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Billet de blog 8 décembre 2024

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FIFE 2024 : "Bird" d'Andrea Arnold

Dans le Kent, Bailey, 12 ans, survit au quotidien auprès de son jeune père et de son frère, tandis que ses jeunes sœurs dont elle garde une attention soutenue, vivent auprès de leur mère et d'un beau-père toxique. Un jour, la rencontre inopinée et surnaturelle de Bird l'amène sur d'autres chemins.

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Illustration 1
Bird d'Andrea Arnold © Ad Vitam

Film en compétition long métrage fiction de la 20e édition du Festival International du Film d'Éducation d'Évreux du 3 au 7 décembre 2024 : Bird d'Andrea Arnold

Au sein d'une compétition réunissant neuf longs métrages de fiction de la 20e édition du Festival International du Film d'Éducation d'Évreux, le jury pétillant de spontanéité à interroger les œuvres filmiques et d'une chaleureuse humanité composé de la présidente Marine Place, Cécilia Le Quang, Basma El Hijri, Claude Véron, Andrés Atenza et Cédric Lépine, a choisi de déclarer son coup de cœur à l'unanimité en attribuant le prix du meilleur film à Bird (2024) d'Andrea Arnold.

La cinéaste réunit une fois encore dans son nouveau film une prodigieuse ambition dans ce dialogue nourri autour d'une mise en scène au service des sujets qu'elle traite avec une pertinence aussi subtile que profonde. Au plus près de la jeune protagoniste, Andrea Arnold trouve en elle les ressources pour construire sa mise en scène sur sa subjectivité teintée d'onirisme d'où surgit le fantastique qui a pour nom éponyme Bird, interprété par Franz Rogowski en personnage queer à la frontière entre monde humain et le surnaturel, tout en épousant la vulnérabilité humaine.

En marge de la société, Bailey vit dans un squat dans une ambiance post-apocalyptique issue du rouleau compresseur de l'idéologie néolibérale au Royaume-Uni où les politiques sociales ont délaissé toute une partie de la société. L'absence des institutions publiques et notamment du service public à travers tout le film, qu'il s'agisse de l'école, des élus locaux, des représentants de l'ordre, etc. conduit notamment un groupe d'adolescents à se faire justice eux-mêmes sur des adultes éminemment toxiques tandis que les ressorts de l'économie informelle reste l'outil dérisoire pour accéder à un rêve : la consécration d'un nouveau cadre familial et d'une communauté par le mariage. Ainsi, d'un crapaud on n'attend plus ici une princesse ou un prince charmant mais les moyens d'accéder à la mise en scène de l'intégration sociale par le mariage.

Quant à Bailey, dans sa détresse affective et économique face à des parents dépassés par leurs affaires respectives, la bonne fée ou marraine prend les traits d'un jeune homme mystérieux apparaissant dans un champ comme par magie à la suite d'une manifestation météorologique inattendue.

L'apparition du fantastique se fait par petites touches et n'est jamais un enjeu en soit, Andrea Arnold plaçant au cœur de son intrigue et de sa mise en scène la construction de ses multiples personnages dont aucun n'est rétrogradé au rôle de figuration ou de faire-valoir. Tout s'explique avec la place centrale de Bailey dont le sens de l'observation tel un alter ego, construit ses propres récits en filmant et projetant son regard. La cinéaste bénéficie encore de l'étroite collaboration avec le chef opérateur Robbie Ryan avec qui elle œuvre depuis ses débuts. L'invention est continue, du split screen à la fragmentation de l'image proche du collage comme d'une caméra en mouvement au constant. L'image ne serait pas complète sans le travail sur la piste sonore qui vient offrir une appréhension sensorielle de tout un cadre social en hors champ. Le scénario ne se complaît jamais dans des situations du sordide où la menace de l'inceste est omniprésente. Au contraire, au nom du leitmotiv « don't worry » Andrea Arnold célèbre la lumière de ses personnages pour construire un récit qui fait foyer.

Illustration 2

Bird
d'Andrea Arnold
Fiction
118 minutes. Royaume-Uni, USA, France, Allemagne, 2024.
Couleur
Langue originale : anglais

Avec : Barry Keoghan (Bug), Franz Rogowski (Bird), Nykiya Adams (Bailey), James Nelson-Joyce (Skate), Jasmine Jobson (Peyton), Joanne Matthews (Debs
Scénario : Andrea Arnold
Images : Robbie Ryan
Montage : Joe Bini
Monteur son : Rashad Hall-Heinz
Musique additionnelle : Burial
Son : Nicolas Becker
1er assistant réalisatrice : Adam Lock
Chef costumière: Alex Bovaird
Cheffe maquilleuse : Lisa Musafa
Direction artistique : Lili Lea Abraham et Kate Stamp
Décors : Maxine CarlierCostumes (Alex Bovaird et Gabriela Sena
Production : Lee Groombridge, Juliette Howell et Tessa Ross
Production déléguée : Claude Amadeo, Mollye Asher, Len Blavatnik, Jessamine Burgum, Danny Cohen, Michael D'Alto, Kara Durrett, Randal Sandler, Chris Triana et Eva Yates
Sociétés de production : BBC Film, British Film Institute, Access Entertainment, House Productions, Ad Vitam, Arte France Cinéma, FirstGen Content, Pinky Promise
Distributeur (France) : Ad Vitam

Sortie salles (France) : 1er janvier 2025

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