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Billet de blog 9 juin 2016

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Le temps des cerises

Pour les 80 ans de la victoire du Front populaire, si les oiseaux siffleurs et chanteurs sont au rendez-vous, si les arbres fruitiers bourgeonnent et les fleurs parfument les jardins, la joie du peuple de France n’est pas au rendez-vous.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

C’est à cause de la météo ? Non, même si la colère climatique a déchaîné des pluies diluviennes, fait sortir les eaux de leur lit, mis à la rue un grand nombre de familles et rendu difficiles les déplacements.

Alors que se passe-t-il ? C’est une accumulation, une conjonction d’événements qui irriguent notre quotidien. Elles sont là devant nous tous les jours, autour de nous souvent, avec nous parfois.

La misère nous entoure, il y a celle qu’on voit et celle qu’on devine et pressent.

Nos regards ne peuvent éviter les personnes vivant dans la rue : celles qui dorment sur les trottoirs avec leurs jeunes enfants blottis contre elles, celles qui tendent un gobelet à la sortie d’un commerce, celles qui crient leur détresse dans la rame d’un métro en s’excusant du dérangement, celles qui chantent ou jouent d’un instrument en espérant quelques centimes d’euros…

L’État d’urgence nous entoure, la peur est entretenue.

Nos regards ne peuvent éviter, les patrouilles de militaires mitraillettes en main et celles des différentes polices qu’elles soient nationales, municipales ou ferroviaires.

Nos oreilles ne peuvent se fermer aux messages de vigilance qui se succèdent dans les gares ou sur les quais ou aux sirènes de la police qui se mettent en route pour un rien.

Nos sacs ne peuvent se soustraire aux fouilles pour entrer dans un monument, un bâtiment public, un supermarché…

Le mouvement social nous entoure, sa déformation est quotidienne

Nos yeux, nos oreilles et notre cerveau sont soumis aux informations qui nous enferment sur quelques sujets et leur traitement :

- Les défenseurs de la Loi travail présentent ses contestataires comme des immatures, des égoïstes, des rétrogrades qui ne comprennent pas les enjeux de progrès qu’elle contient. Des sondages positifs sont publiés.

- Le 49-3 était une nécessité démocratique pour le pays.

- L’exécutif est valeureux et travaille beaucoup, il a apporté de nombreuses modifications à la Loi travail.

- Les syndicats dits « réformistes » ont tout compris, ils négocient, les autres dits « radicaux » veulent nuire à la France.

- Les grèves n’ont aucun sens, elles sont la volonté d’une minorité gauchiste avec des cheminots qui mettent en « otages » – terme décrié, mais utilisé par certains députés – la population et les entreprises.

- Les mobilisations et les rassemblements sont dévalorisés, stigmatisés par la narration journalistique qui se centre sur les casseurs et leurs violences, rarement celles de la police.

- « Nuit debout » après avoir été moquée et montrée comme une expression de jeunes et moins jeunes « bobos » n’attire plus les médias nationaux. 

- Le football et ses excès langagiers ou financiers s’incrustent, sans oublier l’Euro 2016 menacé par le mouvement social et les magnifiques « fanzones », véritable prouesse de sécurité !

Le mouvement social nous entoure, heureusement les réseaux sociaux nous informent

Sur les violences policières envers les jeunes et les journalistes, les pourquoi des grèves, ce que contient la Loi travail, sur les comportements de nos élus, des ministres et leurs phrases assassines, les rassemblements, les espaces de démocratie participative, etc.

Ces informations permettent une meilleure compréhension de la situation sociale et de ce qui se perçoit au quotidien. Notamment, les soi-disant « otages » des grèves conservent leur sérénité et montrent leur humanité dans les transports, ils sont certes fatigués, mais ne condamnent pas le mouvement, même si quelques-uns ont pu trouver un micro ou une caméra compréhensive et intéressée pour se plaindre. 

Pour les 80 ans de la victoire du Front populaire, le peuple en joie n’est pas au rendez vous, certes, mais son cœur bat au sein d’un mouvement populaire qui s’exprime et se développe un peu plus chaque jour.  

Quand nous chanterons le temps des cerises, toutes aussi belles et diverses, des plus rouges au plus roses... espérons que nous aurons beaucoup plus que leurs queues à déguster !

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