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Billet de blog 1 juillet 2022

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Covid 19 en Chine: Chronique d'une catastrophe à venir

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Depuis quatre jours maintenant, Shanghai ne déplore plus de cas de transmission de Covd-19 local. Les habitants poussent un grand ouf de soulagement tandis que le leader du Parti, Li Qiang fraîchment confirmé dans ses fonctions se gargarise d'un confinement de deux mois "couronné de succès" et "justifié".

Pourtant, on peut se demander dans quelle mesure ce bilan et cette stratégie sont de réels succès. En effet, en Angleterre, le financial Times a estimé la léthalité du variant omircon à 0.04%, et estime que le covid qui était 19.5 fois plus léthal que le rhume saisonnier l'est désormais 10% de moins. En Chine, le despistage massif de la population shanghaienne (et donc la meilleure pris en compte dans les données statistiques des cas assymptomatiques) a permis de recenser 591 743 cas assymptomatiques pour les mois de Mars à Juin, et 58 000 cas symptomatiques, soit 649 743 cas au total. Ces statistiques compte certains cas deux fois (assymptomatiques devenus symptomatiques), mais permettent d'établir que le taux de léthalité d'omicronà Shanghai, est à minima de l'ordre de 0.09%, soit plus de deux fois plus élevé qu'en Angleterre, où toute chose étant égale par ailleurs, la population âgée (donc à risque) est proportionnelement plus nombreuse, et où le déspistage moins massif tend à tirer vers le haut le taux de léthalité (car les assymptomatiques sont moins souvent détectés).

Il ne fait donc aucun doute que les chances de survie en cas d'infection au covid, sont bien plus élevées en Angleterre qu'en Chine. 

L'une des raisons de cette différence de chance de vies (ou de mort), réside possiblement dans la politique vaccinale chinoise. Les résultats des tests menés au Brésil, bien avant l'apparition d'omicron, avaiten montré une faible efficacité du vaccin sinovac pour prévenir la mortalité chez les personnes âgées (Effectiveness of the CoronaVac vaccine in older adults during a gamma variant associated epidemic of covid-19 in Brazil: test negative case-control study | The BMJ). Plus exactement chez les 80 ans et plus, après deux doses, l'efficicaité du vaccin sinovac pour prévenir la mort n'était que de 44%.  Plus récemment, les études menées lors de la vague omicron à Hong Kong ( Vaccine effectiveness of two and three doses of BNT162b2 and CoronaVac against COVID-19 in Hong Kong (medrxiv.org) ont également démontré qu'à deux ou trois doses (sauf chez les plus de 80 ans...et là c'est tout à fait suprenant), le vaccin de Pfizer conférait une bien meilleure protection. C'est surtout sur la protection contre les formes modérées du virus que le vaccin sinovac était mauvais, n'offrant "aucune protection" selon les auteurs. A trois doses, le vaccin Sinovac restait performant contre la prévention des morts. Nulle doute dans ces conditions, que le système chinois serait rapidement submergé en cas de perte de contrôle des chaînes de contamination.

Par ailleurs, le problème pour les Shanghaien, tout comme pour les reste de la population chinoise, c'est que moins d'un tiers de la population a reçu la troisième dose, si crucial pour le vaccin Sinovac. De surcroît la campagne vaccinale chinoise d'abord concentré sur les jeunes, avant d'être ouverte beaucoup plus tard au plus de 60 ans, aboutie à une couverture vaccinale trés faible chez les individus à risque. Au mois de Mars 2022, avant que les données officielles rendues public se fassent trés rares, voire invisibles, seule la moitié des plus de 80 ans avaient reçu deux doses, et seulement 20% avant reçu leur booster. Rappelons que ces mêmes "plus de 80 ans", représentent les deux tiers des décès en France.

En cas de confinement manqué, à cause d'une campagne vaccinale dicutable et du refus d'innoculer les meilleurs vaccins sur le marché pour les personnes à risque, la Chine se retrouverait dans une situation de désastre sanitaire. Pire, l'avènement de se désastre ne tient qu'à un fil dans la mesure où le nouveau variant BA5 est plus transmissible (donc moins controlable), que la campagne vaccinale patine, et que le vaccin chinois spécifique pour omicron ne sera pas disponible avant le mois de septembre 2022 (selon les délcarations du gouvernement). 

Si on ne sait pour l'instant pas grand chose de l'efficacité du nouveau vaccin sinovac sur le variant BA.5, il est certain que la Chine se trouve littéralement au bord du précipice même si ce dernier s'averait efficace. Il faudrait en effet plusieurs mois pour vacciner en masse une population à risque jusqu'ici restée hors d'atteinte ou réticente. Cependant, aujourd'hui la priorité demeure un dépistage massif et couteux, soit une stratégie déjà qualifiée "d'insoutenable" par Zhong Nanshan, le responsable du centre de la gestion de la pandémie. Ce éminent chercheur, autrefois exibé sur toutes les chaînes de télévision est d'ailleurs aujourd'hui invisible dans les médias. Il s'agit là certainement du pire des signaux, puisque seuls les scientifiques et officiels "fidèles" à la stratégie de dynamique zéro covid ont désormais droit à la parole. Les autres sont devenus de fait, des ennemis discréditant la Chine et dissiminant les théories fausses venues d'occident.

Voilà donc la Chine ramenée à l'époque du Grand bon en avant, avec ses ennemis de l'intérieur et ses scientifiques obligés de reconnaître la supériorité de l'idéologie et du modèle chinois. Ceux qui ont une liberté de conscience s'éffacent au profit des loyaux serviteurs du régime, qui à l'instar de Li Qiang, le secrétaire du Parti de Shanghai, n'ont plus rien à craindre en cas de catastrophe, car la loyauté au leader suprême offre la meilleure des garanties de survie. Les autres devront endurés les confinements; les pertes de salaires( pour certains fonctionnaires obligés de se dévoués pour l'intérêt commun et donc le paiement des tests PCR), de revenus, d'espoir, de liberté, jusqu'à la prochaine réunion des 7000 cadres (réunion pendant laquelle Deng et Liu Shaoqi ont enterré la politique du grand bon en avant). Il avait fallu quatre ans et environ 40 millions de morts lors du grand bon en avant. Espérons qu'ils feront mieux cette fois.

D'ores et déjà, les ingrédients de la catastrophe sanitaire, humaine et économique sont  là. Alors que le leader suprême s'apprête à être officielement reconduit en novembre prochain, la Chine ressemble à l'homme qui se suicide en se jettant du cinquantième étage, se disant à lui-même, "jusqu'ici tout va bien" en attendant l'attérissage.

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