S'il est plus que bienvenu que les anciennes composantes de la NUPES aient réussi à s'entendre tout en s'élargissant, il reste à consolider cette situation et viser une combativité du quotidien, y compris au-delà du 7 juillet, quels qu'en soient les résultats.
Les partis enfin l'unité ?
Par deux fois, il y a eu unité des partis principaux dans la gauche large sur la période récente (allez, incluons le PS et le PCF, même si leur dérive droitière des dernières années a été largement documentée. Pourquoi ne pas leur donner une dernière chance, mais là n'est pas tellement la question à ce stade). La première unité est la NUPES : elle issue du constat de l'absence de la gauche au second tour des présidentielles 2022, soit un échec. L'unité est donc venue d'un constat d'échec ET d'une pression populaire, mais moindre qu'en ce printemps 2024. Laisser la gestion de l'unité dans les seules mains des partis a été une raison de leurs divisions, puisque peu de gens les mettaient en garde des conséquences d'une telle division. Bien sûr, la pression du capitalisme en crise profonde en est aussi un élément clé de division. Car il exerce une contrainte au changement rapide et conflictuelle sur des partis largement modelés par la situation relativement stable des dernières décennies qui ont précédée.
Aujourd'hui, il y a un réel besoin de rupture sociale, écologique et démocratique ce qui demande une évolution rapide et profonde de la forme d'organisation "parti" à gauche, notamment pour être ancrés dans le quotidien et la combativité, au delà des moments électoraux. Que ce soit ces partis là ou d'autres à venir par recomposition ou création. Mais aussi du contenu, qui doit nécessairement être anticapitaliste, qui plus est au moment où de larges pans du patronat se rallient à l'extrême-droite, de manière accélérée.
La seconde unité vient du péril fasciste qu'il faut faire tomber au plus vite, en le délégitimant comme fausse solution sociale et politique, disons même comme imposture et tromperie sociale. Sous le RN, personne sera à l'abri, pas même ses électeurs et électrices. Mais aussi et surtout, il va falloir parvenir à proposer et visibiliser un puissant horizon émancipateur et collectif sur les plans sociaux, écologique et démocratique. Il s'agit du Nouveau Front Populaire (NFP), bien que la dimension écologie radicale semble encore à la peine et qu'il va falloir la construire. Le NFP, est en réalité à peine en construction, même si bien plus avancé que ce que l'on pouvait encore espérer il y a une semaine.
Les syndicats et associations, la pierre angulaire à l'unité
Ce Nouveau Front Populaire est certes à ce stade largement vu sous l'aspect partisan, car "il faut faire gagner cet horizon aux législatives". Mais s'il s'est créé aussi rapidement, en sortant les partis traditionnels de longs mois de profondes divisions voire d'hostilité commune, il faut surtout mettre en lumière l'origine de ce front populaire. Soit une large pression à l'unité à gauche, accompagnée d'une radicalité marquée sur le plan des revendications et enfin un puissant moteur, qui a été immédiat au niveau syndical de la base jusqu'aux principales confédérations. Il en est de même dans le milieu associatif (bien que plus complexes à analyser tant les formes et contenus diffèrent).
Il en reste que ces organisations et leurs militant·es ont fait la démonstration d'une unité et d'une alerte précoce sur les dangers croissant du fascisme, mais aussi pour un "sursaut social et démocratique". On peut citer la lutte collective autour des retraites, qui a illustré une unité salutaire - bien qu'avec des limites, notamment sur l'aspect de rupture affirmée à l'échelle collective.
Ces organisations ont la particularité d'être des organisations du quotidien, largement faite par les "gens d'en bas", à la différence des partis traditionnels. Leurs militant·es rédigent dans l'actualité (et la réactualisation permanente) des revendications permettant de répondre aux problèmes collectifs immédiats des personnes, y compris celles non représentées par l'approche électorale.
Au-delà, la population ne peut se permettre de n'avoir pour horizon que deux dimanche dans l'urne comme cheville ouvrière du Nouveau Front Populaire, sans perspectives au-delà. Même si l'après est inconnu, il faut d'ores et déjà multiplier les initiatives en amont et an aval. L'impulsion de moments de rencontres, d'activités de terrain, doit être permanent. Syndicats et associations ont plusieurs atout majeurs : sur le terrain, les militant·es sont connu·es et connaissent le terrain, ce qui suscite une confiance, du moins un respect assez rapide dans l'approche, pour les personnes qui les rencontrent (qu'elles soient d'accord ou non avec ce qui est dit). Elles et ils donnent la garantie, d'avoir été là hier, d'être là aujourd'hui et demain. Surtout, syndicats et associations sont implanté·es autant dans l'urbain, le périurbain et la ruralité, certes avec parfois des difficultés mais le périmètre géographique est plus large et précis à la fois que ce que sont en capacité de faire les partis actuellement. Autrement dit, leur capacité à déployer le Nouveau Front Populaire est la plus importante.
En bref, syndicats et associations sont à priori le plus adéquat pour à la fois exercer une pression à l'unité (même à distance) sur les partis. Mais ce sont aussi les organisations capables d'être le ciment et le carburant du Nouveau Front Populaire dans la population. Bien sûr, les partis ont leur rôle à jouer et il peut être intéressant de les renforcer, mais ce n'est pas tant l'objet de ce texte. Si ce constat ou se ressenti est partagé, il peut être plus que bienvenu de les rejoindre pour apporter sa pierre à l'édifice, ses idées, son savoir, son temps. Car sinon, demain cela risque d'être plus difficile, si ce n'est plus possible.