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Billet de blog 18 décembre 2015

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Avenir de la République ?

La Constitution du 4 octobre 1958 devrait être relue plus souvent. En particulier l'article 2. Ce que je viens de faire !

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« La langue de la République est le français.
L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge.
L’hymne national est la “Marseillaise”.
La devise de la République est “Liberté, Égalité, Fraternité”.   
Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. »
Si les trois premières affirmations paraissent évidentes, les deux dernières le sont beaucoup moins.  

 La devise de la République « Liberté, Égalité, Fraternité » 
Elle est écrite sur les frontons de nos bâtiments publics, certes. Tous les citoyens la connaissent par cœur, mais que représente-t-elle pour eux ?
La liberté 
Selon sa place dans la société, la liberté s’exerce différemment. Pour les plus riches, la liberté se confond avec le libéralisme, les limites et les contraintes s’éloignent proportionnellement avec la taille de leur capital. Ils sont peu nombreux, mais ont besoin de tous les autres citoyens pour prospérer et ils veillent particulièrement à leur liberté de consommer... Et pour les autres ?
 La liberté de conscience, la liberté d’expression, la liberté de circulation, la liberté de savoir... sont-elles possibles quand les exclusions économiques et sociales d’un nombre croissant de familles assignent celles-ci à résidence géographique et culturelle dans les cités, dans les quartiers où les seuls espaces de rencontres sont les grandes surfaces et les centres commerciaux ?
L’égalité
Toutes les composantes de la population ne jouissent pas concrètement de la possibilité de vivre dans la société française à égalité de droits : santé, logement, travail, éducation…
La « liberté » des libéraux s’impose dans la distribution des droits aux citoyens :
– la médecine libérale choisit ses territoires d’exercice et créée des déserts médicaux, les hôpitaux publics se privatisent, l’industrie pharmaceutique a tout pouvoir sur les médicaments, etc.
– la rareté du logement est gérée par les industriels du bâtiment, la construction sociale est toujours remise à plus tard même avec les quotas, les aides au logement pour les plus précaires se réduisent, etc.
– l’embauche et l’investissement humain dans les entreprises passent après la rémunération des actionnaires, les délocalisations sont privilégiées avec son lot de licenciements, etc.
– quant à l’Éducation : quelle égalité à l’école quand le système éducatif ignore tant d’enfants et de jeunes : filières non valorisées, orientation subie, décrochage, sortie du système éducatif sans diplôme, etc.
La fraternité
Pas celle entre soi, dans la même famille, dans la même classe, dans la même équipe, dans la même entreprise, mais la fraternité entre tous les humains, indispensable pour l’existence de la mixité, de la diversité, de la laïcité. La liberté et à l’égalité se diluent jusqu’à disparaître si elles sont cloisonnées (classes sociales, religions, genre, origines géographiques…)
La fraternité ne peut se satisfaire des remises en cause des systèmes de solidarité au profit des ressources individuelles et du recours à la charité pour les plus pauvres.
La fraternité ne peut se satisfaire de la compétition entre les familles, les travailleurs, les élèves, les origines sociales et géographiques… entre les pays, les régions, les villes, les quartiers, les écoles.
« Liberté, égalité, fraternité » se nourrissent les unes des autres, se vivent et s’exercent ensemble.
La liberté sans la fraternité, c’est le chacun pour soi, le repli identitaire.
La liberté sans l’égalité, c’est la confisquer pour ceux qui ont la richesse, le pouvoir.
La fraternité sans l’égalité, c’est le retour des castes, des classes, des privilèges de naissance.
La fraternité sans la liberté et l’égalité, c’est mettre de côte la société et la congédier.
Ces distorsions provoquent de l’humiliation, du ressentiment, de la défiance, de la xénophobie, voire du racisme et de la haine.

Quant au principe : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple »…
Le président, les députés, les maires sont élus « par le peuple ». Mais ils oublient très vite qu’ils gouvernent, décrètent, légifèrent « pour le peuple ». La plupart exercent leur mandat contre la majorité ou contre l’opposition, pour un parti politique, en vue des prochaines élections pour conserver ou obtenir un siège… bref l’intérêt général, le bien commun sont vite oubliés.
Donc le peuple ne gouverne pas – sans parler du peuple déçu qui ne vote plus – et les élus ne gouvernent guère pour lui.
La République, et pas n’importe laquelle, celle qui est « indivisible, laïque, démocratique et sociale » (art. 1 de la Constitution) doit se ressaisir, sinon elle se dénaturera, puis disparaîtra.
C’est de la responsabilité de ceux qui gouvernent et c’est ce qui est justement problématique. Les dernières élections ne semblent pas avoir ouvert les yeux aux représentants du peuple.
La devise de la République ne peut vivre dans un État d’urgence !
Et sans elle… l’autoritarisme, l’identitarisme et le sécuritarisme recouvriront d’un voile sombre Marianne et sa devise. 

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