Maître Peuple, sur sa branche installé, tenait dans ses mains un espoir bien gardé. Maître Pouvoir, par l’odeur alléché, lui tint à peu près ce langage :
« Bonjour, noble citoyen, que tu es digne, que tu es souverain ! Si ta patience dure autant que ton courage, tu seras le roi de ton propre village. »
Flatté, le Peuple ouvre grand sa confiance et laisse tomber son bien à la première instance. Le Pouvoir s’en empare et dit :
« Apprends que toute promesse se nourrit du consentement. Cette leçon vaut bien ton silence, assurément. »
Humilié, le Peuple ronge sa rancune et se promet qu’au prochain scrutin, il choisira un autre Renard : plus habile en paroles, moins maladroit dans ses flatteries. Mais, sans examiner les programmes, il se laisse séduire par un Renard d’orientation Sud, convaincu que la nouveauté suffira à réparer ses déceptions passées.
Entre deux mandats, le Peuple se retire sur Facebook, Twitter et autres plateformes, persuadé que commenter équivaut à agir. Et, par hasard, il découvre le Renard du Nord et le Renard du Sud se partager une poule, insouciants des promesses et des espoirs semés.
Cette fable moderne révèle une vérité profonde : le décalage entre paroles et actes traverse toutes les sphères. Les discours séduisent, mais la réalité des actes contredit souvent les belles intentions. Le peuple, lui aussi, agit parfois en contradiction avec ses propres principes ou attentes.
Observer ces écarts, comprendre leurs mécanismes, c’est lire la politique autrement : non pas seulement à travers les mots, mais à travers ce que ces mots produisent dans la vie réelle.
Au final, cette fable n’est pas qu’une critique du pouvoir ou une observation du peuple : elle est le miroir de nos contradictions et de nos illusions. Comprendre ce décalage, c’est apprendre à ne pas se laisser bercer par les mots seuls et, peut-être, un jour, à réconcilier paroles et actes.