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Billet de blog 3 octobre 2023

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Où il est question de Booba, d’intersectionnalité et d’Eric Hobsbawm

L’article de Khedidja Zerouali présente Booba comme coupable de cyberharcèlement. Ce qui semble bien être le cas. On aimerait pas être à la place de Magali Berdah. Mais si on se livre à une analyse intersectionnelle de la situation, on est bien ennuyé.

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L’article de Khedidja Zerouali présente Booba comme coupable de cyberharcèlement. Ce qui semble bien être le cas. On aimerait pas être à la place de Magali Berdah.

Mais si on se livre à une analyse intersectionnelle de la situation, on est bien ennuyé :

Voilà donc un racisé (donc victime) qui s’en prend à une femme (donc victime).

Il s’avère que le harceleur est millionnaire (donc pas victime) comme la femme en question (pareil).

Le harceleur est raciste : il utilise des insultes antisémites.

La harcelée a été condamnée (1,8 millions pour rupture abusive de contrat, 542.000 pour redressement fiscal sans compter les plaintes qui sont en cours) et la critique initiale du harceleur semble juste ( ce dont ne parle pas l’article, mais admettons, ce n’était pas son objet).

Le harceleur a été également multi-condamné, notamment pour avoir insulté publiquement et avoir, comme dans le cas qui nous occupe, appelé à cyber-harceler une femme racisée, Zineb El Rhazoui (ce dont Mediapart n’a jamais parlé).

Les deux représentent brillamment une facette de l’ultra-capitalisme moderne qui fait son miel d’un rap soi-disant rebelle (quand Booba a depuis longtemps avoué ne s’intéresser qu’au fric et promeut un mode de vie parfaitement raccord avec le modèle dominant), d'une communication perverse dont l’unique but est de vendre au mépris de toute éthique (on peut appeler ça de l’escroquerie, de l’abus de faiblesse...), d'une « télé-réalité » qui promeut une vie aussi fausse qu’idéale (et fait marcher la grande machine décivilisatrice et écocide), d’egos en roue libre dont le seul but dans la vie semble être de promouvoir leur image pour en tirer profits (financiers et/ou symboliques).

Bref. Comme on dit quand on ne sait plus trop quoi dire : « c’est compliqué. »

Ou alors, on écarte ces remarques car on s’aperçoit qu’elles embrument l’esprit et compliquent inutilement notre compréhension de la situation. Que ce sont des oeillères inutiles, une absurde toile d’araignée où l’on nous empêtre.

Car il n’y a pas d’essence de la victime (que ce soit par son genre, sa race, son orientation sexuelle)…), on est pas, par nature, une éternelle victime.

Il y a une situation dans laquelle telle personne est victime des agissements d’une autre. Mais d’autres situations où cette même personne, victime ici, porte là-bas le costume du bourreau. C’est donc l’analyse la plus objective possible de ces situations, qui permettent de déterminer si telle personne est victime et telle autre tortionnaire. Pas leur identité.

Et c’est peut-être l’occasion de rappeler les mots d’Eric Hobsbawm :

« Le projet politique de la gauche est universaliste : elle se bat pour tous les êtres humains. De quelque manière nous interprétons les mots, il ne s’agit pas de liberté pour les actionnaires ou pour les Noirs, mais de la liberté pour tous. ll ne s’agit pas d’égalité pour les membres du Garrick club ou pour les handicapés, mais de l’égalité pour tous. Il ne s’agit pas de fraternité pour les seuls élèves d’Eton ou pour les homosexuels, mais de la fraternité pour tous. Or les politiques de l’identité ne visent pas l’émancipation de tous, mais uniquement des membres d’un groupe spécifique. »

(« Identity politics and the left »)

« The political project of the Left is universalist: it is for all human beings. However we interpret the words, it isn’t liberty for shareholders or blacks, but for everybody. It isn’t equality for all members of the Garrick Club or the handicapped, but for everybody. It is not fraternity only for old Etonians or gays, but for everybody. And identity politics is essentially not for everybody but for the members of a specific group only. »

Illustration 1
Toile d'araignée Halloween, 31,99$.

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