Catotep

Abonné·e de Mediapart

1 Billets

1 Éditions

Billet de blog 9 mai 2011

Catotep

Abonné·e de Mediapart

Le droit du sperme

Catotep

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Mon crime c'est d'être une maman. Pas un Père avec un grand P, mais une mère avec un tout petit m.

Voici presque 4 ans et demi que j'aimis au monde, et j'élève un petit garçon. J'ai rencontré son pèreet je suis rapidement tombée enceinte, charmée par de jolis motsvains. Et le prince s'est transformé en odieux personnage,égocentré, haineux, et n'assumant aucune de ses responsabilités matérielles ou morales. J'ai porté cet enfant seule, sans soutien.Mon ex-compagnon a fait une crise de nerfs à la maternité, comme ilen avait l'habitude, le personnel soignant s'est inquiété: »Comment est-ce que vous allez faire rentrée chez vous?».

Comme toutes les femmes sous emprise,et diminuées, je l'ai excusé tant de fois, tenté de le fairesoigner, mais je n'ai pas trouvé d'oreille attentive. Il s'agissait sans doute de banales disputes que je transformais en crise de démence. Monsieur était, il est toujours excellent acteur, le meilleur qui soit. Personne ne me croyait.

Il a commencé à me frapper, j'ai porté plainte la deuxième fois. Epuisée, m'occupant d'un bébé de quelques mois, je cédais à l'officier de police judiciaire, qui se cachant derrière des connaissances psychologiques plus qu'approximatives, me proposa fortement la médiation.

Là, ce fut pire. Menaces de mort quotidiennes, humiliations, je me suis retrouvée avec un cutter sur la gorge, il fallait que je retire ma plainte, seule la présence du bébé l'empêchait de me frapper plus souvent encore.

Maintenant, je ne comprends pas commentdes violences conjugales sur la mère d'un bébé de trois mois peuvent passer dans l'esprit de policiers, ou d'un médiateur, pour un simple dérapage?

Après un an de torture,séquestrations, insultes, menaces, entre ses crises de fureur suivies de crises de larmes, j'ai enfin réussi, presqu'anéantie et ruinée financièrement, à m'échapper. J'ai porté plainte à nouveau, avec la promesse de quitter le domicile conjugale, monsieurs'en est tiré avec un rappel à la loi. Il n'est jamais parti, je me suis enfuie avec cinq euros en poche, il m'avait pris tout le reste.

J'ai trouvé un refuge bien relatif dans ma famille, patriarcale il va sans dire, où ma parole ne fut jamais reconnue, puis j'ai pris un nouvel envol.

J'ai reconstruit ma vie, j'ai redécouvert le bonheur de se sentir vivante, je suis tombée amoureuse d'un homme merveilleux avec qui je partage ma vie. Ils'occupe de mon fils depuis qu'il a 20 mois, nous avons une petite fille, c'est un père formidable qui ne fait pas de différence entre mes deux enfants.

En ce qui concerne la garde de mon fils, les juges ont refusé de prendre en considération le comportement de dément de mon ancien compagnon, malgré des témoignages, comme celui d'un de ses nombreux anciens employeurs,par exemple. J'ai régulièrement à faire avec les services de polices, où je passe à chaque fois pour une mère hystérique...

Mon ex-compagnon ne s'est pas arrangé,au contraire, pendant les week end, ou les vacances, il a traîné mon fils de maisons en maisons où il réussissait à se faire héberger avec à chaque fois des ruptures violentes, quand son hôte se rendait compte de sa dangerosité et le mettait à la porte. Mon fils en revenait en miettes, mais pas de quoi faire constater par un médecin, qui sont de plus extrêmement frileux concernant les histoires de parents séparés. Mon petit bout est un laisser passer en or pour un pauvre papa qui « galère », et monsieur a ainsi déménagé sept fois en un an.

La dernière crise de mon ex remonte à lundi dernier, il voulait une fois de plus trimballer mon fils en l'emmenant je ne sais où (car il n'a plus du tout d'adresse) et en le ramenant quand il en aurait envie; il s'est présenté en retard, je lui ai donc refusé. Mais qui était le fautif, le pauvre papa éploré à qui on refusait son enfant, ou la vilaine mère qui assure son éducation, son entretien et son bien-être depuis sa naissance?

Monsieur a fait intervenir une brigade de police qui n'a pas voulu lire le jugement, mais qui affirmait dur comme fer que j'étais en tord, et que ça finirait mal pour moi, que j'avais intérêt à me présenter devant le capitaine pour régler« l'affaire » ou bien il m'en cuirait (sous-entendu fortement la garde à vue vous pend au nez). Monsieur le policier avait l'habitude, pas besoin de lire le jugement, moi femelle sans cervelle, je confondais droit et obligation, bien sûr. J'ai tenu bon. Mon compagnon a pris une journée en prévision de ma garde à vue éventuelle. Je suis allée de moi-même au poste où j'ai été accueillie par une charmante femme qui m'a demandée inquiète où était mon fils, et a répondu à son supérieur au téléphone que mon fils était -je cite- « avec son nouveau copain »!Ha, ses mères célibataires présumées, toutes des Marie-couche-toi-là irresponsables! Bien sûr mon calvaire,j'entends par là l'injection à fortes doses de préjugés idiots et misogynes, n'était pas fini.

Devant l'officier de police judiciaire,j'ai du insister trois fois pour qu'elle daigne lire la phrase concernant le point précis en entier, où j'ai bien senti que j'étais à deux doigts de l'outrage, et quand enfin elle a eu fini et compris que j'étais dans mon droit et qu'on m'avait accusée à tords depuis le matin, bien sûr je n'ai eu aucune excuse! Si, j'ai quand même eu droit à un petit « Vous savez, madame l'enfant n'appartient pas qu'à la mère! ». Comme si mon fils était un objet, et que comme toute bonne mère hystérique, je ne voulais pas partager mon jouet.

Pour la police française, pour le droit français, on est ce qu'on prétend être, enfin, quand on est un homme! Un Père s'est toujours une pauvre victime même lorsqu'il cogne la mère de l'enfant, ne paie pas sa pension alimentaire,change de toit et de boulot tous les trois mois, passe son temps de visite à démolir l'image de son foyer auprès de l'enfant, et une mère, une femme, s'est toujours ou une pauvre fille un peu cas social (sinon, elle ne serait pas dans cette situation), ou une névrosée surproctectrice.

A moi de ressaisir la justice pour la troisième fois en « espérant » que l'on acceptera de m'entendre et de faire ordonner une expertise psychiatrique pour le moins. Mais d'espoir, j'en n'ai plus quand je vois comment on me traite et comment on dévalue ma parole depuis maintenant presque cinq ans, tout ça parce que je suis une femme. Alors, c'est très joli de « taper » sur les musulmans qui voilent leur femme, mais si on regardait chez soi d'abord, et si on entendait toutes ses femmes qui hurlent la souffrance de leurs enfants... On assume pas un enfant seule par plaisir, mais parce qu'on n'a pas lechoix. Moi, depuis tout ça, je sais que je vis dans le pays du« droit du sperme », pas de l'homme, encore moins de la femme, et de l'enfant.

Catherine.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.