« Ah, mes enfants, je vous attends dimanche pour votre confession », dit l’abbé.
Sauf que chez nous, en Tunisie, en bons musulmans, les personnes comme les institutions restent responsables de leurs actes — et surtout, redevables devant la société.
Car ici, le péché n’est pas spirituel : il est administratif.
On n’y confesse pas ses fautes, on les classe.
On n’y demande pas pardon, on signe un procès-verbal.
Nous avons inventé la procédure magique, celle qui, comme la vieille pub Omo, « lave plus blanc que blanc ».
Un dossier maltraité ? C’est la faute de la procédure.
Un projet étouffé ? Toujours la procédure.
Elle nettoie tout : les consciences, les erreurs, les responsabilités.
C’est notre lessive nationale, celle qui efface les taches d’injustice sur les chemises bien repassées du pouvoir.
Je demande pardon, non pour avoir critiqué, mais pour avoir cru trop longtemps à la sincérité de ceux qui se disaient bâtisseurs de l’avenir.
Pardon d’avoir cru que la grande maison des architectes pouvait être un lieu de vision, et non une fabrique de démissions.
Je demande pardon à la jeunesse des architectes, à ceux qu’on a fait douter d’eux-mêmes, qu’on a tenus à distance du rêve de bâtir.
Mais je ne demande pas pardon à ceux qui confondent l’éthique avec le tampon, la vocation avec la cooptation.
Un jour, peut-être, nous laverons vraiment notre métier — non plus avec des règlements, mais avec la vérité.
Car le vrai savon, celui qui nettoie les mains et les âmes, s’appelle courage.
Ilyes Bellagha
Architecte D.E., chercheur indépendant
Fondateur du collectif Architectes Citoyens
📧 bellagha_ilyes@yahoo.fr
📍 Tunis, Tunisie
Joindre l’agréable à l’utile : l’architecture du sens commence par le plaisir d’exister.