Vladimir le Petit, maréchal de pacotille
Vladimir Poutine : un nom qui, ironie du sort, évoque plus un discret « du chemin » qu’un conquérant d’empire. Jadis petit bureaucrate du KGB, il s’est glissé dans un treillis où il flotte comme dans un costume d’emprunt. Sa démarche raide et mal accordée trahit l’homme qui enfile l’uniforme pour la première fois, comme un gamin jouant à la guerre avec ses petits soldats dans un bac à sable. À ceci près que ses « jeux » coûtent des vies bien réelles.
Dans son théâtre du Kremlin, il se fantasme héritier de Catherine la Grande, d’Ivan le Terrible et de Pierre le Grand. Mais l’Histoire retiendra sans doute « Vladimir le Petit » : celui qui a raboté les libertés au profit de la mesquinerie de ses vues. Ses discours martiaux ne sont qu’une succession de fictions, prolongement des mensonges qu’il se raconte à lui-même.
Pendant qu’il se rêve en nouveau Alexandre Nevski, ce sont surtout des conscrits venus des régions pauvres du Caucase, de Bouriatie ou de Yakoutie – populations que le pouvoir central traite souvent avec un mépris racialisé – qui paient le prix de ses ambitions. L’immensité de la Russie, onze fuseaux horaires, semble se moquer de ce lilliputien bardé de médailles en toc qui croit faire danser un empire du bout de ses doigts, comme le globe rebondissant du Dictateur de Chaplin.
On pourrait d’ailleurs imaginer une scène digne de ce film : Poutine face à Donald Trump, l’autre dictateur de notre époque, attablés à un buffet ou chez un coiffeur, rivalisant d’absurdité dans un concours du plus performant des imbéciles – mais, hélas, sur notre dos. De quoi rappeler que, contrairement à ce qu’espérait Hegel, pour qui «l’histoire est le déploiement d’une rationalité interne qui, par les contradictions et les crises, réalise progressivement la liberté humaine", elle se révèle bien plus souvent le théâtre de l’extravagance, comme le pressentait Milan Kundera qui la pensait comme théâtre d’ironie où le hasard joue un rôle plus grand que la raison.
Poutine gesticule, menace, promet la victoire, mais chaque posture le rétrécit un peu plus. Son empire de pacotille finira par s’écrouler sous le poids de ses propres illusions, révélant ce qu’il n’a jamais cessé d’être : un petit homme qui se rêvait géant, déjà relégué au rang de caricature.