Sortie DVD : Délicieux d’Éric Besnard
Sous la vraie fausse histoire du personnage fictif du cuisinier Pierre Manceron, se trouve le désir de la part d’Éric Besnard de mettre en valeur un trésor de la culture française sous la forme d’un récit mythologique : l’art de la gastronomie et du plaisir partagé de la table avec la naissance des premiers restaurants à la veille de la Révolution française. L’association des deux grands traits de la francitude pourrait apparaître un peu indigeste si elle n’était pas servie par l’interprétation subtile d’acteurs aussi pertinents que brillants autour du trio Grégory Gadebois, Isabelle Carré et Benjamin Lavernhe.

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Le plaisir de la table et de l’art de façonner une belle assiette dans des gestes émouvants de manipulations de la pâte comme des légumes qui jonglent amoureusement entre les mains du cuisiner s’inscrit à la fois dans la tradition cinématographique inscrite durablement avec Le Festin de Babette (Babettes Gæstebud, 1987) de Gabriel Axel mais aussi dans la large influence de la peinture des natures mortes éclairées avec une aura enchanteresse. Contrairement à la vérité historique qui voit l’invention de l’art gastronomique à la française et la convivialité des restaurants au Palais Royal à Paris, Éric Besnard préfère rendre hommage à des racines rurales, plus proches de là où les ingrédients du maître ès cuisines apparaissent au rythme des saisons.
La philosophie prônée ici met en valeur le retour au goût de chaque aliment mais aussi de la découverte de nouvelles racines comme la pomme de terre alors encore mal aimée de la majeure partie de la population.
Tout en reconnaissant l’influence de la noblesse dans l’histoire de la cuisine à la française, Éric Besnard veut ici marquer la modernité de l’esprit démocratique qui va dès lors révolutionner durablement l’économie de la restauration à la française. Le film doit beaucoup également à la magnifique image du chef opérateur Jean-Marie Dreujou qui sait glisser à plusieurs moments ses inspirations picturales des natures mortes du XVIIIe siècle en France, tout comme la lumière naturelle et le cadre champêtre magnifié.
En revanche, le scénario est écrit sans originalité aucune et frôle souvent la paresse à la fois dans l’intrigue au plus bas et un dénouement qui n’a rien de révolutionnaire en s’inscrivant dans la tradition mille fois narrée des success story made in USA.
Ce film s’inscrit aussi dans un retour dans les fictions françaises récentes aux valeurs simples et identitaires à une certaine France, prises entre l’héritage de la noblesse dépassée et le renouveau démocratique plus populaire comme il en était également question dans La Fine fleur (2021) de Pierre Pinaud avec Catherine Frot dans le rôle principal.
Délicieux
d’Éric Besnard
Avec : Grégory Gadebois (Pierre Manceron), Isabelle Carré (Louise / marquise de la Varennes), Benjamin Lavernhe (le duc de Chamfort), Guillaume de Tonquédec (Hyacinthe, l'intendant du duc), Lorenzo Lefèbvre (Benjamin Manceron), Christian Bouillette (Jacob), Marie-Julie Baup (la marquise de Saint-Genet), Jérémy Lopez (le marquis de Fourvière), Antoine Gouy (le marquis du Croisic), Manon Combes (Francine), Laurent Bateau (Dumortier), Gilles Privat (l'évêque), Christophe Rossignon (le laquais aux chandelles), Félix Fournier (le commis qui met de la cannelle), François de Brauer (le marquis Frigoli), Benjamin Lhommas (le marquis des Essais), Chloé Astor (une maîtresse du duc), Louise Rossignon (la première marquise), Maxime Mansion (l'ami de Dumortier)
France, Belgique, 2021.
Durée : 107 min
Sortie en salles (France) : 8 septembre 2021
Sortie France du DVD : 12 janvier 2022
Format : 2,39 – Couleur
Langue : français.
Éditeur : M6 Vidéo
