J'aimerais bien assister au grand soulèvement de mon pays, à la grande lame de fond qui foutrait en l'air tout ce qui déconne grave.
Mais je ne le verrai pas.
Parce que beaucoup trop de mes concitoyens n'ont aucune envie de cela.
Simple constat.
Les scandales, les pratiques inhumaines, aussitôt dénoncées font quelques remous et puis on passe à autre chose, à un autre scandale qui fait zapper celui d'avant. Et les gens continuent de souffrir et mourir dans l'indifférence.
Nous sommes divisés, éparpillés et blasés, en ce qui concerne les fameuses "forces de gauche". On n'en perd pas une pour se foutre sur la gueule.
De l'autre coté, les forces fascistes et ultra libérales sont unies, déterminées, prosélytes et efficaces. Comme toujours.
Les raisonnements fascisants se sont introduits partout : au travail, dans la famille, dans la rue, à l'hôpital, et la plus belle preuve en est le traitement que nous infligeons à nos personnes âgées, traitement digne des comptables nazis et de leur tri dactylographié avec soin.
Rien que ça devrait nous mettre en pétard complet. C'est mon cas et je passe pour une allumée.
Le fait est que si collectivement nous acceptons ces horreurs, nous accepterons beaucoup de choses, beaucoup de tris, beaucoup de listes de personnes indésirables, non rentables, non efficientes, trop comme ci ou pas assez comme ça.
Et c'est maintenant, là, aujourd'hui.
Si j'ai choisi très jeune une formation d'infirmière, ce n'est pas pour m'en tamponner le coquillard à mon âge. Je ne m'en fous pas. Je refuse d'être indifférente. Je ne partirai pas me la couler douce dans un autre pays. Je vais rester, me battre au quotidien, et advienne que pourra.
Mon point de vue est très simple : si nous perdons l'humanisme, nous perdons tout.
Alors bien sûr, pour paraphraser un anarchiste fort sympathique de Mediapart, il ne nous reste plus qu'à copuler, c'est gratos. Idée très alléchante mais pas nouvelle : quand les britanniques ont libéré le camp de Belsen en avril 45, ils ont constaté que toutes les détenues mourantes étaient enceintes.
Toutes ? Oui, toutes.
Les heureux pères étaient à l'agonie, dans leur diarrhée due au typhus.