Bruno Palier
Directeur de recherche CNRS en sciences politique au CEE, Sciences Po, spécialiste de la protection sociale et auteur de "Réformer les retraites"
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Billet de blog 18 mars 2023

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Retraites : pourquoi le retrait est la solution la moins coûteuse politiquement

L’obstination alimente la protestation, le retrait la stopperait. Les coûts du 49.3 sont énormes, y compris pour les projets à venir. L’opinion soutient les blocages et les grèves. Sans retrait, la dynamique va clairement dans le sens de la montée du Rassemblement National.

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Le retrait est en train de devenir la solution la moins coûteuse. L’obstination alimente la protestation, le retrait la stopperait. Le pire est la radicalisation et la violence. 

Les coûts du 49.3 sont énormes, y compris pour les projets à venir, comme l'explique cet article du Monde. « Cette réforme concentre en effet la plupart des mécanismes aujourd’hui identifiés par la science politique comme nourrissant le ressentiment social qui alimente lui-même les partis populistes de droite radicale », y concluons-nous.

Le 49.3 signifie énormément de perte de crédit et de capacité d’action pour tout gouvernement qui succèdera à celui d'Élisabeth Borne : avec qui au Parlement ? Ce sera sans les syndicats. 

L’opinion soutient les blocages et les grèves. Elle considère que le gouvernement provoque la radicalisation, de sa surdité face aux manifestations calmes, à l’expression claire et informée de l’opposition à la réforme. L’opinion ne va pas oublier et passer à autre chose. 

À qui profiterait le #retrait ? Clairement, aux syndicats. Les syndicats restent très légitimes pour représenter l'opposition des actifs à la réforme des retraites, comme l'explique cet article

Mais il vaut mieux concéder une victoire aux syndicats qu'au Rassemblement National, comme nous l'expliquions dans une note pour la Grance Conversation publiée la semaine dernière avec Paulus Wagner [Voir également cet entretien dans Mediapart]. Car sans retrait, la dynamique va clairement dans le sens de la montée du Rassemblement National. 

Avec le retrait, les travailleurs et les travailleuses auront le sentiment d’avoir été finalement entendus. Et le gouvernement, et Emmanuel Macron, pourraient regarder un peu de crédit s'ils parviennent à présenter le retrait ainsi. 

Emmanuel Macron a déjà reculé devant de nombreuses oppositions (reculs face aux gilets jaunes, la hausse de la CSG des retraités, la loi sur la limitation de vitesse à 80km/h sur les routes secondaires, une décision finalement laissée aux départements ; l'échec sur le glysphosate et les néonicotinoïdes). 

Après les Gilets Jaunes, Il a pu rebondir par le débat, alors que la force ne mène à rien.

En somme, un retrait suivi d'un débat sur les conditions et les relations de travail permettrait de sortir des blocages par le haut. Je montrais ici qu'à force d’être considéré exclusivement comme un coût – aux politiques économiques et aux stratégies des entreprises françaises –, le travail, sujet central de la réforme des retraites, s’est trouvé fortement dévalorisé et abîmé. Il est essentiel désormais de Parler du travail, c'est ce que les Français attendent.

À l'inverse, le 49.3 ne sera qu'une victoire à la Pyrrhus qui engluerait le quinquennat définitivement. 

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