Le 3 décembre, le Ministère de l'Intérieur a publié 3 décrets relatifs à la sûreté des institutions et des dispositifs de surveillance... dans le cadre, initialement de la lutte anti-terroriste. Sur ces décrets, les avis de la CNIL sont requis. Il circonstancient les ouvertures faites par exemple sur les données de santé (articles R236-13 et R236-23), mais ne parlent absolument pas du passage de la surveillance d'"activités" à celle d'"opinions". Cela laisse augurer que les contrôles de l'autorité légalement indépendante ne devraient pas porter plus que ça sur cette différence activités/opinions.
Le fait qu'après les mots « les informations qui concernent des personnes » sont insérés les mots : « physiques ou morales ainsi que des groupements », ça sort des prérogatives de la CNIL. Personnellement cela me fait aller vers deux options, soit :
- c'était déjà un état de fait, car la notion de personne en droit couvre aussi bien les personnes physiques que les personnes morales (cf. cours du Collège de France d'Alain Supiot que je recommande vivement), et que le fichier / le traitement collectait déjà des informations sur ces différents types de personnes
- c'est une ouverture du fichier vers les personnes morales et les groupements, alors c'est TRES inquiétant pour nos activités syndicales et autres... mais là je n'ai pas l'info.
Je penche pour ma part pour la première option, qui semble moins grave. Pourtant, même si elle est moins grave, l'officialisation de la pratique de fichage des organisations et de leur surveillance systématique traduit quand même de l'affirmation de ces méthodes et constitue donc au mieux un rappel aux organisations, au pire un avertissement : Syndicats, gardez-vous bien de remettre en cause la sûreté des institutions.
Quant aux ajouts "ou à la sûreté de l'Etat" et "porter atteinte à l'intégrité du territoire ou aux institutions de la République", là ça ouvre en grand les domaines d'application du texte, jusque là limité à la sécurité publique, et aux activités terroristes. Il s'agirait là d'une dérive autoritaire, où la surveillance ne vise pas à la sécurité publique mais celle des institutions... Tel que le propos de David DUFRENE dans son documentaire "Un Pays Qui Se Tient Sage" (constaté depuis 15 ans au -) : la police nationale s'est transformée en une police des institutions.
Cette analyse a pour objet de servir de pièce constitutive à l'action contre cette mise en orbite de l'exécutif sur les questions sécuritaires. Notre liberté est notre meilleure sécurité.