Il est assez navrant de voir étalé dans la presse française des analyses à deux balles par des éditorialistes de renom et autres journaleux larbins, vendus au bon soin du capital, sur les véritables raisons de la révolte en cours en Turquie contre un pouvoir religieux autocratique, les violences policières, la restriction des libertés et une soif de destruction du vivant, d'urbanisation par le bétonnage tous azimuts.
Le vendredi sanglant d'Istanbul marquera à jamais une nouvelle articulation des luttes sociales émancipatrices face à un pouvoir aliéné et à une représentativité démocratique agonisante qui ne représente plus personne à l'exception des grands trusts industriels et financiers.
Le service minimum nous est imposé par des médias discrédités, information partielle et partiale qui permet au régime turc de poursuivre la restriction des libertés individuelles et collectives (atteinte à tous les symboles de la laïcité et à l'émancipation des femmes) afin de minimiser l'insurrection populaire en cours.
Insurrection qui vient d'un refus de la société civile, des riverains/riveraines du parc, d'activistes environnementaux et autres anarchistes, de laisser toujours plus d'espace au béton, à un projet de centre commercial en plein quartier de Taksim, dans le centre d'Istanbul. Le petit parc Gezi, est comme par hasard, un lieu symbolique de rassemblement et de contestation sociale à Istanbul mais aussi un des derniers espaces où le vivant s'exprime encore, menacé d'un bétonnage imminant.
Tous les temples du capitalisme ont dû fermer à Taksim et aux alentours. Les solidarités s'organisent partout, dans les rues, les petits commerces, les universités. Les pharmacies ont ouvertes leurs portes aux manifestant.e.s blessé.e.s suite à la barbarie d’État, et à son cortège de violences policières. Le terrorisme d’État aurait déjà assassiné 7 personnes, selon certaines sources, depuis le début des heurts. Le gouvernement essaye de tout faire pour faire minimiser la violence qu'il exerce sur les populations.
Le collège d'architectes et ingénieurs turc s'est transformé en hôpital de médecins et infirmiers/infirmières bénévoles affluent pour recevoir les innombrables manifestant.e.s blessé.e.s. Des centaines de personnes arrêtées par le pouvoir, certaines parlent ouvertement d'avoir été torturées.
Dans plusieurs lieux d'Istanbul des commissariats ont été attaqués. Des groupes fascistes ont été visés par les anarchistes. De l'autre côté du Pont du Bosphore, le peuple a tenté de se joindre à la révolte, mais les forces de police l'ont bloqué jusqu'à minuit avant que la jonction se fasse finalement dans la nuit du 2 juin. Des barricades se dressent un peu partout dans le centre ville, des chicanes et des barrages fleurissent dans les rues.
Pour tout dialogue social, le premier ministre traite les personnes qui diffusent les infos sur les réseaux sociaux de fascistes, ironie du sort. Les médias turcs, passent sous silence les 4 derniers jours de révolte. Pas un mot sur AKP Channel de l'occupation de la place de Kizilay.
La révolte est maintenant étendue à tout le pays. Il y a du monde dans les rues d'Ankara, d'Izmir, d'Eskisehir, de Sakarya, d'Isparta, etc.
Les protestations, manifs, révoltes, occupations, résistances, émeutes urbaines, comme par exemple celle des populations des quartiers populaires en France en 2005, où de la société civile contre une urbanisation sclérosée de l'axe Nantes/Saint Nazaire, via un aéroport HQE, ne se limitent pas uniquement à vouloir entraver des projet absurdes et destructeurs du vivant où à exprimer un raz-le-bol de la ségrégation raciale et sociale.
D'Istanbul à Porto Alegre, en passant par la ZAD d'Avignon, la cause est commune. Elle montre le décalage abyssale qui existe entre l'oligarchie et le peuple, entre les intérêts des puissants et les besoins de chacun d'entre nous. Elle montre surtout que l’État, entité sociopathe, utilise tous les moyens dont il dispose, violences policières, censure, arrestations de masse (près de 2 000 interpellations, des centaines de blessé.e.s et au moins deux personnes qui ont perdu la vie en Turquie, selon Amnesty), pour exercer un contrôle social au travers des médias larbins.
Médias qui choisissent des sujets extra-ordinaires (comme dirait Bourdieu dans sa critique des mass media), c'est à dire un traitement partiel et déformé de l'information, afin d’écraser tout type de contestation d'un modèle économique néolibéral imposé aux peuples, mortifère, destructeur du vivant, de la biodiversité, de la diversité tout cours, de toutes nos libertés individuelles et collectives, quel que soit notre sexe, nos origines, nos orientations sexuelles, n'en déplaise à Erdoğan, à Ayrault où à Christine Boutin. Amen.
Ce n'est pas un hasard si les médias mainstream se sont fait défoncer leurs véhicules à Istanbul par des émeutiers, pas vraiment, vu leur absence de parti pris, leur totaaaaaaale indépendance éditoriale et leur traitement « objectif » de l'information. Prend ça dans ta gueule France 2, M6, Libé et consor, pour service rendu à la république et à la liberté d'expression !
L'espace collectif ne peut rester plus longtemps entre les mains de quelques-uns (partis politiques, institutions religieuses, multinationales, médias bourgeois, lobbies divers et variés, think thanks, etc). La légitimité par les urnes de nos élites est obsolète. La société civile est la seule représentation légitime. Désobéissance civile à tous les étages, reprenons ce qui nous appartient.
Tuons tout type d'autorité ! ZAD Partout !
Le collectif anarchiste du Haut Fay, le 03 juin 2013
hautfay@riseup.net - zadpartout@riseup.net