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Billet de blog 27 avril 2015

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Sur le concept d'aliénation

Beaucoup a été dit sur ce mot peut-être un peu passé de mode et certainement par trop vague et englobant.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Beaucoup a été dit sur ce mot peut-être un peu passé de mode et certainement par trop vague et englobant.

Pour Kundera, l'aliénation consiste à être « l'allié de ses propres fossoyeurs ».

L'être aliéné nie ses propres aspirations : le consommateur, plutôt que de vivre pleinement, consomme les signes d'une vie réussie. La vie, la vraie, est ailleurs, mais le slogan publicitaire nous ramène aux promotions en gondole.

Le salarié, nous dit Marx, vend sa force de travail et se retrouve dépossédé de son existence : il devient un simple rouage de la machinerie économique; ne sait rien de son rôle. Et la religion rend supportable cette vie qui n'en est pas une, promettant pour l'autre monde les délices faisant cruellement défaut ici-bas.

L'un des paradoxes de l'aliénation est que, lorsqu'elle est parfaitement réussie, l'aliéné affirme avoir choisi sa vie et en être satisfait. C'est le concept d' « intériorisation de la domination » élaboré par Bourdieu : le dominé accepte les règles du jeu et les défend, même si celles-ci font de lui un esclave. Le servant volontaire peut être, bizarrement, plus royaliste que le roi : considérer bien en face sa situation serait sans doute trop douloureux, et mieux vaut le confort relatif d'un sort que l'on se convainc de choisir. Il faut parfois se prémunir des coups de soleil de la lucidité...

Mais ceci pose un grave problème philosophique et éthique : faut-il croire celui qui dit aimer sa vie ? Celui qui dit avoir choisi son sort et la croyance qui va avec -et qui peut nous sembler un sort aliéné- faut-il chercher à le libérer contre lui-même, ou plutôt contre ce qui, en lui, l'assujettit? le laisser aller ? Est ce un impérialisme malvenu que de signifier à autrui son état de domination ?

Faut-il laisser cette dame continuer à remplir son caddie au détriment de sa vie ?

Faut-il laisser Charlot se faire broyer, au physique comme au psychique ?

Où est l'humaniste ? Celui qui ne veut pas imposer à l'Autre sa conception de la liberté et le laisse donc poursuivre son chemin, fût-il un chemin de soumission ? Ou celui qui cherche à éveiller une conscience, à faire de l'Autre un égal en liberté, au risque de le déstabiliser profondément ?

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