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Billet de blog 1 juillet 2008

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A qui appartient le service public ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Sous De Gaulle, nous avions des télés et radios d'Etat ; sous Pompidou "la voix de la France"; sous Giscard une ORTF implosée en sept sociétés, sous Mitterrand une libéralisation des ondes qui a conduit à la création des télés et radios privés. Et voici que Nicolas Sarkozy réinvente les médias d'Etat. Il veut désormais désigner le pdg de la télé et de la radio publique au motif que l'Etat est l'actionnaire unique de ses sociétés. Mais ce n'est pas un simple retour en arrière, c'est plutôt une marche en avant qui prend au piège ceux qui s'y opposent.

En effet, ils ont toujours l'air d'avoir un train de retard. Ainsi, en 1974, ils redoutaient la disparition de l'Ortf qui a pourtant donné naissance à un service public, en apparence libéré, de la tutelle politique. En apparence seulement, car le CSA et ses ancêtres ont toujours fourni au service public de la télé et de la radio, des PDG de la couleur politique du pouvoir dominant. Aujourd'hui, avec l'omniprésidence de Nicolas Sarkozy, c'est à la fois une reprise en main et une révolution libérale. Le pouvoir indique clairement que les médias publics sont à son service puisqu'il incarne - idéellement et fictionnellement- l'intérêt général, c'est à dire l'intérêt politique de celui qui gouverne selon ses options. Il énonce aussi son désir de gérer le service public comme une entreprise. A média public, argent public, aux médias privés, l'argent des privés, dit-il en substance, en soumettant cependant cet adage aux impératifs privés puisque le manque à gagner de la publicité disparue sera tiré de l'activité des médias privés sous forme de taxes. Il fait ainsi rentrer par la petite lucarne les critères libéraux dans la télé publique devenue doublement dépendant aux yeux des télespectateurs: dépendance politique et dépendance économique.

Au delà de la question politico-technique de la désignation du PDG, se pose la question plus fondamentelement politique de savoir en fait à qui appartient le service public? Nicolas Sarkozy et la commission copé répondent à l'Etat. Et l'Etat, c'est moi, Nicolas Sarkozy, donc je fais ce que je veux. Notamment, comme les précédents pouvoirs politiques, je vais placer mes copains aux postes qui m'arragent. Mais je le ferait directement sans le détour hypocrite du CSA dont les membres sont d'ailleurs désLes salariés inquièts pour leur indépendance et les syndicats répliquent que le service public appartient à ceux qui le font vivre quotidiennement par leur travail. Mais aucun ne songe à impliquer concrétement le public dans le fonctionnement du service public lui-même. Il n'a aucune présence physique dans le conseil d'administration pour les télespectateurs et les auditeurs. Ils n'ont donc aucun accès aux informations sur la manière dont on gére, en son nom, le service public. les télespecteurs et auditeurs ne sont présents, dans le mécanisme de fonctionnement, que sous deux formes évanescentes: celle de bailleurs de fond à travers la redevance et celle d'audience, sans quoi aucun média n'a de légitimité social à faire valoir.

La réforme de Nicolas Sarkozy constitue donc bien une avancée rétrograde, un oxymore qui ne donne pas à rire. Quand aux salariés du service public, ils devraient à l'inverse provoquer par leurs manifestations sur l'indépendance, un débat public sur la nécessité pour le public de ne plus être une simple variable du débat politique sur l'avenir des médias publics.

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