Par sa construction prétorienne des libertés fondamentales, le Conseil Constitutionnel a expressément confirmé que la situation irrégulière d'un étranger ne peut justifier à elle seule un refus de mariage (Décision n°2003-484 DC).
Le Conseil constitutionnel fonde sa décision sur ces trois éléments :
1. La liberté du mariage constitue une composante essentielle de la liberté individuelle, incarnant le principe fondamental d'autonomie de la personne humaine. Cette conception philosophique du mariage comme expression première de l'autodétermination de l'individu pose le socle conceptuel de sa protection juridique.
2. Cette liberté trouve sa traduction juridique dans les articles 2 et 4 de la DDHC, qui consacrent respectivement la liberté comme droit naturel et imprescriptible de l'Homme et sa limitation aux seules bornes garantissant aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits.
3. La reconnaissance jurisprudentielle de la liberté de mariage comme PFRLR vient parachever cette construction, en lui conférant une valeur constitutionnelle explicite.
S'agissant du cadre conventionnel européen, l'article 12 de la CEDH consacre explicitement le droit au mariage comme un droit fondamental universel, sans distinction de nationalité ou de statut administratif. Cette disposition s'inscrit dans la conception européenne d'un droit au mariage comme attribut essentiel de la personnalité juridique.
Cette protection conventionnelle se trouve par ailleurs renforcée par l'article 8, relatif au respect de la vie privée et familiale, qui impose aux États une double obligation : négative en prohibant toute ingérence disproportionnée dans la formation des liens familiaux ; positive, en exigeant la mise en place d'un cadre juridique protecteur effectif.
S'appuyant enfin sur une lecture combinée des articles 12, 8 et 14 (principe de non-discrimination), la Cour condamne systématiquement les restrictions administratives excessives au mariage des étrangers. Elle soumet toute limitation à une double exigence de légitimité du but poursuivi et de stricte proportionnalité des moyens employés (arrêts Abdulaziz, Cabales et Balkandali c. Royaume-Uni en 1985 et O'Donoghue c. Royaume-Uni en 2010).
La Cour Européenne des Droits de l’Homme réaffirme ainsi la prééminence des droits fondamentaux sur les préoccupations de politique migratoire.
Le Conseil Constitutionnel produit la même lecture en établissant que la lutte contre l’immigration illégale demeure invariablement subordonnée au respect des droits fondamentaux (Décision n° 89-269 DC).
Cette protection de la liberté du mariage se justifie par : le respect de l'autonomie personnelle, le respect de la dignité humaine, la nécessité de prévenir les discriminations et la garantie de protection de la vie privée et familiale.
L’adoption par l’Assemblée nationale d’une interdiction générale du mariage pour les étrangers en situation irrégulière constituerait une violation manifeste des engagements internationaux de la France et des principes fondamentaux de sa Constitution.