Un sondage et tout le monde s'agite !

Le sondage donnant Jean-Luc Mélenchon et François Hollande au coude à coude confirme deux tendances : une coupure, dont on peut aujourd'hui affirmer qu'elle a atteint un point de non retour, entre le Président de la République et l'électorat de gauche, et une aspiration de ce même électorat à se faire entendre dans cette élection. En soi, si on s'en tient à ne considérer que le duel JLM/FH comme une expression électorale de la confrontation entre deux orientations contradictoires à gauche, c'est plutôt encourageant.
Mais ce même sondage indique surtout que, selon la configuration, l'extrême-droite serait en tête, la droite suivrait, ou inversement. Hollande serait troisième, Mélenchon suivrait, ou inversement. Dans tous les cas, la gauche (qu'elle soit "radicale" ou "capitularde") serait éliminée, et de loin.
Donc quand bien même cette tendance viendrait à se confirmer le jour J, et nous n'en sommes pas là, qu'y gagneraient les jeunes et les salariés en lutte contre la loi travail (surtout si cette mobilisation connaissait un échec, ce que je ne veux pas croire) ? Qu'y gagneraient celles et ceux qui, dans les "Nuits debout", cherchent à renouveler les pratiques politiques et redonner du souffle à la démocratie ?  Qu'y gagnerait le peuple ?
Réponse : la victoire d'une droite revancharde, sous pression de l'extrême-droite. Autrement dit le coup de grâce, après les mandats successifs de Sarkozy et Hollande, qui auront tous deux bien préparé le terrain à ce désastre. Quelle perspective ! Compte tenu de l'état du pays et de la situation internationale, il nous en faudra sans doute pour au moins une génération avant d'être en capacité de reconstruire un début de reconquête sociale et démocratique. Et au risque de paraître catastrophiste, l'éventualité d'une menace de type fasciste ne serait pas à exclure à court ou moyen terme.
Je maintiens ainsi que les candidatures de Jean-Luc Mélenchon et François Hollande, chacun à sa place, contribuent séparément à tracer une perspective commune : faire perdre la gauche et empêcher que se mette en branle une dynamique à gauche et à vocation majoritaire contre la politique de Valls/Macron/Hollande.
Voilà pourquoi, avec le PCF, nous sommes favorables à l'organisation d'une primaire citoyenne de la gauche et des écologistes qui s'attache avant toute chose à définir le socle d'un programme de gouvernement à gauche.
Personne ne peut aujourd'hui avoir de certitudes sur ce qu'il faut faire, mais si on tient compte des contraintes d'une situation compliquée, j'y vois la seule marche à suivre pour enclencher une dynamique populaire et citoyenne, pour trouver un débouché politique au sursaut social et démocratique que représente la mobilisation contre la loi El Khomri ("et son monde", comme dit le journal Fakir). Si chacun jouait le jeu, des millions de citoyens de gauche, de jeunes et de travailleurs mobilisés, se saisiraient de cet outil (la primaire n'est pas une fin en soi, tout comme la fin de l'institution présidentielle demeure un objectif impérieux) pour marginaliser Hollande/Valls/Macron au sein de la gauche, cela donnerait de la force aux luttes sociales, condition fondamentale pour un dénouement positif de la situation.
Le pire serait de ne pas essayer.
Il n'y a plus un instant à perdre : oublions un peu les sondages et que toutes les bonnes volontés se mettent au travail !