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Billet de blog 30 janvier 2017

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La politique, affaire de dynamique

Depuis dimanche, quelque chose a changé. Est-ce suffisant ? Non. Est-ce insignifiant ? Non plus.

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J'entends depuis lundi matin celles et ceux que j'appellent les "verres à moitié vides" rappeler que Benoît Hamon est le candidat socialiste, qu'il appartient à un parti qui a voté la Loi travail, le CICE, proposé la déchéance et refusé de fermer Fessenheim ou de mettre en place le récépissé de contrôle au faciès. Ils et elles ont raison.

Mais ils et elles oublient que l'élection de Benoît Hamon hier est justement l'expression, par les électeurs et électrices de gauche, du refus de cette politique (anti)économique, (anti)sociale et (anti)écologique. Et que Benoît Hamon est automatiquement hier devenu l'incarnation de cette volonté de rompre avec le quinquennat.

Cette rupture arrive trop tard ? On peut le penser. Pour les milliers de salarié.e.s qui subissent déjà les conséquences de la loi travail. Pour les femmes salariées qui ont vu disparaître les outils de l'égalité professionnelle dans leur entreprise. Pour les millions de personnes au chômage qui ont assistés, désamparés, au cadeau de dizaines de milliards d'euros fait aux grandes entreprise sans créations d'emplois à la clé. Ces cinq ans ont été une catastrophe sur tous les plans. Ce quinquennat, au délà d'avoir abimé nos conditions de vie et de travail, laissera des traces politiques profondes. Il aura creusé la défiance entre nous et nos responsables politiques. Il aura accentué cette idée qu'au fond, quelque soit le bulletin de vote qu'on mette dans l'urne, les résultats sont les mêmes. Il aura enfin, en organisant ou en laissant exister des débats sur la déchéance de nationalité ou le burkini, préparé nos esprits au pire. Ils nous aura rendu moins résistant.e.s.

Bref, François Hollande, Manuel Valls et compagnie laisseront des traces qui iront bien au-delà de leur mandat.

Cette rupture est-elle pour autant neutre sur le plan politique ? Non. Elle crée un mouvement. Elle ouvre une fenêtre, un espoir. Elle permet de penser qu'il reste à gauche une majorité politique et sociale capable de dire non. Capable de déjouer les sondages, les appareils et d'exprimer une volonté de changement.

Cette primaire a été l'occasion de parler d'écologie et de protection sociale, malgré la volonté de Manuel Valls (et d'un certain nombre de commentato-journalistes) de ramener les débats sur le terrain de l'autorité ou de la religion. Elle a été l'outil dont se sont saisi plus d'un million de personnes, sans doute beaucoup dans le sillage de leur mobilisation contre la loi travail, pour dire "merde" au gouvernement.

"Chat echaudé craint l'eau froide" me direz-vous. Mais l'eau n'est plus aussi froide qu'il y a un mois. La dynamique politique créée par l'élimination de Valls suffira-t-elle à créer une majorité politique de gauche, écologiste, radicalement du côté de celles et ceux qui ne détiennent ni l'argent ni le pouvoir ? Je n'en suis pas sûre. Mais c'est plus probable aujourd'hui que la semaine dernière.

La politique, c'est avant tout une question de dynamiques. Et c'est une question de rapport de forces. Depuis dimanche, le rapport de force est (un tout petit peu plus) en faveur de la gauche dans ce pays. Et c'est bien. Mon premier engagement a été syndical. On m'a toujours appris à souligner les avancées, même petites, car elles servaient de point d'appui pour les luttes à venir.

La dynamique créée par l'élection de Benoît Hamon est de ces points d'appui. Entre l'écarter d'un revers de main méprisant ou choisir de m'appuyer dessus pour préparer une transformation de la société, je choisis la deuxième option.

Je reste convaincue qu'entre les personnes qui ont voté Benoît Hamon dimanche, celles qui soutiennent Yannick Jadot ou celles qui s'engagent dans la France insoumise, nous pouvons porter un projet politique majoritaire dans ce pays. Nous ne sommes pas d'accord sur tout. La belle affaire. Est-ce que les communistes et les socialistes l'étaient en 1981 quand ils ont aboli la peine de mort, établit les 39 heures, augmenté le SMIC ? Est-ce que Jean-Luc Mélenchon était d'accord avec Lionel Jospin quand il a été son ministre et que le dirigeant socialiste a reculé, quelques semaines après son élection sur le pacte de stabilité européen (oui, ça vous rappelle quelque chose) ? Non. Ils n'étaient pas d'accord. Ils ont estimé qu'ils partageaient suffisamment pour avancer ensemble.

Je ne suis pas d'accord avec toutes les propositions de Benoît Hamon ou de Yannick Jadot. Le revenu universel par exemple me semble un paravent dangereux pour éviter de parler de la protection sociale, des retraites et de l'assurance chômage. Je suis frustrée que les frondeurs n'aient pas eu le courage de déposer et de voter une motion de censure suite à la mobilisation contre la Loi travail. Je ne suis pas d'accord avec la façon dont Jean-Luc Mélenchon pratique la politique. Je ressens dans ses billets, ses prises de parole, une forme de violence politique qui me fait peur.

Ces éléments sont-ils négligeables ? Non. Sont-ils suffisants pour nous empêcher de nous mettre autour d'une table et d'essayer de construire ensemble une force politique, sociale, écologique et démocratique permettant enfin d'envisager qu'on passe à la 6ème République ? Non plus.

C'est pour cela que j'ai relayé la pétition lancée par des citoyen.ne.s sur Change appelant les 3 dirigeants à se voir rapidement (voir la pétition ici).

Caroline De Haas, militante féministe

NB : je ne lis pas les commentaires des trolls, ne vous fatiguez pas ! #bisous

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