Les Politiques malades de la Peste.
(Fable inspirée des Animaux malades de la Peste de Jean de Lafontaine)
Un mal terrible, causant le déshonneur,....
- La corruption - puisqu'il faut l'appeler par son nom,
Capable d'enrichir en un jour un baron,
Ce mal sournois des profiteurs
S'abattait lourdement sur certains Politiques.
Tous ne sont pas pourris, mais tous sont la critique
Du Peuple dégouté par les malversations.
Il fallut à ce mal, redoutable comme la Peste,
chercher vite un remède, de peur qu'on les déteste.
Les plus frappés tinrent conseil, et dirent : "Mes chers amis,
Sans doute que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du populaire courroux,
Peut-être obtiendra-t-il la guérison commune.
L'histoire nous apprend qu'en de tels accidents
On fait de pareils dévouements:
Ne nous flattons donc point; voyons sans indulgence
L'état de notre conscience."
Poussés jusque dans leurs derniers bastions
Ne pouvant plus mentir sans cesse à l'opinion,
Les Sires Balkany, Cahuzac et Guéant
Ont avoué leurs forfaits, non sans mal cependant.
Je me dévouerai donc, cria Bernard Tapie;
Car je pense être Roi dans le monde des impies,
Mais j'estime qu'il est bon que chacun se confesse
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus corrompu se fasse botter les fesses.
Allons donc, pourquoi tous ces aveux,
S'exclama l'un d'entre-eux.
Vos scrupules font voir trop de délicatesse;
En effet, s'enrichir toujours et amasser sans cesse
Est-ce un péché ? Mais Non, car vous fîtes ainsi
Preuve d'intelligence dans ce monde d'envieux,
Vous plaçant au sommet de la ploutocratie.
Tous les gens querelleurs, avocats, procureurs,
jusqu'aux derniers voleurs,
Au dire de chacun,
étaient des petits saints.
Un pauvre SDF vint à son tour et dit : J'ai souvenance
Qu'un jour en un endroit passant,
La soif, l'occasion, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tendis les deux bras au travers d'un carreau
et saisis de ma main qui saignait un pichet d'eau.
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le Fadet.
Un Procureur sévère le jugea condamnable
Et voulu dévouer à notre mère Justice ce repentit bancal,
Ce pelé, ce galeux, récidiviste enfin d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Voler un litre d'eau
Quel crime abominable!
Et rien que la prison n'est capable
D'expier le forfait du pauvre pénitent.
Certes, le butin est maigre et non exorbitant,
mais le vol est banni.
Quatre mois fermes sont requis
Pour ce pauvre falot (*)
Quant à Monsieur Guéant, ce grand commis d'État,
Était-il mal payé pour prendre un excrétât ?
Comme le voleur d'eau c'est bien tout en liquide
Qu'il s'est attribué des primes très fluides,
En détournant sciemment les fonds du FES (Frais d'Enquête et de Surveillance).
Les sommes détournées, traduites en bouteilles d'eau,
Font près de quatre cent vingt mille petits goulots.
C'est donc d'abord à lui qu'il faut botter les fesses.
Voler l'argent d'autrui, surtout l'argent public,
Certes, c'est machiavélique,
C'est même détestable!
Et rien que la prison n'est capable
D'expier son forfait : oui mais, dit le juge indulgent,
Concédons un sursis au primo délinquant.(**)
Selon que vous serez Guéant ou misérable,
Les jugements de cours vous seront bienveillants ou bien défavorables.
Et maintenant, voici l'original de la Fable "Les animaux malades de la Peste"
Monsieur de Lafontaine avait vu juste...si j'ose dire.
Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom)
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre.
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés :
On n'en voyait point d'occupés
A chercher le soutien d'une mourante vie ;
Nul mets n'excitait leur envie ;
Ni Loups ni Renards n'épiaient
La douce et l'innocente proie.
Les Tourterelles se fuyaient :
Plus d'amour, partant plus de joie.
Le Lion tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux,
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
L'histoire nous apprend qu'en de tels accidents
On fait de pareils dévouements :
Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence
L'état de notre conscience.
Pour moi, satisfaisant mes appétits gloutons
J'ai dévoré force moutons.
Que m'avaient-ils fait ? Nulle offense :
Même il m'est arrivé quelquefois de manger
Le Berger.
Je me dévouerai donc, s'il le faut ; mais je pense
Qu'il est bon que chacun s'accuse ainsi que moi :
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus coupable périsse.
- Sire, dit le Renard, vous êtes trop bon Roi ;
Vos scrupules font voir trop de délicatesse ;
Et bien, manger moutons, canaille, sotte espèce,
Est-ce un péché ? Non, non. Vous leur fîtes Seigneur
En les croquant beaucoup d'honneur.
Et quant au Berger l'on peut dire
Qu'il était digne de tous maux,
Etant de ces gens-là qui sur les animaux
Se font un chimérique empire.
Ainsi dit le Renard, et flatteurs d'applaudir.
On n'osa trop approfondir
Du Tigre, ni de l'Ours, ni des autres puissances,
Les moins pardonnables offenses.
Tous les gens querelleurs, jusqu'aux simples mâtins,
Au dire de chacun, étaient de petits saints.
L'Ane vint à son tour et dit : J'ai souvenance
Qu'en un pré de Moines passant,
La faim, l'occasion, l'herbe tendre, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
Je n'en avais nul droit, puisqu'il faut parler net.
A ces mots on cria haro sur le baudet.
Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
(*) Condamné pour le vol d'une bouteille d'eau Ouest France - Rennes - 14 Août 2015
Dans la nuit du 22 au 23 septembre 2014, un vol est commis dans la cabane d'un chantier privé, à Rennes. Une bouteille d'eau, du chocolat et du café sont dérobés.
Un homme de 27 ans comparaissait, hier, au tribunal correctionnel, pour vol de denrées alimentaires. Il est actuellement détenu, pour n'avoir pas effectué les cent quarante heures de travaux d'intérêt général (TIG) auxquels il avait été condamné, en 2013.
Il raconte cette soirée de septembre : « Je promène mon chien. Je vois que la vitre d'une cabane de chantier est cassée. J'ai soif, je tends le bras et je prends une bouteille d'eau sur la table. C'est tout, je ne suis même pas rentré. Je me suis coupé sur la vitre. » Son sang a mené jusqu'à lui.
« Certes, le butin est bien maigre, concède le procureur, mais le préjudice des dégradations a été conséquent. » Quatre mois de prison ferme sont requis, l'homme a déjà été condamné cinq fois.
Les bras lui en tombent : « J'ai déjà quatre mois pour un TIG, et là, on veut me remettre quatre mois en prison pour une bouteille d'eau ? À l'époque, j'étais SDF. »
Le tribunal condamne le prévenu à un mois de prison avec sursis.
(**) Extrait du jugement concernant Claude Guéant.
Cour d'Appel de Paris - Tribunal de Grande Instance de Paris
Jugement du : 13 novembre 2015 - 32e chambre correctionnelle
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que, en demandant à Michel GAUDIN de lui remettre, pendant vingt et un mois, la somme totale de 210 000 euros, prélevée sur les FES, Claude GUÉANT pour des motivations personnelles, s'est enrichi au détriment de l'intérêt général et des missions qui doivent être assurées par les fonctionnaires de police des services actifs du ministère de l'intérieur.
.......
En ordonnant à Michel GAUDIN de lui remettre, pendant 21 mois, une somme qu'il évalue à 10 000 euros par mois prélevée sur les FES, il s'est ainsi rendu complice du délit de détournement de fonds publics commis par ce dernier, par provocation résultant d'un «ordre, d'un abus d'autorité ou de pouvoir».
.....Claude GUÉANT sera par conséquent déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés.
Haut fonctionnaire de l'État, directeur de cabinet du ministre de l'intérieur, il a, dans une volonté assumée d'enrichissement de lui-même et de ses plus proches collaborateurs, volontairement transgressé les lois de la République et détourné des fonds publics, évalués à 210 000 euros. Ces faits commis au sommet de la hiérarchie du cabinet ministériel, par un éminent représentant du pouvoir exécutif dont les fonctions exigent une probité irréprochable, portent une atteinte d'une extrême gravité à l'ordre public dont le ministère de l'intérieur a précisément pour mission de faire assurer le respect. Ils constituent en outre une atteinte aux valeurs de la démocratie républicaine et à la transparence de la vie publique, participant de la défiance que les citoyens peuvent nourrir à l'égard de la politique, des institutions et de ceux qui les gouvernent.