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Billet de blog 21 octobre 2021

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Le jour le plus con

C'est l'heure. Je me suis réveillé plus tôt que d'habitude. Sans doute les bruits de pas dans l'allée. Apparemment, je ne suis pas le seul....

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C'est l'heure. Je me suis réveillé plus tôt que d'habitude. Sans doute les bruits de pas dans l'allée. Apparemment, je ne suis pas le seul. Bon nombre de mes voisins a aussi ouvert un œil. C'est l'effervescence dans le quartier. Une activité inhabituelle flotte dans l'air. Chacun se prépare à l'évènement, hormis mon voisin de gauche qui persiste à faire le mort (peut-être n'a-t-il pas tort) , peut être devrai je l'imiter et rester couché, les yeux fermés. Ignorer, ne pas se laisser gagner par les élans folkloriques. Enfin, pour une fois que ça bouge !

Comme toujours, les Morel arrivent au pas de course. Ils sont au complet. Oh même plus qu'au complet ! l'ainée des filles pousse un landau. C'est papy Étienne qui va être content.

J'ai encore du temps devant moi. Mes parents n'arrivent jamais avant onze heures trente. Mon frère fait un effort surhumain pour se lever et se pointe vers les quatorze heures.

Un bruit de trompette me fait sursauter. J'avais du replonger dans les ténèbres. C'est le fils de Louis qui arrive poursuivi par sa mère, tentant de lui confisquer le jouet en plastique dans lequel il s'époumone. Elle s'inquiète pour pas grand chose, de toute façon, la trompette nous y aurons droit à onze heures chez le vieux con du 12. Le bambin se calme en arrivant devant son père. Louis est aux anges. Immobile, les yeux dans les yeux de son fiston, son amour, sa vie. Il voudrait le voir plus souvent, ne pas attendre l'occasion, suspendu au bon vouloir de la maman, tutrice légale.

De l'autre côté, Jean n'arbore pas le visage de l'hospitalité. Ses deux cousins viennent de débarquer, encore plus gris que le ciel. Et aujourd'hui ce n'est pas peu dire. Ces deux faces de rats s'évertuent à venir chaque fois, se plantent là avec leurs gueules d'enterrement et restent des heures.

Il y a plus de vie du côté de chez Jorge. Frères, amis, ils sont tous là. Le Brésil, au cœur de la province française. Couleur, joie. Tout n'est pas perdu. Ça ne plait d'ailleurs pas à tout le monde. Plus d'un regard noir fusille cet espace coloré et bruyant. Merci Jorge ; tu me donnes la pêche pour recevoir ma famille. Le silence hébété de mon père et surement les larmes de ma mère. On se demande pourquoi. Nous ne nous sommes jamais parlé et ça ne va pas commencer maintenant.

Le va et vient bat désormais son plein. L'heure de pointe !

J'ai l'impression d'être au zoo. Dans la cage. Si certains passent discrètement, d'autres trainent, regards appuyés, allant parfois jusqu'à s'immobiliser devant moi. Pas gênés ! Heure de pointe redoutée aussi pour ce qu'elle n'est plus pour nous. L'heure du pastis sous les platanes, au grand air avec les potes. La vraie vie quoi ! Pas celle là, enfermés des jours et des jours... Et des nuits...

Tiens, les parents du petit Simon ; les seuls à venir tous les jours. Courbés tous les deux, main dans la main, direct vers leur fils, les yeux rivés au sol. Les seuls qui me serrent les tripes. Non pas que les autres ne soient pas sincères, mais leur démarche suinte l'obligation, la B.A incontournable. Leur visite ne veut rien dire. Dans ce cas autant ne voir personne. Mon voisin de gauche ne se pose pas la question. Pas une visite. Jamais. Il ne semble pas s'en porter plus mal que nous qui avons droit à la petite excursion familiale coutumière.

Le conformisme a encore de longs jours devant lui ! Visite ou pas visite, qu'est ce que ça change ?

Ce soir il n'y aura de nouveau plus personne, seuls avec nous mêmes. La vie des autres aura reprit son cours. Petits soucis et petites joies d'une vie ordinaire. Qu'aura-t-on gagné ? On se retrouvera une fois de plus comme des cons, avec en prime sous les yeux, un gros bouquet de fleurs mauves et tristes comme la mort.

Comme tous les ans, début Novembre..........

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