La France contre le Mouvement de Libération de l’Azanad –MNLA engagée pour longtemps dans une opération aussi hasardeuse que coûteuse au Mali
Le 11 janvier le gouvernement français décide une intervention militaire au Mali à la demande du président par interim malien Dioncounda Traoré et l’aval de l’ONU. Les déclarations du ministre des affaires étrangères Laurent Fabius comme celle du président de la république François Hollande s’entourent de grandes précautions pour en montrer la légalité et insister sur le fait que cette intervention est faite à la demande du président malien. On notera tout de même que dans le même temps, la France a refusé l’aide sollitcitée par le président Bozizé de la république de Centrafrique. Deux poids deux mesures, mais surtout pourquoi la France intervient pour, selon François Hollande, rétablir l’unité du Mali, et pourquoi maintenant ?
Il est légitime de se demander si le président et le ministre français des affaires étrangères avaient une connaissance exacte de la situation de la région avant de se lancer dans cette aventure. On peut penser que la situation avait été évoquée en détail en décembre dernier avec le président Abdelaziz Bouteflika lors de la visite à Alger de François Hollande . Qu’en est-il sorti alors que l’Algérie est la première intéressée ?
Une action militaire forte de 3000 hommes avait bien été prévue dès le mois d’octobre contre les troupes islamistes au Nord du pays, Seuls les pays de la Cédéao (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) devaient intervenir, sans toutefois exclure un soutien logistique de la part d’autres pays. La France s’était proposée au titre de « facilitateur » ce qui excluait clairement son intervention militaire. Or dès le 12 janvier la France a été seule à l’offensive
Depuis le coup d’état du 22 mars 2012 du Capitaine Haya Amadou Sanogo contre le président Amadou Toumani Touré la situation au Mali n’a fait que se détériorer. Dans un premier temps les troupes de Sanogo se sont comportées en véritable mafia en rançonnant la population, démembrant les unités d’élite et emprisonnant des officiers laissant la place aux narcotrafiquants. On peut dire que Sanogo est le responsable du chaos depuis une année et qu’il faut prendre avec circonspection l’appui qu’il donne à l’opération actuelle sans oublier ses déclarations d’envoyé divin pour conduire le Mali. Ce coup d’état était censé stopper l’influence du Mouvement de Libération de l’Azanad –MNLA.
Il est étrange que les déclarations depuis 3 jours ne citent jamais ou si peu le MNLA.Or ce mouvement issu lui-même d’autres mouvements a été créé en novembre 2010 pour obtenir l’autodétermination et l’indépendance du Nord Mali. Menant d’abord des opérations militaires il a décidé d’un cessez le feu en avril 2012. Bien structuré il a envoyé une représentation au parlement européen pour présenter ses revendications. Selon les maigres informations dont je dispose, bien qu’invitée par le groupe Europe Ecologie /Verts/ALE la délégation a été mal reçue et mise dans l’incapacité de présenter sa plateforme. La France a fait savoir que sa présence n’était pas souhaitable sur le territoire français.
Il faut souligner la déclaration du MLNA du 2 avril 2012
« Nous rassurons les États voisins, les populations de la sous-région et la Communauté internationale que la libération de l’Azawad contribuera à renforcer la sécurité, le développement et la paix pour une meilleure intégration des peuples, des cultures et une meilleure stabilité dans la zone saharo-sahélienne ». Il affirme qu'il « rejette le terrorisme et l'extrémisme sous toutes ses formes, qu'il provienne d'un groupe ou d'un État » En fait le MNLA a été en but aux mouvements islamistes notamment Ansar Eddine et Mujo qui occupent de fait une partie du Nord Mali où il font appliquer la Charia et qui sont responsables des démolitions à Tombouctou.
Le conseil transitoire de l’état d’Azanad CTEA du MLNA a déclaré à plusieurs reprises vouloir privilégier le dialogue et la négociation avec les autorités maliennes avant toute intervention étrangère envisagée par le gouvernement malien. Un congrès du Mlna de plus de 3000 délégués à Tinzawaten (Tinzaouatène) à la frontière algérienne s’est réuni les 8, 9,10 janvier 2013. La déclaration finale renouvelle ses intentions pacifiques et le désir du règlement du conflit qui l’oppose au gouvernement dans son désir d’indépendance de la nation de l’Azawad.
Il est tout de même étonnant, va-t-on nous dire que c’est pure coïncidence, que soudain la France décide son intervention militaire pour rétablir l’unité du pays le 12 soit 2 jours après. La stratégie du Mali et de ses alliés semble n’avoir eu d’autres buts que discréditer depuis deux ans, ce mouvement qui se réclame d’une libération nationale et l’envoyer dans les bras des islamistes. Dans sa conférence de presse Laurent Fabius répétait à l’envi qu’il s’agissait d’éliminer les assassins, et trafiquants et que l’opération durerait le temps nécessaire. Les dernières déclarations françaises confirment que les forces militaire de la CEAO ne sont pas en état de combattre efficacement et que la France devra les former pendant des mois. Nous sommes donc entrés dans une opération de « pacification » très longue, qui va coûter cher en hommes , femmes et enfants ainsi qu’en argent pour défendre la mission civilisatrice éternelle de la France alors qu’une ade matérielle à ces populations serait notre première obligation.
Pour ma part, n’étant pas un spécialiste du Mali, mais ayant consacré une bonne partie de ma vie au soutien aux mouvements de libération nationale, je suis très réticent à accepter les déclarations françaises et maliennes et je voudrais bien savoir pourquoi on ne parle que des islamistes mais pas du MNLA qui demain sera sans doute ses alliés par la grâce de notre politique. Le Mali et son allié la France n’auraient ils pas été mieux inspirés en prenant la main tendue du MNLA avant que la tendance proche des lslamistes en son sein gagne sur les hésitations de la majorité. Le MNLA affaibli par sa lutte contre le Mujo et Ansar Eddine était sans doute prêt à un compromis pour reprendre son influence et ses positions perdues au Nord. Il en allait de l’intérêt et de la paix dans toute la région . Je crois aussi que l’islamisme et ses buts déclarés de s’étendre partout dans le monde peut représenter un véritable danger, mais ce n’est pas avec des bombes « chrétiennes » qu’on mettra un terme à son expansion, pas plus qu’on préservera la vie des otages.
Pour ce qui est de la question pourquoi la France alors que le Mali est entouré de pays comme l’Algérie de la Mauritanie, du Sénégal, de la Guinée du Burkina Fasso et de la Côte d’Ivoire , il faut se rappeler que notre pays n’a cessé d’intervenir dans ses anciennes colonies. C’est une habitude que malgré ses déclarations le gouvernement socialiste perpétue.
-Au Zaïre il faut se souvenir des parachutistes envoyés par Giscard d’Estaing à Kolwezi
en 1977 et 78 puis le soutien militaire apporté à Mobutu en 1991 et 2003
- au Tchad nos interventions militaires en 1968 – 72, 1983/84
- au Gabon en 1964 et 90
- en Centrafrique en 1979 - 1996- 97
- au Rwanda en 1990 – 93 -94
- aux Comores en 1989 95
- en Cote d’Ivoire 2002 2008 2004 et 2011
- auquels on ajoutera l’intervention française en Libye qui aura permis la fourniture en nombre considérable d’armes aux rebelles du Mali
Ça fait beaucoup ,Non ?
Bernard Riguet