"le harcèlement policier, une gestion néolibérale de l'ordre racial" est le titre d'une sous-section d'un excellent article de Sylvie Laurent - agrégée d’histoire et docteur en littérature américaine, Chercheur associée à Harvard et Stanford, enseignante à Sciences Po - paru dans le n° d'oct-nov 2016 de "manière de voir" (Le Monde Diplomatique) et intitulé "Black Lives Matter, le renouveau militant".
Voici cet extrait (les mises en caractères gras sont de mon fait) :
"Black lives matter offre en effet une analyse globale de la société, réclamant comme Martin Luther King que ses fondamentaux soient repensés, à commencer par la logique du marché total. La police américaine, gérée en surface par les collectivités locales, est en réalité animée par une idéologie qui s’est emparée de toute la nation depuis les années 1970 et s’est exacerbée depuis le 11 septembre 2001 : la gestion néolibérale de l’ordre racial. Les forces de l’ordre déployées dans les ghettos et les communautés populaires apparaissent comme les agents d’une gestion managériale de la pauvreté qui dépasse de loin les préjudices individuels qu’ils causent. Ce que BLM a rendu public, et que bien des universitaires et activistes avaient également dénoncé, est que le harcèlement policier est une stratégie pensée d’adaptation aux politiques de rigueur budgétaire, en particulier à la baisse continue des impôts, qui prive les collectivités locales des moyens de fonctionner. L’extorsion des plus vulnérables par l’entremise de la police a donc été orchestrée. À Ferguson, la mort de Michael Brown a permis de révéler les motivations de la police locale dans son acharnement à distribuer contraventions et amendes arbitraires dans les quartiers noirs. Parce qu’elles n’ont guère les moyens de recourir à un avocat et qu’un refus de payer entraîne une convocation au tribunal, les familles noires sont une cible lucrative : ce racket légal représentait la deuxième source de revenu de la ville jusqu’en 2015. À elles seules, les infractions au code de la route (comme un clignotant cassé ou le fait de traverser en dehors des clous) constituaient 21 % du budget de Ferguson.
On ne sait ce qui — de sa critique des corruptions tacitement acceptées ou de l’enracinement d’un racisme dont la violence policière n’est que la pointe émergé — suscite le plus rapidement l’hostilité à l’égard de Black Lives Matter. Mais un contre-discours redoutable, plus actif aujourd’hui que jamais, s’élabore dès 2014 pour entraver son ascension. Les syndicats de la police furent les premiers à qualifier l’organisation de « raciste » et d’« anti-flics » ; nombre d’éditorialistes et d’élus lui opposent qu’il est absurde de clamer que les « vies noires » importent car, osent-ils affirmer sans scrupules, « toutes les vies comptent ». M. William Clinton a publiquement accusé les militants de défendre les gangs « qui vendent du crack » et « tuent des enfants noirs ». Impopulaire dans l’opinion, BLM est accusé de semer la division.
Quant au président Obama, toujours avide de concorde nationale, il est dépassé par la ferveur des activistes. Paradoxalement, sa plus grande victoire sur le champ de bataille racial, qu’il aura assez largement déserté, est précisément l’apparition de cette nouvelle génération de militants, résolue à déconstruire le grand mythe post-racial qu’il a suscité et à reprendre la lutte là où leurs aînés l’avaient laissée."
En France, qu'à fait le couple Valls-Hollande de la confiance accordée par les classes populaires (de moins en moins laborieueses malheureusement pour elles !!) : baisser de la DGF versées aux collectivités locales de 20% (41 Mds en 2012 à 33 Mds en 2016) en même temps qu'il distribuait les milliards aux entreprises via le CICE (48 Mds) et autres pacte "d'irresponsabilité" (41 Mds) SANS AUCUNE EFFICACITE sur la création d'emploi (https://www.mediapart.fr/journal/economie/190716/cice-un-cout-exorbitant-sans-creation-d-emploi?onglet=full). Par contre les actionnaires se goinfrent comme jamais : http://www.latribune.fr/entreprises-finance/banques-finance/industrie-financiere/en-france-les-dividendes-ont-bondi-de-plus-de-50-au-premier-trimestre-573324.html
Malheureusement, quand on jette un oeil aux programmes des candidats à la primaires de la droite, il ne faut pas être grand Grec pour comprendre que ce mouvement d'assèchement des ressources allouées aux collectivités territoriales va s'accélérer à vitesse grand V dans les années à venir avec des conséquences aisément prévisibles.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets : les départements peinent aujourd'hui à assumer le paiement du RSA du coup les pauvres deviennent suspects, la "chasse aux fraudeurs" est ouverte (http://www.francetvinfo.fr/societe/rsa-les-allocataires-sous-controle_1819305.html) en même temps que les usines continuent à fermer et que les actionnaires s'enrichissent...
Bref, la colère monte, les polices municpales sont armées, la vidéo surveillance déployée à grand renfort de pub destinée à rassurer le bourgeois. Pour info Nice est la ville la plus vidéo surveillée de France, c'est tellement vrai que rétrospectivement on a pu voir le camion meurtrier de 19 tonnes effectuer ses repérages tranquillou les jours précédents le massacre (jusqu'au matin du 14/07 !) alors même qu'il existe un arrêté municipale permanent interdisant aux poids lourds d'accéder au centre ville ! Etonnant non ? pas tant que cela car le maire de l'époque, un certain Estrosi Christian, avait justifié les réductions d’effectifs dans les forces de sécurité par le recours à cette vidéosurveillance : ainsi donc personne (ou pas assez) pour exploiter les belles images des 1400 caméras niçoises (http://www.slate.fr/story/121297/attentat-nice-tueur-interpelle-videosurveillance). Bilan : 86 morts et quelques semaines plus tard un arrêté... anti burkini !!!!!
Dernière victime en date de cette gestion "néolibérale de l'ordre racial" : Adama Traoré dont les révélations/contradictions/mensonges sur les circonstances de la mort (https://www.mediapart.fr/journal/france/220916/l-affaire-adama-traore-devient-un-scandale-judiciaire) ressemblent étonnamment à ce que vivent déjà les populations afro-américaines ghettoisées au risque de ce côté-ci de l'Atlantique de faire vaciller dangereusement la devise (slogan?) de la République : liberté, égalité, fraternité !
Et pendant ce temps là, les Zemmours et ses alter egos ex-gauchos apprentis réactionnaires alimentent "nos" media avec une petite musique déjà en vogue outre-atlantique : on nous abreuve de la rhétorique puante des "petits blancs" victimes de "racisme anti-blanc"... et maintenant la double peine pour les racisés VRAIES VICTIMES du système néolibéral liberticide et criminogène : ils seraient "communautaristes". Oui à écouter ces gens-là le seul vrai problème de ce pays c'est le "communautarisme" supposé volontaire des racisés de la République, alors même que celui-ci est en grande partie subi !
La boucle est bouclée :WHAT'S NEXT SIR ?? http://prisonvalley.arte.tv/?lang=fr
IL N'Y A PAS DE HASARD là dedans !
LES MEMES CAUSES PRODUISENT LES MEMES EFFETS !!
LE MAL QUI GANGRENE NOS SOCIETES EST LE NEOLIBERALISME !!! qui ne s'attaque pas à la racine du mal ne guérira pas le mal et le cancer gagnera du terrain inéluctablement jusqu'à l'implosion d'un système à bout de souffle. A moins que ne s'unissent les "indignés" de la Terre pour changer la donne avant qu'il ne soit trop tard... Martin Luther King en a rêvé pour l'Amérique, le combat reprend cinquante ans plus tard avec le mouvement BLM...