Sur sa surface, tout se dérègle, elle ne se reconnaît plus.
Les océans qui faisaient sa fierté, se couvrent de déchets, se réchauffent, détruisent petit à petit le monde vivant qui y habite et ils ne peuvent plus assumer l’équilibre entre l’oxygène et l’oxyde de carbone.
L’atmosphère qui la protège est envahie de produits toxiques et se dérègle avec des températures inédites.
Impuissante, elle est malmenée par des tempêtes, des cyclones qui inondent et détruisent des terres pendant que d’autres connaissent la sécheresse et voient fuir leurs habitants.
Les immenses forêts qui apportent l’oxygène indispensable à la vie se réduisent partout.
Fière des milliers d’espèces vivantes qu’elle porte, elle assiste avec désespoir à leur disparition en chaîne.
Où qu’elle porte son regard, la Terre ne voit plus que des constructions humaines. Ce ne sont pas le village, le sentier, le potager, le petit champ de blé… qui la perturbent. Ce sont les villes gigantesques et ses artères routières qui empoisonnent et asphyxient, ce sont les zones industrielles et commerciales qui détruisent arbres et sols, ce sont les champs à perte de vue qui remplacent la végétation et exterminent son monde vivant, ce sont des zones touristiques qui piétinent le littoral, ce sont les milliers de navires et d’avions qui sillonnent les mers et le ciel…
Et quand la Terre pose son regard sur les humains, elle pleure quand elle voit des hommes, des femmes et des enfants mourir de faim, quand elle suit ceux et celles qui fuient dans le désert et sur les mers la monstruosité de leurs semblables. Elle souffre quand elle voit des armées détruire des villes entières pour enrichir davantage les dirigeants de leur pays, elle rage quand elle voit des êtres humains tuer pour une idéologie, une religion.
Devant toutes les inégalités économiques, politiques, géographiques, la Terre observe l’attitude des êtres humains qui vivent dans de bonnes conditions, elle ne comprend pas leur détachement, leur insensibilité, leur indifférence, voire leur mépris envers les pauvres, les SDF, les migrants… qu’ils soient adultes ou enfants. Elle est inquiète, car elle sait que plus elle se dérèglera, plus il y aura des humains en migration. Si l’individualisme et les peurs des nantis perdurent envers l’autre, l’étranger, elle redoute les massacres humains à venir, les guerres, les camps, les exterminations…
La Terre pense que les humains se détruiront avec leurs armes chimiques et nucléaires avant qu’elle ne soit totalement défigurée. Alors, elle se met à espérer des survivants humains, animaux et végétaux pour l’aider reconstruire et à continuer d’être une petite planète bleue et ne pas devenir une planète rouge.
Ne laissons pas la Terre seule s’inquiéter !
Conjuguons « s’inquiéter » à tous les temps et à tous les modes.
N’attendons pas qu’on nous inquiète !
– Les bulletins météorologiques envahissent les médias, sans nous alerter.
– Les catastrophes « naturelles » de plus en plus fréquentes occupent les journaux télévisés sans nous questionner.
– Le déclin du nombre d’espèces animales n’alerte que quelques personnalités.
– Le constat de la destruction des abeilles est à peine évoqué (il ne faut pas fâcher les gros agriculteurs en accusant les engrais et pesticides).
– L’augmentation de maladies dues à l’exposition aux produits chimiques est déniée.
– Les États signataires de la COP 21 reculent sur les mesures à prendre. Il n'y a pas d'urgence, on repousse... pour satisfaire les intérêts politiques et financiers de quelques-uns : la croissance à tout prix !
L’éducation, la formation, la mutualisation des informations et des connaissances… sont les meilleurs antidotes à l’aveuglement des adultes et des enfants.
Pour que la Terre reste bleue, c’est dès aujourd’hui qu’il faut s’inquiéter et inquiéter, car il ne reste pas beaucoup d’années pour inverser la courbe et ne pas sombrer dans l’irréversible.