On est pas aux States.
Un privilège, en France, est d'abord l’avantage inconsidéré et abusif octroyé à quelqu'un par une autorité légale. C'est l'acception privilège aristocratique qui est ancrée dans les esprits, depuis la nuit du 4 août 1789 (au moins).
Et c'est bien pour cela que la droite réactionnaire et/ou libérale a longuement traité les fonctionnaires de "privilégiés" dans un de ces renversements idéologiques dont elle a le secret depuis plus de deux siècles.
Dire hic et nunc d’une personne est privilégiée, c’est donc bien considérer que celle-ci est exemptée du traitement commun, qu’elle échappe à un régime « normal », comme les aristocrates et caciques religieux de 1789 étaient exonérés de corvées et d'impôts. C’est donc bien dire que ces "privilégiés" doivent être ramenées au rang des non-privilégiés, autrement dit, pour ce qui apparemment nous occupe ici, au rang des sur-contrôlés, sur-fliqués, sur-matraqués, discriminés, marginalisés. Étrange.
Il serait temps que la gauche qui se veut radicale fasse son auto-critique sur ce point: ça ne passe pas, et ce pour une raison historique et culturelle majeure qui ne devrait pas lui être inconnue, c'est source d'absolue incompréhension et c'est très dangereux politiquement -enfin quand on se dit « de gauche ».
Un autre temps de réflexion serait de considérer, en toute logique intersectionnelle, que la couleur de peau* n’est qu’une variable de discrimination parmi d’autres et que cette variable peut être en grande partie abolie ou, au contraire, accentuée par d’autres.
Ceci est valable pour toutes les formes de discriminations.
Mais c’est -peut-être- un autre débat.
* puisque, à rebours d’une « blanchité », conçue comme une construction sociale complexe, on finit invariablement, dans les diners en ville et dans la plupart des commentaires sur Mediapart, par en arriver à des schématisations binaires qui reposent essentiellement sur... le phénotype.