La chasse est terminée".
C'est en ces termes que le chef de la police de Boston a twitté urbi et orbi à la fin de la traque de ces Tchéchènes qui avaient cru au "rêve américain", ou qui avaient peut-être pensé, comme Jean-Marie Colombani lors des attentats du 11 septembre 2011, que "nous étions tous des Américains".
Erreur grossière. 9000 hommes pour chasser (hunt) ces deux criminels. Enfoncée, l'armée française au Mali !
Un petit mot en passant sur les caméras de vidéo qui pullulent désormais dans le monde entier : elles ne jouent aucun rôle dans la sécurité; elles n'ont pas empêché les massacres de Londres ou de Madrid. Ni celui de Boston. Elles servent éventuellement à faciliter la découverte des criminels, à accélérer le rythme de leur traque. Un peu comme les radars sur nos routes, qui ne servent pas, fondamentalement, à réduire le nombre d'accidents. Il s'agit de fliquer la terre entière, demain avec des drones partout, dans tous nos cieux.
Ce côté cowboy est insupportable." Fin de partie" (the game is over), s'exclama Bush dans son bel uniforme quand il crut avoir gagné la guerre en Irak.
Dans les années soixante, la télévision française reprit 94 épisodes d'une série télévisée de CBS qui lança Steve Mc Queen : "Au nom de la loi". Par pudeur, la télé française avait forgé ce titre qui se voulait légaliste, "civilisé". La version originale s'intitulait "Wanted : Dead or Alive". Une violence programmatique sèche. Mais le héros Josh Randall avait quelque chose de laïque et de désincarné. Il exerçait sa tâche avec détachement, de manière glaciale, fonctionnelle. Sans bavure, sans pathos.
Nous n'en sommes plus là. L'énormité des moyens mis en oeuvre signifie que les pouvoirs publics étatsuniens, non seulement terrorisent les terroristes, mais terrorisent également la population dans son ensemble. Lorsqu'en anglais on veut traduire l'idée de "faire étalage", on utilise couramment le verbe "to display", avec l'idée qu'il y a quand même un arrière-goût de jeu dans tout cela.
A la grotesque ostentation mise en oeuvre par les forces armées a répondu le jeu de nombreux manifestants soulagés, et déchaînés en même temps. Or nous ne nous trouvions pas dans le trou du cul d'un univers texan mais dans l'une des villes les plus intellectuelles du pays. L'université Harvard est à deux pas, comme le MIT. Imagine-ton les Toulousains descendre dans la rue en hurlant "Dieu bénisse la France" après la mort de Mohammed Merah ?