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Billet de blog 30 mars 2016

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Dichotomie, binarisme et obscurantisme.

Le clivage est omniprésent, le schisme sous-jacent dans chaque incantation, la scission est notre perspective maudite autant qu’inextricable. L’éclatement, voir l’explosion : future indubitable. Sans même de pessimisme abusif, ces horizons funestes se dessinent chaque jour plus nettement, nous acculant à la cruauté ingérable et à l’inintelligence d’un choix binaire, d’essence agressive et animale.

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Le choix : récurrent, torturant. Incontournable. Rendu obsessionnel. Notre nature profonde, en ce qu’elle a d’anti-culturel, ou de pré-culturel, se révèle, à ce propos, chaque jour davantage. Exagérément.

Blanc ou noir ? Ne pourrait-on être les deux à la fois, et éventuellement souhaiter refuser d’avoir à choisir entre voir sa mère ou son père mourir. Est-il immoral, en cette matière, d’être pour le moins circonspect, voir de prétendre combattre toute obligation d’un positionnement simpliste, réducteur, désensibilisé. Extérieur. Peut-on vivre et construire sereinement le statut, l’identité d’« afro-européen » par exemple, sans être tenaillé par les injonctions diverses à se positionner en faveur de l’un de ces deux pôles. L’un plutôt que l’autre. L’un en priorité. Dire l’un meilleur que l’autre. Entre deux continents. Deux ensembles d’humains. Comparaison n’est pas toujours Raison…

Athées ou religieux ? Laïcard ou fanatique ? « Bouffeur de curé » ou grenouille de bénitier, bigot ? Islamo-compatible ou islamophobe ? Sémitophile ou antisémite ? Matérialisme outrancier ou spiritualité stérile ? Défense des valeurs fondatrice ou naïveté coupable ? Cynisme ou utopisme fécond ? Le débat réveillé par le billet du blog de Mr Edwy P., à propos de la place qu’il convient de « réserver » à Mr Tarik R., intellectuel musulman, dans le débat français, est vraiment édifiant, pour illustrer l’une des plus magistrales et inconséquentes oppositions qui hantent le débat sociétal actuel. Pour ou contre Mr T. R. ? Pour ou contre sa libre expression - simple ou double-langage ?-, sur le sol de notre patrie agressée, prétendument par les « siens ». Une déferlante de haine incompressible, laxative. Cinq-cents commentaires tous plus enflammés… Journaliste émérite, salutaire, probe, ou pamphlétaire sectariste, à l’angélisme pervers ?

Sociologue ou excuseur de barbares ? Chercheur au CNRS-spécialiste du terrorisme au Moyen-Orient, ou détrousseur du story-telling officiel de nos parlementaires de tous bords ; unanimement outrés ? Burgat ou Burkha ?... Judéo-chrétien ou musulman ? Mais qu’est-ce que ça peut bien vouloir recouvrir comme concept anthropologique, philosophique, sociologique, théologique, qui puisse être opposable à l’obligation de construire une identité saine et respectueuse de son environnement ? Hilary ou Trump ? Marine ou Sarko ? Goggle ou Facebook ? Twitter ou Snapchat ? Hamas ou Tsahal ? Social-libéralisme ou droite dure ? Macron et El Khomry ou Ciotti et Gattaz ? Est-ce que l’emprise de tous ces positionnements binarisants au quotidien, pourra un jour être évaluée, autrement qu’en nombres de victimes éplorées, ou exterminées même ? Innocentes et de toutes parties, ces victimes de plus en plus nombreuses, semblent dans un premier temps devoir l’être, indépendamment du fait d’adhérer ou non à l’un de ces choix binaires. Car on choisit rarement d’être victime.

Donc bourreau ou victime ? Gros poisson ou petit ? Loup ou agneau ? Clérical ou anticlérical ? Complotiste ou anti-complotiste ? G. W. Bush ou Re-open 11/9 ? Intérêts des actionnaires des multinationales ou Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? Banlieues et « zones de non-droit », reprimitivisées, contre le reste de la France, intègre et républicaine, civilisée ? Monde Libre ou obscurantisme ? Propagandiste ou contre-propagandiste ?... Sauver les réfugiés ou couler leurs bateaux ?

Etc… Combien encore ?

La démultiplication des exemples des choix « binaristes », souvent intégristes et violents, fallacieux, pervers, grotesques, abrutis, cyniques voir inhumains, auxquels nous sommes enjoints ou contraints, ne peut qu’étayer le sentiment d’observer une tentative d’abrutissement et de ré-animalisation des masses ; à de bien tristes fins. Attisant la fibre qui nourrit les pires hooliganismes, les pires instincts grégaires de par le monde, et bien au-delà des stades de foot, les antagonismes poussés, exacerbés, promotionnés, surmédiatisés, auxquels on voudrait conformer nos esprits fragilisés et nos psychés traumatisées, participent d’un processus de déshumanisation de l’Autre évident, qui n’a pour unique but que d’envenimer les ressentiments, et de permettre le déroulement de desseins chaotiques. On ne peut prétendre invectiver en permanence un groupe, une communauté, une minorité et s’attendre à ce qu’elle y consente, se sentant agressée, sans jamais réagir pour autant. De telles évidences et banales constatations nous indiquent clairement que les hérauts de tous ces positionnements bêtifiants et simplistes, aux conséquences dors et déjà tragiques, sont bien plus qu’irresponsables. Ils sont très intelligents, eux, et donc en parfaite maîtrise des « fâcheuses » conséquences de leurs phraséologies teintées de dichotomisme compulsif.

Pour ou contre la peine de mort ? Vieux débat sur le retour. Pour ou contre la perpétuité réelle ? Pour ou contre les Droits Humains en fait ? Pour ou contre la DUDH de 1948 ; et la CEDH qui n’entend pas « Perpète » d’une bonne oreille ? Pour ou contre la déchéance de nationalité ? L’apatridie ? L’extension de l’état d’Urgence ? La poursuite d’une guerre permanente contre le terrorisme ; mais qui se trouverait intrinsèquement être justement la cause de la persistance du terrorisme auquel nous sommes confrontés ? Doit-on ou non accorder du crédit à l’équité et l’intégrité de la CPI ? Etc… Lancinante litanie des ces questions sur lesquelles il nous faudrait absolument prendre partie ; et qui n’ont toutes que deux réponses possibles, aussi insatisfaisante l’une que l’autre. Veaux que nous sommes…

La défense du multilatéralisme de l’esprit d’analyse, digne de l’héritage de « L’esprit des lois » de notre cher Montesquieu, doit être défendu avec force, et donc je souhaite ici remercier Mediapart et Mr Plenel pour leur participation indéniable au nécessaire débat démocratique ; celui qu’il y a effectivement Urgence à organiser et faire fructifier.

Comparatisme certes, mais objectif et omnidirectionnel alors.

« Il ya longtemps que l’on a dit que la bonne foi était l’âme d’un grand ministère.

Un particulier peut jouir de l’obscurité où il se trouve : il ne se discrédite que devant quelques gens ; il se tient couvert devant les autres ; mais un ministre qui manque à la probité a autant de témoins, autant de juges qu’il y a de gens qu’il gouverne.

Oserai-je le dire ? Le plus grand mal que fait un ministre sans probité n’est pas de desservir son prince et de ruiner son peuple ; il y a un autre, à mon avis, mille fois plus dangereux ; c’est le mauvais exemple qu’il donne. ».

Montesquieu – « Lettres persannes » - Lettre CXLVI.

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