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Billet de blog 9 août 2008

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Une circulaire de rentrée pas si anodine

Le nouveau cru de la circulaire de rentrée vient d’arriver, un cru aux adjectifs pompeux mais aux saveurs fades et conservatrices porté par un budget réduit

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le nouveau cru de la circulaire de rentrée vient d’arriver, un cru aux adjectifs pompeux mais aux saveurs fades et conservatrices porté par un budget réduit : il convient de …. prendre des mesures nouvellesdans la mesure du possible.

Mais surtout de lourdes orientations politiques : le désengagement de l’Etat et l’atteinte au principe de la scolarité obligatoire commune.

Une confirmation : recentrer sur les fondamentaux et évaluer les performances

Des programmes nouveaux, lisibles, compréhensibles, respectueux de la liberté pédagogique en lien avec la responsabilité accrue des enseignants. Une liberté pédagogiqueconditionnelleau regard des progrès réalisés par les élèves.

Des évaluations régulières et précises dont les résultats seront communiqués aux familles qui pourront mieux suivre les progrèsde leurs enfants … et les résultats de leur école.

On ajouteau primaire et au collège l’enseignement de l’histoire de l’art mais pour la pratique artistiqueil est fortement conseillé de développer les partenariats. A l’école, les dates et la méthodologie, le quantifiable et le mesurable, et les pratiques artistiques, le créatif et l’expressif,seront externalisés.

Une volonté politique

L’ambition éducative de l’école publique se réduit comme peau de chagrin, réduite à la transmission de savoirs simples et mécaniques pour tous, elle laisse à la responsabilité privée l’appropriation de savoirs complexes et culturels, chacun pour soi et chez soi !

Le désengagement de l’Etat y est dévoilé sans complexe, l’accompagnement éducatif (aide aux devoirs, pratique artistique et culturelle, pratique sportive)sera confié à l’initiative des municipalités et le soutien (deux heures hebdomadaires et stages de vacances) seraorganisé hors des horaires scolaires obligatoires.

Dans les zones d’éducation prioritaire on trouve et retrouve de belles formules Espoir Banlieues, sites d’excellence,banque de stages, réseaux ambition réussite et réussite scolaire. avec comme souci prioritaire de capter les meilleurs, les plus méritants d’abord dans 30 sites d’excellence aux lycées à filières d’excellence artistiques et culturelles puis les5% meilleurs d’entre euxseront accueillis dans les lycées renommés hors zone prioritaire …

Pour montrer un peu de volonté de mixité sociale, on trouve également le déplacement de classes primaires (busing) vers les écoles de centre ville, mais pas l’inverse !

Le socle commun pour qui ? Ne devrait-il pas être commun à tous les jeunes à la fin de la scolarité obligatoire ?

La circulaire rappelle que tout jeune doit atteindre au moins une certification deniveau V (CAP/BEP)[1],ce niveau permettra-t-ilà tous ces jeunes d’acquérir les connaissances et les compétences du Socle commun ?

Dès le collège des jeunes volontaires pourront rejoindre un nouveau dispositif d’initiation aux métiers en alternance (DIMA), … parune formation en alternance d’une année scolaire, tout en poursuivant l’acquisition du socle commun de connaissances et de compétences ? Il faut espérer que ces élèves volontaires désireux de découvrir un métieraient déjà de bonnes connaissances carils devront acquérir les mêmes compétences que leurs camarades en moitié moins de temps !

Mais on sait bien que les jeunes volontaires seront guidés par leurs résultats scolaires et qu’ils n’atteindront jamais les compétences attendues ! Combien sortiront du circuit scolaire après cette alternance sans aucune qualification ?

Ceux qui ont quand même quelques connaissances, même fragiles rejoindront le lycée professionnel. Lesélèvesadmis dans lessections de Bac pro continueront sans doute l’acquisition des connaissances et compétences du Socle commun, mais en trois ans au lieu de quatre,combien de jeunes seront-ils alors relégués ?Tout est prévu, ils rejoindront lesélèves les plus fragiles déjà orientés après le collège pour préparer en deux ansun CAP/BEP.Pour eux c’est fini ils n’auront jamaisles connaissances et compétences attendues.

Mais ce fameux Socle commun ne serait-il pas réservé aux seuls bacheliers et détenteurs de diplômes universitaires ?

Les nouveaux programmes, les mesures de cette circulaire ont été établis en acceptant qu’une partie des jeunes soit exclue d’un avenir professionnel et personnel. Ils ne sont que les instruments d’une politique éducative, passéiste et élitiste qui trient et séparent les jeunes dès le primaire.

Militants de l’éducation nouvelle et populaire, pédagogues du Premier et du Second degré, gardons notre ambition d’éducation émancipatrice pour tous les jeunes, usons et abusons de la liberté pédagogique inscrite dans la loi et refusons de participer à cette régression.

[1] Le service public de l’orientation s’inscrit dans des objectifs de politique publique clairement affirmés : tout jeune doit atteindre au moins une certification de niveau V, 80 % le niveau du baccalauréat et 50 % obtenir un diplôme de l’enseignement supérieur.

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