L'ancien maire d'Hénin-Beaumont vient d'être condamné à de la prison ferme. Je suis né dans cette ville où j'ai passé les treize premières années de ma vie. À l'époque, les gens n'étaient pas très riches (on ne connaissait même pas l'expression – terriblement de droite quand on y pense – "pouvoir d'achat"), mais il n'y avait pas de chômage. Et il y avait du liant. Beaucoup de liant. Mon père, instituteur, était de ceux qui contribuaient à faire que les gens vivent mieux ensemble.
En juin 2012, j'ai publié le court texte qui suit sur mon blog overblog.

Je lis dans Libé que Mélenchon, Guy Bedos et Yvan le Bolloc'h sesont retrouvés à la salle des fêtes d'Hénin-Beaumont pour une réunion politique, devant quelques centaines de personnes.
C’est bizarre, la mémoire. Il m’est revenu un souvenir vieux de 55 ans. Nous sommes en 1957, l’année de la première victoire de Jacques Anquetil dans le Tour de France. Je suis sur la scène de cette salle des fêtes avec une cinquantaine d’enfants des écoles d’Hénin, et une cinquantaine d’écoliers allemands, de la région de Dortmund, si je me souviens bien. Jusqu’alors, je ne connaissais que « les Boches ». Pour la première fois de ma vie, je côtoie des « Allemands ». Et nous chantons. Eux d’abord : le début de « L’Hymne à la joie » en allemand. Nous ensuite : la même chose, mais en français. Le maître de chorale est un ch’ti qui doit peser environ 150 kilogrammes. Il me fait penser à Kurt von Straffenberg, le héros malfaisant d’un feuilleton quotidien de Radio Luxembourg avec Zappy Max (91 ans ; il a commencé dans le métier en bouffant de la vache enragée avec mon cousin le trompettiste Bernard Hulin link). J’apprendrai plus tard que le quintal et demi est mort d’une crise d’apoplexie.
Sur scène, j’ai un trac fou. J’oublie la moitié des paroles. Heureusement que Beethoven était complètement sourd quand il écrivit ce chef-d'œuvre. Il ne peut donc se retourner dans sa tombe. Comme tous mes camarades, je porte une chemise blanche et un nœud papillon. Je suis très fier car cette manifestation a été organisée par mon père, instituteur, cheville ouvrière de l’Amicale laïque d’Hénin.