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Billet de blog 27 août 2014

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Is there no alternative ?

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Il y a, nous dit-on, à l’Assemblée Nationale une majorité de gauche favorable à plus de justice sociale. Une partie des députés du PS, des écologistes, du Front de Gauche, voudrait que l’on équilibre mieux les faveurs. Que n’en bénéficient pas seulement pour les entreprises, politique dite « de l’offre ». Mais aussi les travailleurs : plus de pouvoir d’achat, politique dite « de la demande ». Coup de pouce au SMIC, hausse des salaires (au moins dans la fonction publique), baisse de la TVA, emplois jeunes… Et, conséquemment, révision à la baisse des objectifs de remboursement de la dette.

Cette « majorité de gauche » bénéficie aujourd’hui du renfort des évadés du gouvernement : Montebourg, Hamon, Filippetti.

Cependant, il est peu probable qu’il sorte de cette « fronde » quoi que ce soit qui mérite d’être signalé.

Jusqu’à présent, l’abstention de quelques députés n’a pas modifié d’un iota la ligne gouvernementale. Il en sera sans doute de même demain.

Pourquoi ? Les raisons qui viennent à l’esprit sont de nature politicienne. La première : il n’est pas certain que cette majorité soit, numériquement, une majorité. Elle serait en tout état de cause fragile. Est-il si difficile de « retourner » quelques frondeurs ?

La seconde (qui nourrit la première) : Hollande et Valls ne modifieront pas leur politique. Ils peuvent faire passer des lois, des textes, en dépit de l’opposition de l’Assemblée Nationale, la constitution le leur permet. Si toutefois ils étaient mis en minorité par l’Assemblée Nationale, le Président dissoudrait l’Assemblée, ce serait le recours aux électeurs, dont il est à craindre qu’ils renverraient au parlement une majorité de droite et d’extrême droite. Nous aurions alors une cohabitation. La droite (par la voix de Fillon) n’y est pas favorable : on la comprend ! En deux ans et demi, elle aurait le temps de prouver que, elle non plus, ne peut certainement pas faire baisser le chômage, sinon en multipliant les petits boulots précaires et sous payés. Cela pourrait remettre en selle le PS pour 2017 ! Mais plus probablement, le FN emporterait la mise.

Il y a toutefois une raison plus profonde à la stérilité de la démarche des « frondeurs », et c’est que, dans le débat qui les oppose à Valls, sur le terrain où tous se situent, ils ont tort, et Valls a raison. Il existe une ligne politique compatible avec les impératifs du système libéral aujourd’hui, c’est celle de Valls. Ce serait, le cas échéant, celle de Fillon ou de Juppé, et ce serait aussi, en dépit des apparences, celle de Le Pen.

Elle consiste à sauver et accroître les profits et les dividendes et entraine l’augmentation du chômage, du travail précaire sous-payé, de la misère, et la dégradation de la démocratie. Il pourrait exister une ligne politique de rupture avec le libéralisme d’aujourd’hui et nous allons en dire un mot. Mais disons tout de suite qu’il ne peut exister, aujourd’hui, de ligne politique sauvegardant le cadre capitaliste tout en épargnant le peuple travailleur. Ce que proposent les députés « frondeurs », avec maintenant leur showman Montebourg, n’a pas de sens. Ils réclament de la poudre aux yeux, peu de chose, qui ne changerait rien à la situation des couches populaires, mais ce peu qu’ils demandent, c’est trop, c’est beaucoup trop : le système n’a pas le temps, ni les moyens de finasser. C’est ce que le Père Fouettard, Laurent Fabius, paraît-il, énonçait au conseil des ministres lorsque tel ministre montrait des états d’âme : « Si la France relâchait ses efforts, les milieux financiers la sanctionneraient immédiatement ». Un avertissement qui sonne juste. Renâcler devant les exigences du système, sans oser porter la hache sur la structure même de ce système, c’est s’exposer à être par lui broyé.

Le caractère particulier de la situation, ce n’est pas qu’il surgisse ainsi des Montebourg, des hommes nouveaux prétendument porteurs d’un discours différent, qui ne sont en réalité que des joueurs de flûte menant ceux qui les suivent à la noyade : il en surgit toujours. Ce qui est particulier aujourd’hui c’est que ces illusionnistes n’abusent à peu près personne. Il n’y a pas de version gauche, gauchie de la politique libérale de Valls-Hollande.

Y a-t-il une alternative ? Oui. Il faut qu’il y en ait une, car la politique libérale mène à une misère immense et à la dictature de Big Brother. Hollande mène à Juppé ou à Le Pen et dans tous les cas, à de nouvelles aggravations de la situation des couches populaires. Aux révoltes, les classes dirigeantes répondraient par la répression, dont les moyens modernes sont puissants. La démocratie formelle et souvent caricaturale que nous connaissons disparaîtrait au profit d’une forme nouvelle, inédite, de dictature.

Il y a une alternative, mais elle exige que l’on franchisse une sorte de Rubicon.

Un gouvernement populaire agirait immédiatement

1 pour le partage du travail et des ressources, avec l’objectif de la résorption complète du chômage et de la misère.

2 Il exercerait le pouvoir dans un cadre constitutionnel donnant au peuple les moyens d’un réel contrôle sur les élus.

3 Il aurait la maîtrise de sa monnaie, emprunterait, si nécessaire, principalement à ses propres citoyens, constituerait l’outil bancaire de l’Etat au service de l’économie.

4 Il réindustrialiserait la France de manière volontariste et écologique, il proposerait des coopérations équilibrées à ses voisins européens.

5 Il détruirait la puissance du capital en instaurant un revenu maximal égal (par exemple) à vingt fois le revenu minimal. Il taxerait lourdement les grandes fortunes (par un ISF fortement progressif) de manière à les réduire.

6 Il libérerait la presse et les médias du pouvoir de l’argent.

7 Il mettrait en place un système national de distribution qui respecte les producteurs et les consommateurs.

8 Il s’attacherait à résoudre la crise du logement en réquisitionnant une grande part des logements inoccupés et en socialisant une partie des terrains à bâtir.

9 Il socialiserait les grandes entreprises d’importance stratégique pour le pays et la population.

10 Il refonderait l’Ecole de la République en donnant toute sa place à un essor de la formation professionnelle lié aux objectifs de la réindustrialisation.

11 À l’étranger un gouvernement populaire n’investirait pas dans les pays où règne la corruption et le mépris du peuple, il n’interviendrait pas militairement dans des aventures douteuses et cantonnerait l’armée dans son rôle défensif.

12 Il agirait avec fermeté pour la justice, la paix et le respect du droit international.

Les députés « frondeurs » sont-ils prêts à aller dans ce sens ? Non ? C’est pourquoi ils n’iront nulle part. Et les autres ? Les Mélenchon, Eva Joly, Larroutourou ? Les Todd, Morin, Sapir, Jorion, Lordon, Maris ? Qu’en pensent-ils ?

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