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Billet de blog 20 novembre 2015

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"Nous sommes en guerre" (Françoois Hollande)

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                 "Nous sommes en guerre" (François Hollande)

Voici quatre jours, les Français se sont réveillés en guerre - sans l'avoir déclarée. En effet, aucune déclaration de guerre  n'avait été autorisée par le Parlement, comme l'exige l'article 35 de la Constitution. Le Président n'a pas davantage "informé le Parlement de la décision de faire intervenir ses forces à l'étranger" comme le permet la révision constitutionnelle de 2008. La France entre ainsi en guerre sous de mauvais augures: par une violation de la Constitution. Mais aussi de la  loi internationale. En effet seul un état peut être partie d'un conflit international, comme le rappelle notamment la Convention de Genève de 1977. Une déclaration de guerre impliquerait donc une reconnaissance de l'IS comme d'un état - un triomphe pour les terroristes. Mais surtout, il s'agirait d'une violation de la Charte des Nations Unies. Celle-ci accorde, en effet,  (art. 51 un "droit de légitime défense" à un état victime "d'une agression armée", mais ce terme vise une intervention militaire et ne porte que sur une riposte immédiate. Au-delà, tout conflit armé est subordonné à la décision du Conseil de Sécurité. On se souvient d'ailleurs que ce dernier avait autorisé l'intervention militaire des Etats-Unis en Afghanistan, mais non pas leur attaque contre l'Iraq. Les pays européens (à l'exception de la Grande-Bretagne) ont alors refusé de s'engager dans un conflit qui a, par ailleurs, suscité un grand mouvement de protestation populaire. Pour échapper à une condamnation, le gouvernement a pris soin de saisir le Conseil de Sécurité d'une proposition  d'intervention collective. Mais cette demande intervient après la proclamation présidentielle et on peut s'interroger sur ses chances de succès, compte tenu du poids de la France au Conseil de Sécurité. 

En revanche, François Hollande avance une mesure qui n'avait encore jamais accompagné une déclaration de guerre: une révision de la Constitution. Elle n'est d'ailleurs pas d'ordre international, mais intérieur puisqu'il s'agit, en substance, d'accorder au gouvernement la faculté de "suspendre" toutes les dispositions légales qui soumettent au contrôle des tribunaux les mesures relative aux libertés individuelles et collectives. Cette ambition peut surprendre de la part d'un Président qui dispose déjà du pouvoir, unique en Europe, de prendre, en cas de crise grave,  (toutes) "les mesures exigées par les circonstances". En fait, il s'agit d'abolir tout contrôle de l'action du gouvernement et de ses agents. Ainsi se répète l'histoire du "Patriot Act", instauré aux Etats Unis dans l'atmosphère de panique de l'après 11 septembre et qui n'a jamais pu être aboli depuis.

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