecte mort.

Je veux qu’ils voient mon sexe dressé devant une colonne qui m’appelle. Je veux qu’ils m’imaginent enfonçant mes bras dans le ventre d’un mur, cherchant ce point d’orgasme où la matière n’est plus résistance mais abandon.

Vous, les frigides du trait rectiligne, vous ne saurez jamais ce que c’est que de sentir un mur jouir.

Je vous plains.

Vous vous épuisez dans des préliminaires sans fin, caressant vos tablettes, lissant vos maquettes, croyant baiser le réel avec vos logiciels de modélisation. Tristes onanistes du 3D.

Moi, je pénètre la chair du bâti. Je plonge. Je déchire. Je dilate. Je jouis.

Et je veux que tout le monde le voie. Que tout le monde le sente. Que mes enfants, ma femme, mes confrères assistent à cette étreinte sans fausse pudeur. Qu’ils comprennent que ce métier n’est pas une fonction. C’est un acte charnel, une baise debout contre un mur encore tiède de béton frais.

Construire, c’est se foutre à poil. C’est s’exhiber dans sa vulnérabilité brute. C’est dire au monde : voilà mon désir, il est bâti, il est palpable, il vous regarde.

Et quand vient le moment de livrer un bâtiment, quand le projet s’achève, ce n’est pas une remise de dossier. Ce n’est pas une "réception de chantier".

C’est une éjaculation.

Un orgasme violent, irréversible, qui vous laisse haletant, vidé, étourdi.

C’est la fin d’un rapport. Le dernier râle d’un amant exténué.

Et c’est aussi une mort. Une mort lente, douce, dans les bras d’une matière qu’on a aimée jusqu’à l’épuisement.

Mais vous, les architectes sans sueur, sans peau, sans sexe, vous ne connaîtrez jamais cette jouissance-là. Vous rendrez vos projets comme on rend un dossier d’assurance. Froids. Propres. Tristes.

Moi, je meurs avec mes bâtiments. Je les étreins jusqu’à la dernière pierre. Jusqu’à la dernière goutte de moi-même.

Et c’est pour ça que je suis vivant.

Ilyes Bellagha

Architecte, nudiste moral, exhibitionniste du geste

Tél : +216 95 691 165

E-mail : bellagha_ilyes@yahoo.fr

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