
Je viens de naître sous les bombardements de Gaza, un endroit où le cri strident des sirènes d'alerte a remplacé la douce annonce de l’arrivée d'un nouveau-né. Le médecin a murmuré que je suis une fille, mais ses paroles se sont perdues dans le tumulte des bombardements, tandis que ma mère gisait là, sans vie après avoir subi une césarienne d’urgence sans anesthésie….
Prématurée, je partage une couveuse avec trois autres nourrissons, plongée dans l'obscurité persistante due à l'absence d'électricité, La routine des GAZAOUIS qui dorénavant définira chaque instant de ma vie.

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J’ai un peu grandi, je suis maintenant une enfant de Gaza, une petite fille dont le père grave le prénom sur le bras, à l’encre indélébile, un acte de désespoir de mon père qui a pour but de reconnaître mon corps au cas où il serait déchiqueté, une tentative pour m'assurer une identité même au-delà de la mort.
Les décombres, mélange de poussière et de désolation, sont mon Lit.. Les pleurs étouffés des mères qui ont perdues leurs enfants résonnant en moi, après tout nous partageons la même souffrance

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Je suis une jeune fille de Gaza, mes rêves en lambeaux tout comme les bâtiments qui m'entourent. L'éducation est pour moi une lumière lointaine, un mirage dont je rêve et que jamais je n’aurai dans ma vie. Les écoles, vestiges de savoir et d'espoir, ont été pulvérisées par les attaques aériennes, me privant d'un avenir que j'aurais pu chérir. Le manque de soins médicaux devient une marque indélébile, une blessure invisible pour vous mais qui s'aggrave avec le temps et nous afflige avec le temps.
A mon tour, je suis une femme enceinte et je n’ai aucun suivi gynécologique, J’ai espoir d’acceuillir cet enfant mais tellement peur de le perdre dans ce climat noir.
Le manque d'électricité paralyse les services médicaux, laissant les femmes vulnérables, en proie à des souffrances insoutenables. Les hôpitaux, réduits à des ruines fumantes, ne peuvent offrir que des soins rudimentaires, laissant les femmes et les enfants à la merci d’hémorragies, de maladies et de traumatismes non traités. Les services gynécologiques, tout comme les autres services essentiels, sont des victimes collatérales de la guerre.

Je suis maintenant mère de famille et comme toutes les femmes à Gaza, parmi les décombres, je lutte pour survivre. Quand mes enfants tombent malade, pas de pédiatrie, alors je prie.
La souffrance physique et émotionnelle est une réalité quotidienne, avec peu d'espoir de soulagement. Les cicatrices, physiques et psychologiques, témoignent d'une vie de négligence et d'abandon.
La trentaine, mon tour est venu, comme la plupart des femmes à Gaza j’enterre mes 4 enfants dans des tombes de l’oublie. Leurs tenues blanches achetés à l’aïd, jadis symboles de joie et d'espoir, leurs servent maintenant de linceul funèbres.
La quarantaine, me voici veuve, ma douleur silencieuse, résonne dans le paysage dévasté, une symphonie déchirante de pertes irréparables.
Je suis devenue une personne âgée à Gaza, vieillissant parmi les décombres, mes cheveux grisonnants racontant l'histoire d'une existence marquée par la douleur. Les cicatrices de la guerre, à la fois physiques et psychologiques, sont devenues mes seuls compagnons indissociables de ma vie quotidienne.
Les femmes à Gaza enterrent non seulement leurs enfants, mais aussi leurs rêves inaccomplis. Les robes blanches qui ont été portées pour les célébrations se transforment en tenues de deuil, symbolisant la vie d'une femme qui a survécu à l'indicible. La mort devient une libération attendue, une délivrance des chaînes d'une existence marquée par la privation et la douleur incessante.

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Ma vie, comme celle de nombreuses femmes à Gaza, est une odyssée de douleur et de privation. Les soins de santé, autrefois accessibles, sont maintenant un luxe inatteignable. Les plaies physiques et émotionnelles s'ouvrent sans cesse, et dans l'ombre des décombres, nous continuons à lutter, à espérer que le monde entendra nos cris étouffés, qu'un jour la paix apportera enfin la guérison et la dignité que nous méritons.

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