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Billet de blog 3 décembre 2014

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Jeff Koons, est-ce que ça vaut la peine de s'y attarder?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Jeff Koons, est-ce que ça vaut la peine de s'y attarder?

La réponse est oui!

Au moins, si c'est pour se poser la question:

de quoi est-il le nom?

S'agit-il d'un art vidé de tout contenu, ou bien invitant à questionner les apparences, à percevoir autrement des "réalités" et permettant de découvrir de nouveaux horizons?

Est-ce du bling-bling, du fast art, lisse et consensuel, prêt à consommer?

Est-ce une révélation: la vérité sur les faux rêves de la société de consommation?

Si ces premières questions s'imposent d'emblée, elles ne fournissent pourtant pas la signification la plus importante de ces créations de culture mercantile:

La ploutodémocratie voudrait transformer les apparences du monde à sa convenance et masquer son rôle de dirigeant.

Pour perdurer elle voudrait préparer nos futures structures mentales selon ses besoins.

Notre sensibilité est modulée par la publicité omniprésente qui impose une marchandisation totalisante. Il s'agit d'une mobilisation méthodique des instincts humains socialement dirigés. La publicité est devenue une partie inconsciente de nous même. Par leurs relais politiques et intellectuels les puissances économiques - les "décideurs" - qui poussent à la marchandisation de toutes les activités humaines ont également la haute main sur les institutions et les contenus des médias de masse.

Dans le flot incessant d'images et de discours, l'idéologie qui domine les représentations est  rarement perçue en tant que telle.

Jeff Koons n'est-il pas symptomatique des mutations de la société actuelle - n'est-ce pas un artiste emblématique qui représente l'univers dont rêve la ploutocratie ?

N'est-il pas pour ce début du 21ème siècle, ce qu'un artiste comme Bouguereau était pour la société bourgeoise à la fin du 19ème siècle?

William Bouguerau, prix de Rome, avait trouvé une clientèle de riches amateurs, industriels français et collectionneurs américains, qui le rendirent célèbre. Il produisait un art académique et pompier correspondant à leurs souhaits.

Jeff Koons, ancien trader, légion d'honneur, et beau parleur qui se réfère aux iconoclastes Duchamps et Picasso, produit un art insignifiant à souhait, destiné à une société de masse ou dominent les apparences et les structures mentales mises au service d'un mercantilisme sans rivages.

Après Versailles, Jeff Koons est exposé à Beaubourg. L'exposition sera probablement un succès économique et "populaire". Une parfaite symbiose de deux critères désormais indispensables au regard de la rentabilité optimale recherchée.

Si le public ciblé par cette exposition sait ce qu'il veut, il sait probablement beaucoup moins pourquoi il le veut.

Dans le monde conflictuel d'aujourd'hui, il y a toujours plus de murs matérialisés (Israél/Palestine, la Méditerranée, USA/Mexique...) mais également des murs mentaux, eux aussi bien "réels":

murs ethniques et religieux, d'intolérance et de fondamentalisme, murs d'argent et de cupidité, murs de peur.

Dans le monde de l'art certaines créations peuvent donner l'impression de percer un mur. La "réalité" qui entoure les amateurs n'a pourtant pas changé et aucune question précise n'a été résolue, mais chacun et chacune peuvent potentiellement, après avoir été confrontés à certaines créations, avoir le sentiment de n'être plus tout à fait les mêmes. C'est qu'il y a des créations qui renouvellent et élargissent la perception de la "réalité"!

Jeff Koons, au contraire, conforte une perception conforme aux murs mentaux indispensables pour faire perdurer le (dés)ordre des choses derrière les apparences trompeuses du "meilleur des mondes possibles".

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