Quelle est la différence entre un "complotiste" et un citoyen simplement critique et vigilant ?
Leur point commun, c'est qu'ils ne considèrent pas la "version officielle" des évènements (quelqu'ils soient) comme devant systématiquement être identifiée à la vérité. La justification de cette vigilance est dans l'histoire : les mensonges et les complots sont incontestables. Tout le monde se souvient de la prestation impressionnante d'un membre du gouvernement américain montrant à l'ONU des photos censées prouver que le régime de Saddam Hussein possédait des "armes de destruction massive". Il fut vite admis que c'était des fakes grossiers.
Leur différence peut être exprimée ainsi : le premier est certain que l'autorité ment, et il dispose d'une version alternative dont il est convaincu qu'elle est vraie. Le second sait que l'autorité peut dissimuler bien des choses, et que d'autres versions sont soutenables, mais il reconnait volontiers que la vérité lui échappe, et que, au fond, la version officielle peut être la plus exacte.
Concernant les attentats contre les journalistes de CHARLIE et les passants de l'hyper marché casher, je voudrais soumettre à la vigilance des lecteurs quelques questions qui, à mes yeux, se posent, et dont je ne détiens pas la réponse.
La première est celle du contexte. Ces tragiques évènements ont eu lieu quelques jours après le vote français à l'ONU en soutien d'une résolution palestinienne. Ce vote, naturellement, a été suivi d'avertissements menaçants du premier ministre israélien : les français courraient, selon lui, le risque "d'importer en France le conflit palestinien".
L'avant veille du massacre, Médiapart faisait sa première page sur un article d'Edwy Pleynel sur le livre d'Eric Zemmour dont la thèse, reprise d'un autre, comporte le grave danger d'une immigration arabe et musulmane "de remplacement". Le lendemain, veille du massacre, France Inter consacrait son émission matinale au dernier livre de Houelbecq, roman basé sur la "thèse" de la plausibilité d'une soumission des français à la culture et à la religion musulmane.
Je suis naturellement incapable d'indiquer même une hypothèse qui supposerait un lien entre ce contexte et les faits. Simplement, je suis frappé par cette coincidence singulière.
Autre question : trois policiers veillaient sur le local de Charlie, et sur la personne de Charb. Il ne semble pas que cette présence, qui est tout de même destinée à empêcher l'attaque, ait joué le moindre rôle. Le garde du corps de Charb avait, parait-il, fait ses armes en Afghanistan. Ce n'était pas un perdreau de la veille. De leur côté, les deux assassins n'étaient pas des chiens de guerre, plutôt des paumés qui, semble-t-il, n'avaient pas une idée bien précise de la géographie des lieux (ils ont demandé leur chemin). Ils sont venus avec des gilets pare-balles (ce n'était pas un attentat suicide, imparable) ... et une pièce d'identité, qu'ils ont laissé en évidence dans leur voiture, qu'ils n'ont pas essayé de brûler.
Venus pour tuer les journalistes et "venger le prophète", nous les retrouvons dans sur superrette Casher. Coïncidence, ou complément de programme ? A-t-on des indices suggérant que ce second objectif faisait partie de leur plan ? Ont-ils été guidés ? Conseillés ?
Enfin, la question la plus grave à mes yeux, ces deux terroristes n'ont pas pu être capturés, ils ont été abattus. On peut voir cette question sous plusieurs angles. Sans aucun doute, pour beaucoup de français "ils ne méritaient pas autre chose". D'accord, mais dans ce cas, le Front National a gagné : la peine de mort, sans jugement, pour les terroristes. Autre regard : l'angle technique : il était impossible de les capturer, de les mettre hors de combat. Pour le profane que je suis, c'est proprement incroyable. Dans la superrette, c'était le bordel : un employé s'est échappé par l'ascenseur, a donné aux policiers la clé du rideau de fer et le plan des lieux. Parmi les forces spéciales, il y a des tireurs d'élites, très capables à quelques dizaines de mètres de toucher le bras qui tient une arme... Non ?
Voilà quelques-unes des questions auxquelles je n'ai pas de réponse, et qui, me semble-t-il, en méritent une.